Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 octobre 2014, M.D..., représenté par Me B... A..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 juillet 2014 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté du préfet de l'Isère du 14 mars 2014 ;
3°) d'enjoindre au Préfet de l'Isère de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du prononcé du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
M. D...soutient que :
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui faisant l'obligation de quitter le territoire français méconnaît, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus de départ volontaire est entachée d'une erreur de fait et méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1-II 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car il justifie d'un passeport en cours de validité et a bien déclaré le lieu de sa résidence effective ; elle méconnaît, en outre, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de son renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 7 septembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 28 septembre 2015 à 16H30.
La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.
Par un mémoire complémentaire, enregistré le 2 septembre 2015, M. D...persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens.
Par ordonnance du 28 septembre 2015 la clôture d'instruction a été reportée du 28 septembre 2015 au 14 octobre 2015 à 16H30.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 septembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mear, président-assesseur,
- et les observations de Me B...A..., représentant M.D....
1. Considérant que M. D...né le 14 février 1994, de nationalité congolaise ( RDC), est entré en France, selon ses déclarations, le 6 mars 2011 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mai 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 décembre 2012 ; que, par arrêté du 18 décembre 2012 le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de demandeur d'asile dont la légalité a été confirmée par jugement du tribunal administratif de Grenoble le 25 juin 2013 ; qu'il a sollicité, le 8 janvier 2013, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 7°, L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 14 mars 2014, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et a fixé le pays de son renvoi ; que, par jugement du 22 juillet 2014 le tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, en son article 2, annulé la décision du 14 mars 2014 portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans et, d'autre part, en son article 3, rejeté le surplus de la demande de M. D... ; que ce dernier relève appel de l'article 3 de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et des décisions lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de son renvoi ;
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant que M. D...soutient qu'il ne peut mener une vie familiale normale dans son pays d'origine où il a été emprisonné et a fait l'objet de graves menaces, qu'il s'est parfaitement intégré en France où il a noué de nombreuses relations amicales, qu'il bénéficie d'un contrat d'aide à jeune majeur signé avec le département de l'Isère, que grâce à sa volonté et à ses efforts il a obtenu son brevet des collèges, un diplôme de langue française, un diplôme informatique, a réussi sa seconde en série professionnelle et qu'il est scolarisé en première dans la même série ; que, toutefois, M.D..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, n'apporte aucune pièce de nature à établir la réalité des risques encourus dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, qu'à la date de la décision attaquée, le 14 mars 2014, il ne résidait en France, selon ses déclarations, que depuis trois ans, qu'il est célibataire et ne dispose d'aucune attaches familiales en France alors que sa mère et son frère résident en République Démocratique du Congo où il a vécu jusqu'à son entrée sur le territoire français ; que, dans ces conditions, et alors même que les résultats scolaires de M. D...témoignent de son sérieux et de son assiduité dans ses études, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des objectifs de cette mesure ; que si M. D...fait valoir dans le dernier état de ses écritures, qu'il a obtenu son brevet d'études professionnelles, réussi son bac professionnel avec de bons résultats et qu'il souhaite continuer ses études en BTS par alternance au titre de l'année 2015/2016, ces dernières circonstances, postérieures à la décision attaquée, sont sans incidence sur la légalité de cette décision qui doit être appréciée à la date à laquelle elle a été prise ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que cette décision a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...ayant fait l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour, entre dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
5. Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux invoqués en ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;
Sur la légalité de la décision portant refus de délai de retour volontaire :
6. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile" ;
7. Considérant, en premier lieu, que pour refuser d'accorder un délai de départ à M. D... le préfet de l'Isère a, sur le fondement du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, considéré que l'intéressé ne présentait pas de garanties suffisantes de représentation et ainsi qu'il existait un risque de fuite aux motifs qu'il ne pouvait justifier de documents de voyage en cours de validité tel qu'exigés à l'article L. 211-1 du même code et que l'intéressé n'avait pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente puisqu'il n'avait déclaré qu'une adresse postale dans une association ; que si M. D... fait valoir qu'il avait déclaré son lieu de résidence effective lequel figurait sur le récépissé de demande de titre de séjour qui lui a été délivré le 7 octobre 2013, il n'établit pas que l'adresse mentionnée sur ce document était toujours sa résidence effective ou permanente à la date de la décision attaquée ; que, par ailleurs, la production d'une seule copie d'une page d'un passeport qui aurait été établi, à Kinshasa, le 11 février 2013, signé par M.D..., alors que ce dernier soutient résider en France depuis mars 2011 et ne pas pouvoir rentrer dans son pays d'origine compte tenu des risques qu'il y encourt, ne suffit pas à établir que le requérant était en possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ; que, dès lors, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ est entachée d'une erreur de fait et méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 II 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 3 du présent arrêt, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ volontaire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
10. Considérant que M.D..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, n'établit pas la réalité des risques auxquels il serait actuellement personnellement exposé en cas de retour en République Démocratique du Congo ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de son renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et des décisions lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de son renvoi ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au Préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
''
''
''
''
3
N° 14LY03391