Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 24 janvier 2020, M. E..., représenté par Me Petit, demande à la cour :
1°) avant-dire-droit, d'enjoindre au préfet du Rhône de produire les extraits de l'application Themis relatifs à l'instruction de sa demande de titre de séjour ;
2°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 17 décembre 2019 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
4°) en cas d'annulation de la décision portant refus d'un titre de séjour, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dès la notification de l'arrêt ;
5°) en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dès la notification de l'arrêt ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
- la procédure suivie est irrégulière, dès lors que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas émis son avis à l'issue d'une délibération collégiale ;
- cet avis est incomplet dès lors qu'il ne se prononce pas sur l'effectivité de l'accès au traitement rendu nécessaire par son état de santé dans son pays d'origine ;
- il n'est pas établi que le collège de médecins de l'Office ait rendu son avis, s'agissant de l'appréciation des conséquences d'une exceptionnelle gravité de l'absence de prise en charge, conformément aux conditions prévues par l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017, ni qu'il ait procédé à un examen particulier de sa situation ;
- le préfet du Rhône s'est estimé à tort lié par l'avis du collège de médecins de l'Office et n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la décision attaquée méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision attaquée se fonde sur un refus de titre de séjour illégal ;
- la décision attaquée méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
- la décision attaquée se fonde sur un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire français illégales.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas présenté d'observations.
En application de l'article R. 611-7 du code justice administrative, les parties ont été informées par courrier du 1er octobre 2020 que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon pour statuer sur la requête qui relevait d'une formation collégiale du tribunal.
M. E... a présenté le 6 octobre 2020 un mémoire en réponse au moyen d'ordre public, qui n'a pas été communiqué.
Par une décision du 22 janvier 2020, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle formulée par M. E....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure ;
- et les observations Me Petit, représentant M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant sierra-léonais né le 22 janvier 1978, est entré en France le 7 juin 2011, selon ses déclarations, et a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 juin 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 1er mars 2013. Par un arrêté du 27 novembre 2013, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 11 juillet 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de l'admettre au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par un arrêté du 12 octobre 2015, le préfet du Rhône a de nouveau refusé de l'admettre au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et lui a fait obligation de quitter le territoire français. A la suite d'un vice de procédure, le préfet du Rhône a retiré cet arrêté le 24 mai 2016 et a délivré à M. E... un titre de séjour en qualité d'étranger malade, valable du 25 juillet 2016 au 24 juillet 2017. Le 26 juin 2017, M. E... a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 1er juillet 2019, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. E... relève appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " I. _ L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 du présent code ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au III du présent article. (...) III. _ En cas de placement en rétention en application de l'article L. 551-1, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant, dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention (...). ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 1er juillet 2019 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de renouveler le titre de séjour de M. E... a été prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant a été placé en rétention ou assigné à résidence avant le jugement. Ainsi, en application du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon n'était pas compétent pour statuer seul sur la demande de M. E... qui relevait d'une formation collégiale du tribunal. Il s'ensuit que le jugement est irrégulier et doit être annulé.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Lyon.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ".
6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. / (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle ".
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et, notamment, de l'attestation établie le 2 mai 2018 par le directeur territorial de Lyon de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qu'un rapport médical a été établi le 7 février 2018 par le docteur Royannez, médecin du service médical de l'Office, et que l'avis du 2 mai 2018 du collège de médecins de l'Office a été émis à la suite de ce rapport, qu'il vise. Cet avis mentionne en outre qu'il a été établi par les trois médecins qui composent le collège, les docteurs Beaupère, Benazouz et Amoussou, qui ont été régulièrement désignés par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il ressort enfin des pièces du dossier que le médecin qui a rédigé le rapport ne faisait pas partie du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il s'ensuit que les moyens tirés de l'absence d'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de l'absence de rapport médical transmis au collège de médecins de l'Office et de ce que le médecin rapporteur aurait siégé au sein de ce collège doivent être écartés.
8. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et, notamment, des mentions figurant sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant examiné la situation de M. E..., que cet avis, qui est signé par les trois médecins qui composent ce collège, indique expressément qu'il a été émis, " après délibération ", le 2 mai 2018. La seule circonstance que ces médecins exercent leur activité dans des villes différentes ne suffit pas à établir qu'ils n'auraient pas délibéré de façon collégiale, au besoin au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle comme le prévoient les dispositions du quatrième aliéna de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de la garantie tenant au débat collégial du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sont appréciées sur la base des trois critères suivants: degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. / Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine ".
