Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 19 août 2015, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 mai 2015 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile dans le délai de quarante-huit heures à compter de l'arrêt à intervenir, et de lui remettre le dossier de demande d'asile à transmettre à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sous le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et de lui délivrer une admission provisoire au séjour sous les mêmes conditions, et à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative dans le délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir, ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée à charge pour Me A... de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de remise aux autorités bulgares :
- elle est entachée d'erreur d'appréciation des faits, est insuffisamment motivée en droit et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 dit " Dublin III ", en l'absence d'interprète, de confidentialité de l'entretien, de remise des brochures préalablement à l'entretien dans une langue qu'il comprend ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 18 du règlement de (CE) n° 2725/2000, de l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2012 sur le système Eurodac pour la comparaison des empreintes et de l'article 9 du règlement n° 603/2013, la remise des brochures étant postérieure à la prise des empreintes ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013, les décisions de refus d'admission provisoire au séjour du 13 février 2015 et de réadmission du 8 avril 2015 ne lui ayant pas été transmises dans une langue qu'il est susceptible de comprendre ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et a été prise en violation du droit d'asile, eu égard aux défaillances systémiques existant en Bulgarie en matière d'accueil des réfugiés candidats à l'asile, sa demande d'asile ayant été rejetée en son absence ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus d'admission provisoire au séjour laquelle méconnaît les droits et garanties des demandeurs d'asile prévues aux articles 4 et 5 du règlement n° 604/2013 et à l'article 18 du règlement Eurodac, est insuffisamment motivée, n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation au regard des articles 17-1 et 17-2 du règlement n°604/2013, méconnaît le droit d'asile et les dispositions de l'article 17 du règlement n°604/2013 ;
En ce qui concerne la décision ordonnant son assignation à résidence :
- elle est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités bulgares ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle n'était pas nécessaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2017, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Le préfet fait valoir que le requérant n'exposant aucun moyen ou élément nouveau susceptible d'avoir une incidence sur la légalité des décisions litigieuses, il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
Par un mémoire, enregistré le 16 mars 2017, M. B... conclut aux mêmes fins que sa requête initiale, par les mêmes moyens.
Il soutient, en outre, que la décision litigieuse porte atteinte à son droit d'asile compte tenu des conditions d'accueil en Bulgarie, et notamment du risque manifeste de détention et d'expulsion à l'endroit des migrants afghans, les carences documentées par de nombreux rapports d'instances internationales au cours des derniers mois l'exposant à des traitements inhumains et dégradants.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la Convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951 et le protocole de New York du 31 janvier 1967 ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (CE) nº 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n° 604/2013 établissant les critères mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d'Eurodac présentées par les autorités répressives des Etats membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) n° 1077/2011 portant création d'une agence européenne pour la gestion opérationnelle d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (refonte) ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller ;
1. Considérant que M. B..., ressortissant afghan né le 16 janvier 1993 à Lagaman, est entré en France le 22 novembre 2014 selon ses déclarations et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que la consultation du fichier Eurodac a révélé que l'intéressé avait présenté une demande d'asile auprès des autorités bulgares le 3 octobre 2014 ; que, par une décision en date du 9 février 2015, les autorités bulgares ont accepté la reprise en charge de M. B... en application des dispositions de l'article 18 - 1 b) du règlement (CE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 ; que, par décision du 13 février 2015, le préfet du Rhône a refusé l'admission au séjour de l'intéressé au titre de l'asile sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puis, par un arrêté en date du 8 avril 2015, a ordonné sa remise aux autorités bulgares ; que, dans l'attente de l'exécution de cette mesure de transfert, le préfet du Rhône a assigné M. B... à résidence par un arrêté en date du 11 mai 2015 ; que, par jugement du 15 mai 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de ces deux décisions ; que, par la présente requête, M B... relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté de remise aux autorités bulgares :
