Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 1er août 2016 et le 3 mars 2017, la SAS Etablissements Devaux et Fillard, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 juin 2016 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ainsi que la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article 1499 du code général des impôts ne trouvent pas à s'appliquer en l'absence d'activité industrielle exercée dans son établissement ;
- son activité relève de la construction, du bâtiment et des travaux publics, dans le secteur de la menuiserie métallique et de la serrurerie et ne saurait relever de la qualification d'industrielle ;
- elle n'a aucune activité de fabrication ni de transformation ;
- contrairement aux affirmations du service, la valeur totale de l'outillage utilisé par l'entreprise, qui ne saurait préjuger de la prépondérance de leur rôle, est très inférieure à la moitié des immobilisations inscrites à l'actif du bilan ;
- le nombre réduit de personnes travaillant de manière permanente dans les locaux démontre le caractère très secondaire du matériel et des moyens techniques mis en oeuvre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 19 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 12 janvier 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure ;
- et les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée Etablissements Devaux et Fillard, qui a pour objet la réalisation de travaux de menuiserie métallique et de serrurerie, l'ensemble immobilier situé sur le territoire de la commune de Voglans qu'elle utilise pour son exploitation a été qualifié par l'administration fiscale d'établissement industriel au sens et pour l'application des dispositions de l'article 1499 du code général des impôts. Des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises ont été mises à sa charge, respectivement au titre de l'année 2010, 2011, 2012 et 2013 dans les rôles de la commune de Voglans. Par un jugement du 27 juin 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de la société tendant à la décharge de ces impositions.
2. Aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". Pour l'application de ces dispositions, revêtent un caractère industriel les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste en la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.
3. En premier lieu, les références à l'activité exercée par la société sur des chantiers ou à son appartenance au secteur du bâtiment et des travaux publics sont dépourvues de pertinence pour déterminer si l'ensemble immobilier en cause doit recevoir la qualification d'établissement industriel. Pour se prononcer sur la pertinence de cette qualification, il convient uniquement de s'attacher à l'importance et au rôle des moyens techniques de production dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est principalement utilisé.
4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que la société appelante prend à bail les installations en cause non seulement pour y stocker les pièces métalliques qui ont vocation à être posées sur les chantiers sur lesquels elle intervient mais surtout pour les y ajuster et les préparer en vue de leur assemblage sur ces chantiers. La préparation des pièces implique le sciage des tubes et poutrelles, le perçage des profils en vue de l'assemblage, le marquage des pièces, la préparation des pièces d'assemblage par poinçonnage et cisaillage, soudure, la quantité et les formes spécifiques des pièces fabriquées nécessitant l'utilisation de machines performantes. Les opérations d'ajustement, de découpe, de perçage, de vitrage, réalisées grâce au matériel et outils présents au sein du bâtiment correspondent en l'espèce à une activité de transformation de biens corporels mobiliers.
5. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que l'accomplissement des tâches du personnel affecté à l'activité réalisée au sein du bâtiment y rend nécessaire la présence d'un pont roulant et de portiques roulants et de différentes machines outils, telles que des presses plieuses servant à l'ajustement de certaines pièces en vue de leur assemblage, des presses hydrauliques utilisées pour percer des trous en vue de l'assemblage, une tronçonneuse permettant la découpe des pièces métalliques, une presse à vitrer pour poser les vitres sur les châssis, ou des encocheuses pour réaliser des encoches facilitant le montage. Eu égard à la nature des installations en cause, à leur spécificité et à leur valeur, les moyens techniques que nécessite l'activité exercée dans le bâtiment doivent être regardés comme importants.
6. Enfin, la société appelante ne saurait utilement se prévaloir, pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, d'interprétations données par l'administration de la notion d'établissement industriel ou d'activité industrielle au sens et pour l'application d'autres articles du code général des impôts. Il en va de même de décisions jurisprudentielles qui, si elles ont été amenées à se prononcer sur la notion d'activité industrielle ou d'établissement industriel au sens d'autres dispositions du code général des impôts n'ont donné lieu à aucune interprétation de cette notion au sens de l'article 1499 de ce code.
7. Dès lors que l'activité de l'établissement en cause consiste en la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et nécessite d'importants moyens techniques, elle revêt un caractère industriel. Il apparaît par suite inutile de déterminer si le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre y est prépondérant et de répondre aux arguments développés par la société appelante sur ce dernier point.
8. Il résulte de ce qui précède que la SAS Etablissements Devaux et Fillard n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Dès lors, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Etablissements Devaux et Fillard est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Etablissements Devaux et Fillard et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2018, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Menasseyre, présidente assesseure,
Mme A..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
N° 16LY02757