Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2016, la Société Herbarom Laboratoire, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 juin 2016 ;
2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Herbarom Laboratoire soutient que :
- les salaires de M.C..., qui exerce ses fonctions en étroite collaboration avec les chercheurs de la société, fonctions qui sont indispensables à la mise au point et à la validation des travaux de recherche et de développement de l'entreprise, devaient être intégrés, conformément aux dispositions du II de l'article 244 quater B du code général des impôts et de l'article 49 septies G de l'annexe III du code général des impôts, tels qu'interprétés par la jurisprudence, dans les charges de l'entreprise éligibles au crédit d'impôt recherche ;
- l'administration a admis que de telles dépenses étaient éligibles au dispositif dans une décision de rescrit du 5 octobre 2010.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2016 le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Le ministre de l'économie et des finances soutient que les moyens soulevés par la société Herbarom Laboratoire ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 12 janvier 2018 la clôture d'instruction a été fixée au 6 février 2018, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeD..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. La société Herbarom Laboratoire, qui a pour activité la fabrication d'huiles essentielles, l'extraction végétale et l'utilisation de plantes et de leurs dérivés, notamment pour l'alimentation animale, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, à l'issue de laquelle elle a été assujettie, du fait de la remise en cause de dépenses incluses dans l'assiette du crédit d'impôt recherche, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2009, 2010 et 2011, notifiées selon la procédure de redressement contradictoire, assorties d'intérêts de retard. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et les pénalités correspondantes ont été mises en recouvrement le 8 octobre 2013. La société Herbarom Laboratoire relève appel du jugement du 9 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes.
2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectées à ces opérations (...) ". Aux termes de l'article 49 septies G de l'annexe III à ce code : " Le personnel de recherche comprend : / 1. Les chercheurs qui sont les scientifiques ou les ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs les salariés qui, sans posséder un diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise. / 2. Les techniciens, qui sont les personnels travaillant en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental. Notamment : / Ils préparent les substances, les matériaux et les appareils pour la réalisation d'expériences ; / Ils prêtent leur concours aux chercheurs pendant le déroulement des expériences ou les effectuent sous le contrôle de ceux-ci ; / Ils ont la charge de l'entretien et du fonctionnement des appareils et des équipements nécessaires à la recherche et au développement expérimental. (...) / Dans le cas des entreprises qui ne disposent pas d'un département de recherche, les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt sont exclusivement les rémunérations versées aux chercheurs et techniciens à l'occasion d'opérations de recherche ". Pour l'application de ces dispositions, ouvrent droit au crédit d'impôt les dépenses de personnel afférentes notamment aux salariés qui, sans posséder un diplôme d'ingénieur, se livrent à des opérations de recherche et ont acquis, au sein de leur entreprise, des compétences les assimilant, par le niveau et la nature de leurs activités, aux ingénieurs impliqués dans la recherche.
3. La Société Herbarom Laboratoire, qui a procédé, au titre des années 2009, 2010 et 2011, à différents projets de recherche, a bénéficié de crédits d'impôt à hauteur de 89 220 euros en 2009, 103 374 euros en 2010 et 63 499 euros en 2011. L'administration fiscale a remis en cause la prise en compte, pour le calcul de ces crédits d'impôt, de la rémunération de deux salariés dont M. C.... Elle a estimé que ce dernier n'avait pas la qualité de chercheur ou de technicien de recherche et ne disposait pas de diplômes requis dans le domaine scientifique. Elle a en outre précisé qu'il n'était pas directement et exclusivement affecté aux opérations de recherche et n'avait pas acquis au sein de l'entreprise des compétences l'assimilant, par le niveau et la nature des activités, aux ingénieurs impliqués dans les travaux de recherche.
4. Il résulte de l'instruction que M. C... a été embauché par la société Herbarom Laboratoires à compter du 6 février 2008 en qualité de technico-commercial avec pour missions, selon les termes de son contrat de travail, d'assurer le suivi régulier des projets, le démarchage d'une nouvelle clientèle, le développement de l'activité de distribution de compléments alimentaires et autres produits à destination des animaux et la remontée des problématiques de terrain. La société Herbarom Laboratoire soutient que M. C... a participé au programme de recherche de la société portant sur l'utilisation des plantes, extraits végétaux et huiles essentielles dans le but d'améliorer le bien-être, la sécurité sanitaire et les performances zootechniques des animaux d'élevage, en procédant, dans un premier temps, à l'identification des problématiques terrains afin d'orienter les projets de recherche et de développement, puis, dans un second temps, en participant activement aux projets de recherche et développement en mettant en place les essais terrain et en assurant leur suivi pour cinq programmes différents de recherche au titre de chacune des années 2010 et 2011. Toutefois ni le contrat de travail de l'intéressé, ni les copies des feuilles de temps d'affectation de M. C... aux projets de recherche et développement, ni les copies de plaquettes de présentation des projets au titre des années 2010 et 2011 ne permettent d'établir que M. C... a développé des compétences dans le domaine de la recherche et du développement et qu'il a participé de manière effective aux activités de recherche et développement de la société, soit directement, soit sous la forme d'une étroite collaboration avec les chercheurs pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche. Si la société requérante a produit pour la première fois en appel les copies des six protocoles d'étude conclus entre elle et différentes sociétés d'élevage relatifs à la mise en place d'essais terrains, quatre d'entre eux, non datés, ne précisent pas l'année de réalisation de l'essai et l'un d'eux précise que l'essai a été réalisé au cours de l'année 2011 alors que le projet de recherche en cause a bénéficié du crédit d'impôt au titre de l'année 2010. Le seul protocole d'étude daté, signé, et qui concerne un projet qui est entré dans le champ du crédit d'impôt recherche, à savoir le protocole d'étude conclu entre la société requérante et la société Val d'Eurre en date du 22 juin 2010 portant sur la lutte et prévention contre les poux sur un élevage de poules, qui prévoit un essai de trois semaines à compter de sa signature, indique que M. C... est responsable du projet et précise qu'il " apporte son soutien " à l'éleveur qui assure lui-même le suivi technique de l'essai. Toutefois, ce protocole ne permet pas, à lui seul, d'établir que M. C... a directement participé à des activités de recherche ou assuré un soutien technique indispensable aux travaux de recherche au sens de l'article 49 septies G précité. Par suite, il résulte de tout ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration a exclu les salaires de M. C... des bases à prendre en compte pour le calcul du crédit d'impôt recherche.
5. La société Herbarom Laboratoire n'est pas fondée à se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales du rescrit n° 2010-59 du 5 octobre 2010 qui ne comporte pas d'interprétation des dispositions législatives précitées différente de celle dont il est fait application.
6. Il résulte de ce qui précède que la société Herbarom Laboratoire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société Herbarom Laboratoire la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Herbarom Laboratoire est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Herbarom Laboratoire et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 2 mai 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Menasseyre, présidente-assesseure,
MmeB..., première conseillère,
MmeD..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 22 mai 2018.
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N° 16LY02629
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