2. Considérant en premier lieu que, pour les mêmes motifs que ceux retenus par le premier juge qu'il y a lieu pour le juge d'appel d'adopter, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée manque en fait, et doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas de la décision attaquée ni des pièces du dossier que le préfet du Rhône aurait omis de procéder à un examen réel et sérieux de la situation de M. B... ou aurait entaché sa décision d'erreur de fait ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. " ;
5. Considérant que les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé l'intéressé d'une garantie ; que la délivrance par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constituant pour le demandeur d'asile une garantie, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi du moyen tiré de l'omission ou de l'insuffisance d'une telle information à l'appui de conclusions dirigées contre un refus d'admission au séjour ou une décision de reprise, d'apprécier si l'intéressé a été, en l'espèce, privé de cette garantie ;
6. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'administration a satisfait à l'obligation qui lui incombe en application des dispositions précitées ;
7. Considérant que M. B... soutient que la procédure est vicié dès lors qu'il n'a pas bénéficié d'un interprète en langue pachtou lors de son entretien avec les services préfectoraux qui s'est déroulé en anglais, langue qu'il soutient ne pas maîtriser, ni lire, et qui n'aurait pas eu lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le résumé de son entretien individuel porte la mention selon laquelle il a été réalisé en anglais " langue comprise par M. B... " , circonstance confirmée par ses écritures de première instance et par son conseil à l'audience devant le tribunal administratif de Lyon ; que si M. B... soutient, que dans ces conditions, il n'a pas été en mesure de s'exprimer et de comprendre la procédure mise en oeuvre, il ne fait état au soutien de son moyen d'aucun élément qu'il aurait été privé de faire valoir utilement lors de cet entretien afin de déterminer l'Etat responsable de sa demande d'asile ; qu'il n'a d'ailleurs formulé aucune observation à la suite de la communication, en réponse à sa demande, du résumé de cet entretien individuel ; que, par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604/2013 doit être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...), contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " (...) 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur(...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la natures desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ; que, dans un premier temps, seul le préfet est en mesure d'apporter des éléments relatifs à la délivrance d'une information écrite au demandeur ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation signée par M. B... le 29 décembre 2014, que celui-ci s'est vu remettre, à cette date, conformément au 2. de l'article 4 du règlement n° 604/2013, les brochures d'information A et B ainsi que le guide du demandeur d'asile version 2013 en version pachtou et non en langue anglaise comme il le soutient sans l'établir de manière probante ; que dans la mesure où le formulaire de demande d'asile, rédigé en langue pachtou, remis préalablement à l'entretien, et qu'il a rempli l'invitait à donner toutes informations complémentaires permettant de déterminer l'Etat-membre responsable de sa demande d'asile, notamment quant à la présence éventuelle de membres de sa famille dans un autre Etat-membre, M. B...a ainsi été mis à même de faire valoir en temps utile, avant que n'intervienne la décision litigieuse, tout élément relatif à sa situation personnelle susceptible d'avoir une incidence sur la détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile, la circonstance, à la supposer établie, que les documents susmentionnés ne lui auraient été remis qu'à l'issue de l'entretien individuel, et non préalablement, n'est pas de nature à établir qu'il aurait été, en l'espèce, privé d'une garantie procédurale quant à son droit à l'information prévu à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 en méconnaissance de son droit d'asile ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 concernant la création du système " Eurodac ", en vigueur jusqu'au 20 juillet 2015 : " 1. Toute personne visée par le présent règlement est informée par l'État membre d'origine : a) de l'identité du responsable du traitement et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle les données vont être traitées par Eurodac ; c) des destinataires des données ; d) dans le cas des personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; e) de l'existence d'un droit d'accès aux données la concernant et d'un droit de rectification de ces données. / Dans le cas de personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, les informations visées au premier alinéa sont fournies au moment où les empreintes digitales sont relevées. / Dans le cas de personnes visées à l'article 11, les informations visées au premier alinéa sont fournies au plus tard au moment où les données concernant la personne sont transmises à l'unité centrale. Cette obligation ne s'applique pas lorsqu'il s'avère impossible de fournir ces informations ou que cela nécessite des efforts disproportionnés. