Par un jugement n° 1600039 du 12 janvier 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 janvier 2016, M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 janvier 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions ci-dessus mentionnées du préfet de l'Yonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de cette notification et de lui délivrer, pour la durée de cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas examiné sa demande de titre de séjour, sur laquelle il ne s'est pas prononcé ;
- l'obligation de quitter le territoire français sans délai n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est intervenue sans examen particulier de sa situation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence ; elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques qu'il encourt dans le pays dont il possède la nationalité ;
- l'assignation à résidence est illégale par voie de conséquence.
Par un mémoire enregistré le 15 avril 2016, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B...d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Par une décision du 17 février 2016 a été constatée la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M.B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Clot,
- et les observations de MeC..., substituant Me Claisse, avocat du préfet de l'Yonne.
1. Considérant que M.B..., ressortissant du Kosovo, né le 15 mars 1966, déclare être entré irrégulièrement en France le 1er décembre 2011, accompagné de son épouse et de leurs quatre enfants ; que l'asile lui a été refusé par l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 21 juin 2013 et par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 19 décembre 2013 ; qu'il a demandé le 7 février 2014 un titre de séjour pour raisons médicales et qu'un refus, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, lui a été opposé le 16 juin 2014 ; que son recours contre ces décisions a été rejeté par jugement du tribunal administratif de Dijon du 12 septembre 2014 ; que l'asile lui a de nouveau été refusé par l'OFPRA le 24 septembre 2014 et par la CNDA le 12 février 2015 ; que M. B...a de nouveau sollicité, le 24 avril 2015, un titre de séjour pour raisons médicales ; que le 5 janvier 2016, le préfet de l'Yonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a assigné à résidence ; que M. B...relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 5 janvier 2016 ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français sans délai :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). /La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...). /II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. /Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) " ;
3. Considérant que la décision du 5 janvier 2016 portant obligation de quitter le territoire français sans délai mentionne que M. B...a sollicité le 24 avril 2015 un titre de séjour pour raisons médicales et vise l'avis émis sur cette demande par le médecin de l'agence régionale de santé qui a estimé, le 24 septembre 2015, que l'intéressé ne présente pas une pathologie grave ne pouvant pas être traitée dans son pays d'origine ; que cette décision ajoute que M. B...n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour ; qu'ainsi, alors même que la décision ne le mentionne pas expressément, il résulte de ses termes mêmes que le préfet a, en réalité, entendu refuser de délivrer un titre de séjour à M.B... ; que, dès lors, celui-ci ne saurait soutenir que le préfet n'aurait pas examiné sa demande de titre de séjour, sur laquelle il ne se serait pas prononcé ;
4. Considérant, par suite, que, le 5 janvier 2016, l'intéressé se trouvait dans le cas que prévoient les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
5. Considérant que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se confond, s'agissant du principe d'une telle obligation, avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique ; qu'en l'espèce, la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision, en tant qu'elle porte refus de séjour, mentionne les dispositions dont il a été fait application et les éléments de fait qui la fondent ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français doit, en conséquence, être écarté ;
6. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la décision que, contrairement aux allégations du requérant, le préfet s'est livré à un examen particulier de sa situation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
7. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; que M.B..., qui invoque son origine rom, mais à qui le statut de réfugié a d'ailleurs été refusé, ne justifie pas de la réalité des risques qu'il allègue encourir en cas de retour au Kosovo ;
Sur la légalité de la décision portant assignation à résidence :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (...) " ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
12. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du préfet de l'Yonne tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du préfet de l'Yonne tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Il en sera adressé copie au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2016.
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N° 16LY00360
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