Procédure devant la cour
Par une requête présentée par MeC..., enregistrée le 17 juillet 2017 et des mémoires enregistrés le 14 février 2018, le 30 mars 2018, la commune d'Annemasse, représentée par son maire en exercice par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2017 ;
2°) de déclarer qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. B... ;
3°) subsidiairement de rejeter la demande de M. B... ;
4°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
il est entaché d'omission à statuer car il ne s'est pas prononcé sur les conclusions de la commune tendant au non lieu à statuer en raison de la mutation de M. B... ;
il est entaché d'une insuffisance de motivation.
Sur le bien-fondé du jugement :
il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande de M. B...dès lors que la sanction a été effacée automatiquement du dossier au bout de trois ans en application de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 ;
la sanction d'avertissement ne fait grief que si elle produit des effets sur le déroulement de la carrière de l'intéressé et M. B... a été muté à la commune de Passy avant même l'introduction de la requête. Il n'existe plus de lien juridique entre elle et M. B... qui n'avait donc pas intérêt à agir contre cette décision ;
la décision contestée était suffisamment motivée. Elle faisait en outre référence à un courrier du 30 mai 2014 qui visait l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2017 et des mémoires enregistrés le 26 mars 2018 et 28 juin 2018 M. B... représenté par Me E...conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune d'Annemasse la somme de 2 000 euros.
Il soutient que :
le jugement n'est pas entaché d'omission à statuer ;
il est suffisamment motivé ;
la décision attaquée du 12 août 2014 est insuffisamment motivée ;
la matérialité des faits reprochés n'a pas été démontrée ;
il a été sanctionné en raison de son appartenance syndicale.
Par ordonnance du 3 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,
les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
et les observations de MeD..., représentant la commune d'Annemasse ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 12 août 2014, le maire de la commune d'Annemasse a infligé à M. A... B..., policier municipal de cette commune , la sanction de l'avertissement prévue par l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984. A la demande de M. B..., cette décision a été annulée par le tribunal administratif de Grenoble par un jugement du 30 mai 2017 dont la commune d'Annemasse relève appel.
Sur la régularité du jugement :
2. En première instance, par un mémoire du 15 mai 2015, la commune d'Annemasse a conclu, à titre principal, au non lieu à statuer sur la demande de M. B... au motif qu'il avait quitté les effectifs de la commune. Il est constant que le magistrat délégué du tribunal administratif de Grenoble a omis de statuer sur ces conclusions. Il s'ensuit que le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé.
3. Il y a lieu pour la cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par M. B....
Sur les conclusions à fin de non lieu présentées par la commune d'Annemasse :
4. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; (...) Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. ".
5. Il est constant que la sanction dont a fait l'objet M. B...n'a pas été retirée. Ni la circonstance que ce dernier a été muté dans une autre commune à compter du 1er décembre 2014, ni celle que la sanction de l'avertissement n'est pas inscrite au dossier de ce fonctionnaire, ne sont susceptibles d'avoir provoqué la disparition rétroactive de cette décision de l'ordre juridique. La commune d'Annemasse n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la demande de M. B...devrait faire l'objet d'un non lieu à statuer.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
6. En vertu des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, les décisions prises par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er de cette loi doivent comporter, la signature de cette autorité, ainsi que la mention, en caractères lisibles, de ses nom, prénom et qualité.
7. Si M. B...soutient que la décision du 12 août 2014 ne mentionne pas, en méconnaissance de cet article, le nom et le prénom du maire de la commune d'Annemasse, il ressort de celle-ci qu'elle comporte la mention de sa qualité et sa signature. En l'espèce, il n'en résultait pour M. B... aucune ambiguïté quant à l'identité du signataire de cet acte.
8. La loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 dispose à son article 1er : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - infligent une sanction ; (...) " et à son article 3 " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que si la décision attaquée énonce les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde, elle ne comporte par elle-même la mention d'aucun fondements textuels et juridiques. Toutefois cette décision fait référence à un courrier du 30 mai 2014, que M. B... ne conteste pas avoir reçu, par lequel le maire de la commune l'informait de son intention d'engager à son encontre une procédure disciplinaire sur le fondement des dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 en vue de lui infliger une sanction du premier groupe. Dans les circonstances de l'espèce, les informations ainsi portées à la connaissance de M.B..., qui lui ont permis de contester utilement la décision qu'il attaque, doivent être regardées comme suffisantes au regard de l'exigence de motivation prescrite par les dispositions sus rappelées de la loi du 11 juillet 1979.
10. Il ressort des pièces du dossier que le 19 mars 2014, le chef de la police municipale a confié au chef d'équipe une mission d'escorte d'un convoi exceptionnel qui devait traverser le territoire de la commune avec la collaboration de trois autres agents dont M. B... qui était alors en service. Ce dernier a refusé d'accomplir cette mission au motif qu'il s'agissait d'une mission de police nationale.
11. A supposer même que la mission qu'il lui avait été demandé d'exécuter ne relevait pas des compétences de la police municipale, l'ordre ainsi donné n'était ni manifestement illégal, ni de nature à compromettre gravement un intérêt public. Si M. B... soutient encore qu'il était en grève, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir la réalité de cette circonstance. Il s'ensuit que ce refus d'obéissance à une instruction qui lui a été donnée par sa hiérarchie, qui est suffisamment établi par les pièces du dossier, était de nature à justifier une sanction disciplinaire.
12. Aucune pièce du dossier ne permet, enfin, d'établir que M. B... a été sanctionné à raison de son appartenance syndicale ou qu'il a fait l'objet d'une mesure discriminatoire.
13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa demande, M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 12 août 2014 par laquelle le maire de la commune d'Annemasse lui a infligé la sanction d'avertissement.
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
14. Les dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mis à charge de la commune d'Annemasse, qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de M. B... en ce sens doivent être rejetées.
15..Il n'y a pas lieu, par ailleurs dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par la commune d'Annemasse au titre de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1500441 du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2017 est annulé.
Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Annemasse, et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 1er avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
Mme Virginie Chevalier-Aubert, présidente assesseure,
M. Pierre Thierry premier conseiller,
Lu en audience publique, le 2 mai 2019.
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N° 17LY02741