Par un jugement n° 1901928 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. B....
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2020, M. B..., représenté par Me Bourg, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 juin 2020 ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Puy-de-Dôme de lui délivrer la carte de séjour temporaire portant mention "vie privée et familiale" sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa demande d'admission au séjour pour des raisons médicales et de lui remettre un récépissé le temps de l'instruction de sa demande dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui sera versée à Me Bourg sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée vis-à-vis de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il n'établissait pas l'absence d'accès effectif dans son pays d'origine à la prise en charge médicale requise par son état de santé ; il est isolé et sans aucun revenu dans son pays d'origine ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle dont le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux ;
- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2020, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête de M. B....
Il soutient que les moyens sont infondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né en 1979, de nationalité tunisienne, est entré régulièrement sur le territoire français le 13 mai 2017 sous-couvert d'un visa de court séjour. Par un arrêté du 6 juin 2019, la préfète du Puy-de-Dôme a rejeté la demande de titre de séjour que M. B... avait formée en qualité d'étranger malade le 4 mai 2018 et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. B... relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
3. Par un avis du 11 avril 2019, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il pourra bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Après avoir rappelé les termes de cet avis, la préfète du Puy-de-Dôme s'est bornée à indiquer que " par conséquent M. B... ne remplit pas les conditions d'octroi du titre de séjour mentionné à l'article L. 313-11 11° du code précité ". Dès lors, ainsi que le soutient le requérant pour la première fois en appel, il ressort des termes mêmes de la décision contestée que la préfète du Puy-de-Dôme s'est estimé liée par l'avis du collège de médecins de l'OFII et a méconnu l'étendue de son pouvoir d'appréciation. La décision du préfète du Puy-de-Dôme refusant de lui délivrer un titre de séjour doit dès lors être annulée ainsi, par voie de conséquence, que l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et la décision fixant le pays de destination.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
6. Il résulte de ce qui précède que le motif d'annulation de l'arrêté en litige implique nécessairement, mais seulement, que le préfet du Puy-de-Dôme réexamine la demande de M. B... et que, dans l'attente, il lui délivre une autorisation provisoire de séjour, et non qu'il lui délivre le titre de séjour sollicité. Dans ces conditions il y a lieu de prescrire au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la demande de titre de séjour de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans les meilleurs délais.
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
7. M. B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocat, Me Bourg, peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros qui seront versés à Me Bourg.
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté du 6 juin 2019 de la préfète du Puy-de-Dôme et le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 juin 2020 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la demande de titre de séjour de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à Me Bourg, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 200 euros.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Bourg.
Copie en sera délivrée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.
No 20LY030502