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 susvisé : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'État membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend: a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) no 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les États membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; c) des destinataires des données ; d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées; e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1. " ; qu'aux termes de l'article 9 du règlement n° 603/2013 : " 1. Chaque Etat membre relève sans tarder l'empreinte digitale de tous les doigts de chaque demandeur d'une protection internationale âgé de quatorze ans au moins et la transmet au système central dès que possible et au plus tard soixante-douze heures suivant l'introduction de la demande de protection internationale telle que définie à l'article 20 paragraphe 2 du règlement (U) n° 604/2013, accompagnées des données visées à l'article 11 point b) à g) du présent règlement. " ;
11. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 que les informations relatives au relevé des empreintes digitales prévues par ces dispositions doivent être fournies lors du relevé de ces empreintes ou, en tout cas, comme pour les autres informations mentionnées par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile ;
12. Considérant que, si le requérant soutient ne pas avoir reçu les " informations Eurodac " en temps utile, il résulte de ce qui précède que les brochures susmentionnées qui comportent les informations requises relatives au relevé de ses empreintes digitales, lui ont été délivrées en langue pachtou lors du dépôt de sa demande d'asile ; qu'ayant accepté le relevé de ses empreintes digitales, la circonstance selon laquelle lesdites brochures ne lui ont été données que postérieurement audit relevé d'empreintes, n'est, en tout état de cause, pas susceptible d'avoir exercé, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou de l'avoir privé d'une garantie ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait méconnu l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;
13. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 26 du règlement n° 604/2013 : " 1. Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'État membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'État membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale. Si la personne concernée est représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les États membres peuvent choisir de notifier la décision à ce conseil juridique ou à cet autre conseiller plutôt qu'à la personne concernée et, le cas échéant, de communiquer la décision à la personne concernée. / 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. / Les États membres veillent à ce que des informations sur les personnes ou entités susceptibles de fournir une assistance juridique à la personne concernée soient communiquées à la personne concernée avec la décision visée au paragraphe 1, si ces informations ne lui ont pas encore été communiquées. / 3. Lorsque la personne concernée n'est pas assistée ou représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les États membres l'informent des principaux éléments de la décision, ce qui comprend toujours des informations sur les voies de recours disponibles et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours, dans une langue que la personne concernée comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend. " ;
14. Considérant que M. B... reprend en appel le moyen tiré de ce que la décision attaquée de remise aux autorités bulgares, rédigée en langue française, aurait méconnu les exigences prévues à l'article 26 du règlement n° 604/2013, moyen auquel il a été suffisamment répondu par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon ; que, par suite, pour les mêmes motifs que ceux retenus par ce dernier, qu'il y a lieu pour le juge d'appel d'adopter en l'absence d'élément nouveau, ce moyen doit être écarté ;
15. Considérant, en septième lieu, que le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 pose ainsi en principe au paragraphe 1 de son article 3 qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre ; que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre ; que, toutefois, selon le même règlement, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est écartée en cas de mise en oeuvre, soit de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre, soit de la clause humanitaire définie par le paragraphe 2 de ce même article 17 du règlement ; qu'aux termes de l'article 17 de ce même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit " ; que la mise en oeuvre par les autorités françaises de l'article 17 doit être assurée à la lumière des exigences définies par le second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, aux termes duquel : " les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
