Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2020, la SARL Mami, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SARL Mami soutient que la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que le rehaussement en litige résulte nécessairement d'un contrôle sur place des documents comptables de la SCI La Bourne qui n'a pas été précédé de l'avis de vérification prévu par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.
Par un mémoire, enregistré le 6 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient que le moyen invoqué par la SARL Mami n'est pas fondé.
Par une ordonnance du 10 février 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 mars 2021 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., première conseillère,
- et les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat de vente à réméré du 27 décembre 2001, la SCI La Bourne, ayant pour activité la location de locaux nus et dont le capital est détenu à 97,65 % par la SARL Mami, a cédé un ensemble immobilier composé d'un bâtiment à usage de scierie et de terrains situés sur le territoire de la commune de Lans-en-Vercors, pour lequel elle se réservait la faculté de rachat prévu par l'article 1659 du code civil. Elle a constitué, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2001, une provision de 120 711 euros pour risque de réméré. La SCI La Bourne ayant exercé sa faculté de rachat moyennant le versement d'une somme de 556 216 euros en 2011, l'administration a considéré que la provision pour risque de réméré était devenue sans objet et l'a réintégrée dans son résultat de l'année 2011. En conséquence, la SARL Mami a été assujettie, au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2012, à un complément d'impôt sur les sociétés, notifié selon la procédure contradictoire, assortis des intérêts de retard prévus à l'article 1727 du code général des impôts. La SARL Mami relève appel du jugement du 7 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition et des pénalités correspondantes.
2. D'une part, il ressort des dispositions de l'article 172 bis du code général des impôts, ainsi que des dispositions réglementaires des articles 46 B à D de l'annexe III à ce code, prises pour leur application, qu'afin d'examiner les documents comptables et autres pièces justificatives que ces dernières dispositions imposent de tenir aux sociétés civiles qui donnent leurs immeubles en location ou en confèrent la jouissance à leurs associés, l'administration peut légalement procéder à un contrôle sur place de ces documents, dans le respect des garanties bénéficiant à l'ensemble des contribuables vérifiés.
3. D'autre part, aux termes de l'article 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) ". Aux termes de l'article R. 13-1 de ce livre : " Les vérifications de comptabilité mentionnées à l'article L. 13 comportent notamment : / a) La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce ; / b) L'examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de la comptabilité à l'aide particulièrement des renseignements recueillis à l'occasion de l'exercice du droit de communication, et de contrôles matériels. ". Aux termes de l'article L. 47 du même livre : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un membre d'une profession non commerciale lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise ou le contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont, le cas échéant, elle peut remettre en cause l'exactitude. L'exercice régulier du droit de vérification de comptabilité suppose le respect des garanties légales prévues en faveur du contribuable vérifié, au nombre desquelles figure notamment l'envoi ou la remise de l'avis de vérification auquel se réfère l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.
4. La SARL Mami soutient que l'imposition litigieuse mise à sa charge résulterait d'un contrôle sur place des documents comptables dont la SCI La Bourne aurait fait l'objet sans bénéficier des garanties dont cette procédure est assortie, en particulier l'envoi préalable de l'avis de vérification prévu par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.
5. Il résulte cependant de l'instruction que, lors de la vérification de comptabilité, initiée par un avis de vérification notifié le 18 novembre 2011 et visant à contrôler la demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée constaté par la SCI La Bourne au titre du troisième trimestre 2011, le conseil de cette société a informé le service, par un courrier du 25 novembre 2011, de ce qu'elle avait exercé la faculté de rachat prévue au contrat de vente à réméré conclu le 27 décembre 2001, et dont la régularité a été confirmée par un jugement du tribunal de grande instance de Grenoble du 8 juillet 2009. L'administration a pu constater, à l'examen de la seule déclaration n° 2072-C souscrite par la SCI La Bourne que cette dernière n'avait pas procédé, au 31 décembre 2011, à la reprise de la provision pour risque de réméré. Par suite, il est constant que l'imposition litigieuse mise à sa charge fait suite à un contrôle sur pièces effectué à partir des éléments figurant dans le dossier fiscal de la SCI Le Bourne et ne procède pas d'un contrôle sur place de la déclaration souscrite pas cette SCI en la comparant aux écritures de bilan de celle-ci. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'imposition aurait été établie irrégulièrement en l'absence d'envoi à cette société de l'avis de vérification mentionné à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que la SARL Mami n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Mami est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Mami et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2021 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2021.
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N° 20LY00063