Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 juillet 2020 et le 10 août 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 25 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 5 novembre 2019 ;
3°) d'enjoindre, avant-dire-droit, au préfet du Rhône de verser aux débats les extraits de l'application Themis ;
4°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans un délai quinze jours ;
5°) subsidiairement, de le renvoyer devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il soit statué sur sa demande ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. C... soutient que :
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur trois moyens ;
- la décision de refus de titre de séjour est irrégulière du fait du caractère obsolète de l'avis émis par le collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration vingt mois plus tôt et alors qu'il avait entre-temps subi une greffe oculaire spécifique ; à tout le moins, le préfet aurait dû lui permettre d'actualiser sa situation médicale, le cas échéant de saisir à nouveau le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, avant de prendre sa décision ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une absence d'examen réel, sérieux et particulier de sa situation compte tenu du caractère obsolète de l'avis émis par le collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- il appartient à l'administration d'établir, au moyen des extraits de l'application Thémis, que les trois médecins composant le collège de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui exercent dans des territoires différents, se sont effectivement réunis pour délibérer collégialement ;
- la perte de la vision d'un oeil est de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; le traitement approprié n'est disponible qu'en France et il a été inclus dans un protocole de soins du CHU Edouard Herriot de Lyon et doit être suivi dans ce cadre jusqu'en 2023 ; la décision de refus de titre de séjour méconnaît donc le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et du fait de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; le préfet aurait dû, en outre, tenir compte de la nécessité de ne pas interrompre les soins dispensés à M. C... ;
- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas présenté d'observations.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., première conseillère,
- et les observations de M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né en 1989 et de nationalité kosovare, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 novembre 2019 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. Dans son mémoire enregistré le 20 janvier 2020 devant le tribunal administratif, M. C... avait soulevé les moyens tirés de l'absence d'examen particulier de sa situation personnelle et du vice de procédure entachant la décision de refus de titre de séjour, en raison du délai de vingt mois s'étant écoulé entre cette décision et l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et des éléments nouveaux survenus entre-temps. Il résulte des termes du jugement attaqué que le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon n'a pas examiné ces moyens qui n'étaient pas inopérants. Le jugement est, par suite, entaché d'irrégularité et il doit être annulé, sans qu'il soit besoin d'enjoindre avant-dire-droit au préfet du Rhône de verser aux débats les extraits de l'application Themis.
3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il statue de nouveau sur la demande de M. C....
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me B..., avocat de M. C..., au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 25 mai 2020 est annulé.
Article 2 : M. C... est renvoyé devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me B... au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme E..., présidente-assesseure,
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.
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N° 20LY01854