10. En vertu des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et des articles R. 313-22 et R 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 31322, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue au 11° de l'article L. 313-11, doit accomplir sa mission dans le respect des orientations générales définies par l'arrêté du ministre chargé de la santé du 5 janvier 2017 et émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016 des ministres chargés de l'immigration et de la santé. S'il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur la demande de carte de séjour, de s'assurer que l'avis a été rendu par le collège de médecins conformément aux règles procédurales fixées par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'arrêté du 27 décembre 2016, il ne saurait en revanche porter d'appréciation sur le respect, par le collège des médecins, des orientations générales définies par l'arrêté du 5 janvier 2017, en raison du respect du secret médical qui interdit aux médecins de donner à l'administration, de manière directe ou indirecte, aucune information sur la nature des pathologies dont souffre l'étranger. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, il appartient au juge administratif, lorsque le demandeur lève le secret relatif aux informations médicales qui le concernent en faisant état de la pathologie qui l'affecte, de se prononcer sur ce moyen au vu de l'ensemble des éléments produits dans le cadre du débat contradictoire et en tenant compte, le cas échéant, des orientations générales fixées par l'arrêté du 5 janvier 2017.
11. Le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans son avis émis le 2 mai 2018, que si l'état de santé de M. E... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge n'était pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Aucune pièce du dossier n'est de nature à établir que le collège de médecins de l'Office n'aurait pas tenu compte des critères mentionnés à l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 pour estimer que l'absence de prise en charge médicale n'était pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des orientations générales définies à l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 doit être écarté.
12. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. E... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, le collège de médecins de l'Office n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour M. E... de bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, M. E... n'est ni fondé à soutenir que la décision en litige a été prise au vu d'un avis incomplet, ni que le collège des médecins de l'Office n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation.
13. En quatrième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet du Rhône se serait estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office, ni qu'il se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de M. E....
14. En cinquième lieu, M. E... fait valoir qu'il souffre d'un stress post-traumatique avec éléments psychotiques et que le défaut de prise en charge de sa pathologie est susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, le certificat médical qu'il produit, établi le 9 janvier 2020 par un médecin psychiatre, qui rappelle les symptômes qu'il a lui-même rapportés et le traitement médicamenteux qui lui est prescrit, indique qu'il fait l'objet d'un suivi trimestriel par un médecin et d'un suivi mensuel par une infirmière référente et fait état d'une stabilisation de son état de santé, ne comporte aucun élément permettant d'établir qu'une absence de prise en charge médicale pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si le requérant se prévaut en outre du rapport médical confidentiel établi par le médecin rapporteur de l'Office le 7 février 2018, ce rapport, qui se borne à indiquer la nature de la pathologie de M. E..., son ancienneté, la nature et la fréquence des soins reçus, l'état mental du demandeur d'après le dossier médical qu'il a transmis et à reproduire, sous la rubrique " perspectives et pronostic au vu du dossier médical fourni ", les éléments indiqués dans le dossier médical, à savoir : " pronostic inquiétant au vu des éléments psychotiques au premier plan ", et dans le certificat médical de l'Office : " soins à prévoir au long court ", sans porter aucune appréciation supplémentaire sur la gravité de l'état de santé de l'intéressé, ne permet pas à lui seul d'établir l'existence de conséquences d'une exceptionnelle gravité en cas de défaut de prise en charge médicale. Le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté.
15. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
16. M. E... fait valoir qu'il vit en France depuis 2011, qu'il a été admis au séjour depuis le mois de juin 2016 et qu'il a établi une vie commune avec Mme D..., ressortissante guinéenne qui a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié, qu'il a rencontrée au mois de juin 2018 et qui a donné naissance à leur enfant le 30 mars 2019. Toutefois, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale. Le préfet du Rhône a fait valoir en première instance, sans être contredit, que Mme D... se maintient irrégulièrement en France depuis la notification, le 3 avril 2019, de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 février 2019 rejetant sa demande d'asile. M. E... ne fait état d'aucun élément faisant obstacle à ce que sa compagne et lui-même poursuivent leur vie familiale avec leur jeune enfant en Sierra-Leone, en Guinée ou dans tout autre pays où ils seraient légalement admissibles. En outre, la double circonstance que M. E... a été admis au séjour durant un an, en qualité d'étranger malade, puis au cours des deux années durant lesquelles la demande de renouvellement de son titre de séjour a été examinée, et qu'il a exercé une activité professionnelle à compter du mois de février 2017 ne saurait être regardée comme lui conférant un droit au séjour en France. Il ressort des pièces du dossier que M. E... n'est pas dépourvu de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans et où résident notamment ses trois premiers enfants ainsi que ses frères et soeurs. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée ne porte pas au droit de M. E... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que cette décision a méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
18. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
19. Ainsi qu'il a été dit au point 14 du présent arrêt, M. E... ne justifie pas que le défaut de prise en charge médicale aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
20. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision attaquée au regard de la situation personnelle de M. E..., qui reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
21. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision refusant un titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
22. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de solliciter la production de pièces supplémentaires, que M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.
23. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une quelconque somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1905740 du 17 décembre 2019 du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande de M. E... présentée devant le tribunal administratif de Lyon ainsi que le surplus de ses conclusions présentées en appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Duguit-Larcher, première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
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N° 20LY00350
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