I- Par une requête enregistrée le 25 juin 2020 sous le n° 20LY01694, M. G..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 25 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 du préfet du Rhône le concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
II- Par une requête enregistrée le 25 juin 2020 sous le n° 20LY01696, Mme G..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 25 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 du préfet du Rhône la concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle invoque les mêmes moyens que M. G... au soutien de la requête n° 20LY01694.
L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme G..., ressortissants albanais nés respectivement le 12 octobre 1975 et le 14 novembre 1983, accompagnés de leurs enfants B... et E..., nés respectivement en 2006 et 2013, sont entrés en France le 29 avril 2014, selon leurs déclarations, et ont sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Leurs demandes ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 2 septembre 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 16 février 2015. M. et Mme G... ont sollicité, le 24 novembre 2016, leur admission au séjour en qualité d'accompagnants d'enfant malade sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de l'état de santé de leur fils E.... Par deux arrêtés du 26 novembre 2019, le préfet du Rhône a rejeté leurs demandes, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office à l'expiration de ce délai. M. et Mme G... relèvent appel du jugement du 25 mai 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
2. Les requêtes enregistrées sous les nos 20LY01694 et 20LY01696 sont relatives à la situation de deux époux au regard de leur droit au séjour en France et sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites ".
4. M. et Mme G... font valoir que leur fils E... souffre de troubles de la communication, d'un retard de développement psychomoteur avec microcéphalie et de troubles des apprentissages scolaires qui rendent nécessaire une prise en charge pluridisciplinaire en France. Toutefois, le préfet du Rhône a estimé, au vu du dossier et, notamment, de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 24 mai 2018, qu'à la date de la décision attaquée, l'état de santé du jeune E... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque. Les requérants produisent devant la cour l'ensemble des rapports établis entre 2014 et 2019 à la suite d'admissions aux urgences du jeune E... pour des fièvres, infections virales, éruptions cutanées, otites, angines, pharyngites, gastro-entérites, affections de la verge et plaie au majeur, ainsi qu'un certificat médical établi le 9 mai 2017 par un médecin en neurologie pédiatrique indiquant qu'il présente un retard de développement psychomoteur et que les rééducations dont il bénéficie justifient l'attribution de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, un certificat médical établi le 11 décembre 2019 par un médecin psychiatre indiquant que le jeune E... souffre de difficultés de développement, et enfin les bilans établis par un orthophoniste et par des psychologues. Toutefois, aucun de ces documents, qui se bornent à décrire les pathologies dont souffre l'enfant et la prise en charge orthophonique, psychologique et éducative dont il bénéficie, ne permet d'établir que l'absence d'une prise en charge médicale pourrait entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet du Rhône a méconnu les dispositions de l'article L. 31112 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. et Mme G... font valoir qu'ils résident en France depuis 2014, que leur fils E... souffre de plusieurs pathologies justifiant des soins sur le territoire national et que leur fils H... y est né en 2017. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point 4 que la nécessité d'une prise en charge du jeune E... en France n'est pas établie. En outre, M. et Mme G... ne sont pas dépourvus d'attaches privées et familiales en Albanie, pays dans lequel ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de trente-neuf et trente-et-un ans. Rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans ce pays dont tous les membres ont la nationalité, alors qu'aucune pièce versée au dossier ne démontre que les structures adaptées ne seraient pas accessibles à leur fils. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, en refusant de les admettre au séjour, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de M. et Mme G... au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants.
7. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. M. et Mme G... font valoir que l'intérêt supérieur de leur fils E... exige qu'il poursuive le suivi pluridisciplinaire et la scolarité engagés en France. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 4, la nécessité pour leur enfant d'être pris en charge en France n'est pas établie. En outre, les décisions litigieuses n'impliquent pas que les enfants de M. et Mme G... soient séparés de leurs parents. Enfin, rien ne fait obstacle à ce que ces enfants soient scolarisés en Albanie. Par suite, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet du Rhône n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de l'enfant en prenant les décisions contestées. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme G... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G... et à Mme I... C... épouse G.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 avril 2021.
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N° 20LY01694 - 20LY01696