Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 13 juillet et 21 décembre 2018, MM. B...A..., E...H..., E...K...et C...D..., représentés par la SELARL CDMF Avocats affaires publiques, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 mai 2018 ;
2°) d'annuler la délibération du 27 mai 2016 approuvant la modification n° 2 du plan d'occupation des sols du Sappey-en-Chartreuse, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la métropole Grenoble-Alpes Métropole la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le projet affectant l'économie générale du plan d'occupation des sols et traduisant la réduction d'une protection mentionnée au 3° de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme, le recours à la procédure de révision était requis en application de l'article L. 123-13 devenu L. 153-31 du code de l'urbanisme ;
- le choix d'un coefficient d'occupation des sols de 0,19 ne procède pas de l'enquête publique, en violation de l'article L. 123-13-2 alinéa 7 devenu L. 153-43 du code de l'urbanisme, et aurait justifié une nouvelle consultation des personnes publiques associées et une nouvelle enquête publique ;
- le dossier soumis à enquête publique était incomplet au regard des exigences de l'article R. 123-2-1 alinéa 10 devenu R. 151-5 du code de l'urbanisme, le rapport de présentation de la modification en litige étant insuffisamment explicite sur la situation existante et les objectifs de régularisation poursuivis ;
- l'augmentation sensible des possibilités de construction dans le hameau de Bens n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale approuvé en 2012.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2018, la métropole Grenoble-Alpes Métropole, représentée par la SCP I...Jorquera et associés, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 23 janvier 2019 par une ordonnance du même jour prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me J... pour M. A... et autres, ainsi que celles de Me I... pour la métropole Grenoble-Alpes Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 27 mai 2016, le conseil de la métropole Grenoble-Alpes Métropole a approuvé la modification n° 2 du plan d'occupation des sols (POS) du Sappey-en-Chartreuse prévoyant une augmentation du coefficient d'occupation des sols (COS) en zone UE de ce plan au lieu-dit "hameau de Bens" ainsi que le reclassement partiel d'une zone d'urbanisation future en zone naturelle à vocation agricole au lieu-dit "les barrières" et la suppression d'un secteur à plan de masse en zone urbaine du centre-bourg. M. A... et autres relèvent appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération.
Sur la légalité de la délibération du 27 mai 2016 :
En ce qui concerne la procédure de modification :
2. Pour demander l'annulation de la délibération du 27 mai 2016, les requérants soutiennent que la nature des modifications du POS envisagées par cette délibération, en particulier l'augmentation des possibilités de construire dans le hameau de Bens, imposait de recourir à la procédure de révision de ce document.
3. En vertu de l'article L. 123-19 alors en vigueur du code de l'urbanisme, les POS, qui sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme, peuvent faire l'objet d'une modification lorsqu'il n'est pas porté atteinte à leur économie générale et qu'il n'est pas décidé soit de réduire un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière, soit de réduire une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ou d'une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance.
