Procédure devant la cour
I) Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2016, sous le n° 16LY00044, le préfet du Rhône demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 décembre 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour en litige n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 17 mars 2016, Mme C... B..., représentée par Me Pochard, conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet du Rhône ne sont pas fondés.
II) Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015 sous le n° 16LY00045, le préfet du Rhône demande à la cour de prononcer un sursis à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 décembre 2015.
Il soutient que le refus de titre de séjour en litige n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 17 mars 2016, Mme B... conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable faute d'avoir d'être accompagnée d'une copie de la requête au fond et d'être motivée ;
- les moyens soulevés par le préfet du Rhône ne sont pas fondés.
Par décisions du 10 février 2016, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B... pour chacune de ces deux instances.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique :
_ le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller,
- et les observations de Me Pochard pour MmeB....
1. Considérant que par un jugement du 3 décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 19 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B..., l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ; que le préfet du Rhône relève appel de ce jugement et demande qu'il soit sursis à son exécution ;
2. Considérant que les requêtes du préfet du Rhône tendent respectivement à l'annulation et au sursis à l'exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet du même arrêt ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1o de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;
4. Considérant que, lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; que, disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française ; qu'il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée ;
5. Considérant que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme B..., ressortissante angolaise née le 30 mai 1996, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Rhône, après avoir relevé que l'intéressée avait été confiée à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de seize ans et dix mois, a rejeté sa demande au motif qu'elle n'était pas isolée en Angola, où résident sa mère et ses trois frères ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en se fondant sur ce seul motif, sans avoir procédé à un examen global de la situation de Mme B... au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française, le préfet a commis une erreur de droit ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions en litige du 19 décembre 2014 ;
7. Considérant que, dès lors qu'il est statué au fond sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué du 3 décembre 2015, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet ;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Pochard, avocat de Mme B..., au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation de sa part à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 16LY00044 du préfet du Rhône est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 16LY00045 du préfet du Rhône.
Article 3 : L'Etat versera à Me Pochard, avocat de Mme B..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation de sa part à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme C... B...et à Me A...Pochard.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre,
M. Gille, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2016.
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N°s 16LY00044, 16LY00045