Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 février 2015, Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 22 octobre 2014 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées du préfet du Rhône du 27 février 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le refus de séjour est insuffisamment motivé ; une erreur de fait a été commise s'agissant des pathologies dont elle souffre ; il n'existait pas de traitement approprié à son état de santé ; le préfet n'est pas lié par l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé ; il n'y a pas eu d'examen particulier de sa situation ; elle ne souffre pas d'une maladie courante ; l'adénome hypophysaire est très certainement la conséquence de son diabète ; les éléments pris en compte par le tribunal n'étaient pas visés par le préfet dans ses décisions ; la pièce n° 2 produite par le préfet en première instance, non traduite, ne saurait être prise en compte ; rien ne permet de dire que les médicaments qu'elle prend pour son diabète seraient effectivement disponibles ; ils ne sont pas gratuits ni remboursés ; le préfet ne démontre pas la possibilité d'une prise en charge en Arménie telle qu'elle existe en France ; le préfet n'indique pas si elle peut voyager sans risque vers son pays ; des circonstances humanitaires exceptionnelles faisaient obstacle à son retour en Arménie ; il y a violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle a quitté l'Arménie il y a plus de 20 ans ; qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; elle procède d'une violation du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est elle-même sans base légale et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 février 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête
Il soutient que les moyens invoqués par la requérante sont infondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Picard.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante arménienne née en 1970 et entrée en France en 2009, relève appel du jugement du 22 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 février 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Considérant que le refus de titre de séjour en litige, qui vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte des précisions sur l'origine et les conditions d'entrée en France de l'intéressée, mentionne ses différentes démarches en vue d'obtenir un titre de séjour, fait également état, notamment, de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, de son contenu et des raisons pour lesquelles le préfet a entendu s'en écarter ; que dès lors, et même s'il ne se prononce pas en fonction des pathologies dont souffre précisément l'intéressée et des soins dont elles peuvent effectivement faire l'objet, lesquels sont couverts par le secret médical, reprenant une formulation analogue à celle utilisée par le préfet dans des situations comparables, ce refus, qui a été pris après un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée, est suffisamment motivé ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'avis émis en dernier lieu par le médecin de l'agence régionale de santé, non sérieusement contesté, que l'état de santé de la requérante, qui souffre d'un diabète sévère de type 1 et d'un syndrome dépressif, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait, compte tenu de l'absence de traitement approprié dans le pays d'origine, entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il nécessite un traitement de longue durée ; qu'il ressort toutefois des éléments produits par le préfet du Rhône en première instance, datant pour les plus récents de décembre 2013, que les pathologies dont souffre l'intéressée peuvent être prises en charge dans le pays dont elle possède la nationalité, où existent des traitements adaptés aux affections physiologiques et psychiatriques dont elle se trouve atteinte ; que si certains des documents ainsi produits sont rédigés en langue anglaise, aucun texte ni aucune règle générale de procédure n'interdit au juge d'en tenir compte, les parties pouvant joindre à leurs écrits des pièces annexes rédigées dans une langue étrangère ; que, malgré les carences du système sanitaire arménien ou l'inégale répartition sur le territoire des structures de prise en charge, les documents médicaux dont l'intéressée se prévaut, en particulier le certificat médical du 11 septembre 2014, ne permettent pas de tenir pour avérée l'impossibilité pour elle, compte tenu des pathologies dont elle est atteinte et des informations fournies par le préfet, d'être soignée en Arménie et d'y bénéficier de médicaments identiques à ceux qui lui sont prescrits en France ou de substances aux effets comparables et d'un suivi médical adapté, quand bien même leur efficacité serait moindre que celle des traitements aujourd'hui utilisés en France ; que la découverte, à cet égard, d'un adénome hypophysaire est postérieure à la date du refus de séjour contesté ; que, par ailleurs, l'intéressée ne peut utilement faire valoir que ni ses moyens financiers, ni le système sanitaire arménien, ne lui permettrait un accès effectif aux soins ; qu'enfin, l'intéressée, qui se borne à reprocher au préfet de ne pas s'être prononcé sur la possibilité pour elle de voyager sans risque vers son pays d'origine, alors que le médecin de l'agence régionale de santé n'a émis aucun avis sur ce point, n'apporte aucun élément qui tendrait à démontrer que le voyage de retour vers l'Arménie serait risqué pour elle ; que, malgré les éléments dont elle s'est prévalu à l'appui de sa demande de titre, qui tiennent en particulier aux conditions dans lesquelles elle a quitté son pays, s'est trouvée éloignée de son mari et a perdu un fils, MmeB..., qui a conservé en Arménie, où elle peut bénéficier de soins, des attaches familiales, rien ne permettant de dire qu'elle aurait cessé tout contact avec ses proches, ne justifie d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle au sens du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le refus de titre contesté n'est entaché d'aucune erreur de fait ou d'appréciation ;
6. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter ;
7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appréciation à laquelle s'est livré le préfet pour examiner la situation personnelle de l'intéressée, qu'il s'agisse de son état de santé ou de sa vie familiale, serait entachée d'une erreur manifeste ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " (...) ; que pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu ces dispositions ;
10. Considérant qu'il y a lieu, par les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal, d'écarter le moyen tiré de la violation par l'obligation de quitter le territoire français des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
11. Considérant que, par les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;
13. Considérant que, comme l'a jugé le tribunal, et par les mêmes motifs, qu'il convient d'adopter, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 16 février 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 mars 2016.
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N° 15LY00456
mg