4. La délibération en litige crée, au lieu-dit "hameau de Bens" et au sein de la zone UE dont il relevait précédemment, un sous-secteur destiné à l'accueil d'équipements de loisirs et de sport où elle porte à 0,19 le COS qui y était initialement fixé à 0,025. Alors même que, comme le font valoir les requérants, la commune du Sappey-en-Chartreuse est une commune rurale située au droit des falaises de Chamechaude et que le secteur en cause est proche du marais des Sagnes qu'il surplombe, cette modification du règlement du POS, portant, en ce qui concerne ce point, sur un espace de moins de 3,5 hectares et tenant compte de ce que le faible COS initial était dépourvu de pertinence du fait de la présence sur le site de constructions anciennes, ne porte pas atteinte à l'économie générale du POS du Sappey-en-Chartreuse. Cette modification ne saurait davantage être regardée comme traduisant en elle-même la réduction d'une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ni comme une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance. Alors que les requérants ne contestent pas que les deux autres modifications du POS approuvées par la délibération en litige et mentionnées au point 1 n'affectent pas, par elles-mêmes ou par leurs effets cumulés, l'économie générale du POS du Sappey-en-Chartreuse, le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la composition du dossier d'enquête publique :
5. Pour soutenir que le dossier soumis à enquête publique était incomplet et ne permettait pas au public de porter son appréciation sur le projet de POS en connaissance de cause, les requérants font valoir les insuffisances du rapport de présentation du POS modifié soumis au public en ce qui concerne l'exposé des motifs de la modification envisagée, au regard en particulier des possibilités ouvertes par cette modification de régulariser ou d'étendre des installations existantes. Toutefois, le rapport de présentation de la modification en litige, plus particulièrement en sa page 7, explicite sans ambiguïté le contenu et les motifs de la modification projetée au regard des caractéristiques des installations existantes, des objectifs de la commune s'agissant des équipements de loisirs et touristiques ainsi que des perspectives de développement dans ce secteur d'un centre équestre, et fait expressément état de l'augmentation du COS envisagée pour ce site. Dans ces conditions, le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la modification du projet après l'enquête publique :
6. Au soutien de leur requête, M. A... et autres font valoir que le choix d'un COS de 0,19 ne procède pas de l'enquête publique et aurait ainsi justifié, au regard des dispositions de l'article L. 123-13-2 alinéa 7 devenu L. 153-43 du code de l'urbanisme, l'organisation d'une nouvelle procédure de consultation des personnes publiques associées et d'enquête publique.
7. En vertu des dispositions dont les requérants invoquent la méconnaissance, il est loisible à l'autorité compétente d'amender le projet de modification de son document d'urbanisme après l'enquête publique lorsque ce changement procède de cette enquête et ne remet pas en cause l'économie générale du projet. Il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que le projet de délibération soumis à enquête publique prévoyait de retenir un COS de 0,25 dans le nouveau secteur du hameau de Bens, et que tant les requérants que le commissaire enquêteur ont, au cours de l'enquête publique, exprimé le souhait que ce coefficient soit réduit. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) de la région grenobloise :
8. Pour soutenir que l'augmentation des possibilités de construction dans le hameau de Bens n'est pas compatible avec le SCOT de la région grenobloise approuvé en 2012, les requérants font valoir que le document d'orientation et d'objectifs de ce SCOT inclut le secteur en litige, qui surplombe le marais des Sagnes identifié au titre de la trame verte et bleue de ce document, parmi les espaces naturels, agricoles et forestiers, et recense la commune du Sappey-en-Chartreuse parmi les communes des contreforts du massif de la Chartreuse pour lesquels il préconise de limiter le développement de l'urbanisation sur les versants en veillant à son intégration paysagère.
9. Toutefois, et alors que le SCOT de la région grenobloise, qui identifie un pôle touristique au Sappey-en-Chartreuse, invite également les documents d'urbanisme locaux à conforter l'attractivité touristique des communes concernées et notamment à répondre aux enjeux de rénovation des formes d'hébergement obsolètes tels certains centres de vacances, la modification du COS défini pour le secteur en cause ne saurait, dans le cadre d'une analyse globale à l'échelle du territoire couvert et de l'ensemble des prescriptions du SCOT de la région grenobloise, caractériser une incompatibilité du parti d'aménagement retenu pour le hameau de Bens avec les orientations générales et les objectifs définis par ce SCOT. Le moyen tiré par les requérants de la violation de l'objectif particulier que constituerait la préservation des espaces naturels des contreforts de la Chartreuse ne peut, par suite, qu'être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la métropole Grenoble-Alpes Métropole, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge solidaire des requérants le versement à la métropole intimée de la somme globale de 2 000 euros au titre des frais d'instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... et autres est rejetée.
Article 2 : M. A..., M. H..., M. K... et M. D... verseront solidairement la somme globale de 2 000 euros à la métropole Grenoble-Alpes Métropole au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., premier requérant dénommé, pour l'ensemble des requérants, et à la métropole Grenoble-Alpes Métropole.
Copie en sera adressée à la commune du Sappey-en-Chartreuse.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 avril 2019.
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N° 18LY02690
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