16. Considérant, d'une part, qu'au soutien de son moyen tiré de ce que l'arrêté décidant sa remise aux autorités bulgares porterait atteinte à son droit de solliciter le statut de réfugié, M. B... soutient qu'il existe des défaillances systémiques dans le traitement des demandes d'asile en Bulgarie et dans les conditions d'accueil des demandeurs d'asile du fait de l'afflux de réfugiés entrant irrégulièrement par la frontière turque, conduisant les autorités de ce pays à recourir à une procédure d'enfermement des demandeurs d'asile, qui sont par ailleurs victimes de discrimination, et donnant lieu à leur expulsion sommaire ; qu'il soutient qu'il a lui-même, lors de son passage dans cet Etat, été détenu en maison d'arrêt en raison de son entrée irrégulière, subi des mauvais traitements et que sa demande d'asile instruite en son absence est désormais définitivement rejetée ; que, toutefois, les documents produits à l'appui de ses dires, émanant notamment de diverses organisations dont le Haut commissariat aux réfugiés des Nations Unies prônant la suspension du transfert de réfugiés vers la Bulgarie en raison de conditions d'accueil inadéquates qui renvoient à la situation de ce Etat en 2013 et 2014, ne permettent pas de tenir pour établis les risques allégués de traitements inhumains et dégradants dans ce pays à l'endroit des demandeurs d'asile à la date de la décision attaquée, ni l'atteinte qui serait portée au droit d'asile et l'absence d'examen des demandes d'asile dans le respect des garanties exigées par les conventions internationales, alors que, comme l'a relevé le premier juge, la Bulgarie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en l'espèce aucun élément du dossier de laisse à penser que sa demande d'asile en Bulgarie ne serait pas instruite dans des conditions conformes aux garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que, par suite la décision de remise aux autorités bulgares de M. B... n'a pas porté atteinte au respect de son droit d'asile ;
17. Considérant, d'autre part, que, si l'impossibilité de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs a des conséquences sur les mécanismes de détermination de l'Etat responsable prévus par les dispositions susvisées de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, une telle impossibilité est sans influence sur l'appréciation à laquelle se livre l'autorité compétente en application de l'article 17 du même règlement ;
18. Considérant que la demande de M. B... ne relevant pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, de la responsabilité de la France, le préfet du Rhône, qui a procédé à l'examen de la situation de l'intéressé au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013, n'était pas tenu de d'expliciter les motifs pour lesquels il a décidé, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, de ne pas conserver l'examen de la demande d'asile de M. B..., sur le fondement de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ;
19. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas, au cas d'espèce, application de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions rappelées du point 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
20. Considérant, en huitième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres Etats ; (...) " ;
21. Considérant qu'il résulte de la lecture même de la décision attaquée du 13 février 2015 par laquelle le préfet du Rhône a refusé d'admettre provisoirement au séjour M. B... qu'elle mentionne les considérations de fait et de droit qui la fonde ; qu'elle est par suite suffisamment motivée ;
22. Considérant que le préfet du Rhône a procédé à un examen réel et sérieux de la situation de M. B... ; qu'il est constant que celui-ci a déposé une demande d'asile auprès des autorités bulgares avant d'entrer sur le territoire français ; que le relevé de ses empreintes a permis de déterminer la Bulgarie comme étant l'Etat responsable de sa demande d'asile en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile ; que, par suite, le préfet du Rhône a pu, pour ce motif, en application des dispositions précitées de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser de l'admettre provisoirement au séjour ; que, par suite, le préfet du Rhône a légalement pu refuser son admission provisoire au séjour le 13 février 2015, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision à l'égard de la décision de remise aux autorités bulgares devant, par conséquent, être écarté ;
23. Considérant, en dernier lieu, qu'en ce qui concerne les autres moyens soulevés en appel à l'encontre de la décision de remise aux autorités bulgares et du refus d'admission provisoire au séjour, la requête de M. B... se borne à reprendre l'énoncé des moyens déjà invoqués devant le premier juge ; que ces moyens ont été écartés à bon droit par le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 15 mai 2015 ; qu'il y a lieu, dès lors, par adoption des motifs du jugement attaqué, à l'encontre desquels le requérant ne formulent aucune critique utile, d'écarter ces autres moyens et de rejeter ses conclusions à fin d'annulation de cette décision ;
Sur la légalité de la décision d'assignation à résidence :
24. Considérant que M. B... se borne à reprendre dans sa requête d'appel les moyens invoqués devant le premier juge ; que ces moyens, dirigés contre la décision d'assignation à résidence, ont été écartés à bon droit par le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon en date du 15 mai 2015 ; que par suite, il y a lieu, pour le juge d'appel, par adoption des motifs du jugement de première instance, à l'encontre desquels le requérant ne formule aucune critique, d'écarter les moyens dirigés contre cette décision, et de rejeter ses conclusions à fin d'annulation ;
25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Terrade, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 avril 2017.
N° 15LY02870 2