Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 août 2015, présentée pour M. B..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 juillet 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est entaché d'un défaut d'examen préalable réel et sérieux de sa demande dès lors que le préfet ne s'est pas prononcé sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il lui est impossible de retourner en République démocratique du Congo afin d'y solliciter un visa de long séjour en raison des menaces pesant sur sa vie et sa sécurité dans ce pays ; il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation du fait de son inscription dans le système d'information Schengen qu'elle implique ;
- la décision octroyant un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Par un mémoire enregistré le 29 janvier 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le requérant ne peut utilement invoquer le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- pour le surplus, il s'en rapporte à ses écritures devant le tribunal administratif.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Clot, président.
1. Considérant que M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 22 février 1982, est entré irrégulièrement en France le 20 avril 2012, selon ses déclarations ; qu'il a présenté une demande d'asile rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 27 juin 2013 ; qu'il a sollicité le 2 décembre 2013 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade puis, le 21 juillet 2014, en qualité de conjoint de Française ; que, par arrêté du 19 décembre 2014, le préfet du Rhône lui a refusé les titres de séjour sollicités et a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de renvoi ; que M. B... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. /(...)/ 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). " ;
3. Considérant, en premier lieu lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fondement sur lequel le préfet du Rhône ne s'est pas prononcé par l'arrêté en litige ; qu'en outre, s'étant prévalu de sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, il relevait des dispositions du 4° de cet article, dont le 7° vise les étrangers qui n'entrent pas dans les catégories précédentes ; que, par suite, il ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes de l'article R. 313-1 dudit code : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : / (...) 2° Les documents, mentionnés à l'article R. 211-1, justifiant qu'il est entré régulièrement en France " ;
5. Considérant qu'aux termes du 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ; qu'il résulte de ce texte que l'autorité compétente pour accorder ou pour refuser le visa à un conjoint de ressortissant français séjournant avec lui depuis plus de six mois en France est l'autorité préfectorale ; que toutefois, M. B..., qui n'est pas entré régulièrement en France, ne peut bénéficier de ces dispositions ;
6. Considérant que pour refuser à M. B... le titre de séjour prévu par le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Rhône s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'il ne détient pas un visa de long séjour ; que l'intéressé allègue craindre pour sa vie ou son intégrité physique en cas de retour en République démocratique du Congo, en raison de son engagement politique en faveur de l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), qui lui aurait valu d'être interpelé et maltraité et aurait valu à sa famille d'être menacée et inquiétée, ce qui fait obstacle à ce qu'il retourne dans son pays d'origine pour solliciter le visa de long séjour exigé par les dispositions de l'article L. 311-7 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il n'établit pas, par son récit, d'ailleurs déjà écarté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ainsi que par les documents qu'il produit, en particulier les attestations de proches, la réalité des persécutions alléguées et des menaces actuelles et personnelles auxquelles il serait exposé en cas de retour en République démocratique du Congo ; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige, par laquelle préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Française, en faisant état de sa possibilité de retourner en République démocratique du Congo le temps de l'instruction d'une procédure de délivrance de visa de long séjour, doivent être écartés ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
8. Considérant qu'à la date de l'arrêté en litige, M. B... était présent en France depuis moins de trois ans et marié à une ressortissante française depuis seulement cinq mois ; qu'aucun enfant n'était né de cette union et que le requérant n'établit pas le caractère indispensable de sa présence auprès de son épouse pour prendre soin des trois enfants mineurs de celle-ci, nés d'une précédente union ; qu'en outre, le requérant et son épouse ne pouvaient pas ignorer, dès le début de leur relation, que leurs perspectives communes d'installation en France étaient incertaines, en l'absence de droit au séjour détenu par M.B... ; qu'enfin, M. B... n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside notamment sa mère et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée de séjour et des conditions d'entrée et de séjour de M. B... en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés plus haut, en refusant de régulariser la situation administrative de M. B..., le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...)" ;
11. Considérant que les circonstances de fait énoncées ci-dessus ne révèlent pas l'existence de motifs exceptionnels ou de circonstances humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont M. B... pourrait se prévaloir ; que, dès lors, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour à titre exceptionnel ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;
13. Considérant que M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 19 décembre 2014 ; qu'ainsi, à cette date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
14. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;
15. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour en litige, et alors que les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur les demandes de visa de long séjour formées par les conjoints de Français dans les meilleurs délais, en obligeant M. B... à quitter le territoire français, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur la légalité de la décision octroyant un délai de départ volontaire :
16. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant un délai de départ volontaire ;
17. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;
18. Considérant que le fait que M. B...était présent en France depuis deux ans et marié à une Française ne constituent pas des circonstances exceptionnelles qui auraient justifié, en l'espèce, que lui soit octroyé, à titre exceptionnel, un délai supérieur au délai de droit commun prévu par la loi pour organiser son départ ; que, dès lors, le préfet n'a pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation sa décision accordant trente jours au requérant pour quitter volontairement le territoire français ;
Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :
19. Considérant que la décision désignant le pays de renvoi n'ayant pas été prise en application ni sur le fondement de la décision portant refus de titre de séjour, M. B... ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ce refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 février 2016.
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N° 15LY02988
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