Procédure devant la Cour
Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2016, Mme A...B..., représentée par Me Farre-Malaval, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1507389 du 29 avril 2016 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 juin 2015 par lequel le préfet de la Loire a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Loire de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
s'agissant du refus de renouvellement de titre de séjour,
- il est entaché d'erreur de droit en ce que le préfet n'a pas statué sur sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'erreur d'appréciation au regard des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code, dès lors qu'elle justifie avoir été victime de violences conjugales et de traite à fin d'exploitation domestique depuis son arrivée en France ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de la décision fixant le pays de renvoi, elles sont illégales du fait de l'illégalité du refus de renouvellement de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2016, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juin 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Drouet, président assesseur ;
1. Considérant que Mme B..., ressortissante marocaine née le 6 septembre 1986, a bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de conjointe d'un ressortissant français valable du 30 novembre 2010 au 29 novembre 2011 ; que, par une demande présentée le 7 décembre 2011 et confirmée le 16 mai 2012, elle a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour ; que, par arrêté du 5 juin 2012, le préfet de la Loire a rejeté cette demande et l'a obligée à quitter le territoire français ; que, par jugement n° 1206140 du 4 décembre 2012 devenu définitif, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté au motif que le préfet n'avait pas examiné si l'intéressée, ainsi qu'elle l'avait demandé, pouvait prétendre au renouvellement de son titre de séjour en application des dispositions combinées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code et a enjoint au préfet de la Loire de réexaminer la situation de Mme B... ; qu'en exécution de ce jugement, le préfet de la Loire a, par arrêté du 15 juin 2015, rejeté la demande de Mme B... de renouvellement de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " qui lui avait été délivrée en qualité de conjoint d'un ressortissant français, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ; que Mme B... relève appel du jugement n° 1507389 du 29 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigé contre cet arrêté préfectoral du 15 juin 2015 ;
Sur le refus de renouvellement de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la demande de Mme B... présentée le 7 décembre 2011 et confirmée le 16 mai 2012 n'était pas fondée sur le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en s'abstenant d'examiner si elle pouvait bénéficier d'un titre sur ce fondement par sa décision en litige du 15 juin 2015 statuant sur ladite demande ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale". " ;
4. Considérant que si ces dispositions ne créent aucun droit au renouvellement du titre de séjour d'un étranger dont la communauté de vie avec son conjoint de nationalité française a été rompue en raison des violences conjugales qu'elle a subies de la part de ce dernier, de telles violences, subies pendant la vie commune, ouvrent la faculté d'obtenir, sur le fondement de cet article, un titre de séjour, sans que cette possibilité soit limitée au premier renouvellement d'un tel titre ; qu'il incombe à l'autorité préfectorale, saisie d'une telle demande, d'apprécier, sous l'entier contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'intéressé justifie le renouvellement du titre à la date où il se prononce, en tenant compte, notamment, du délai qui s'est écoulé depuis la cessation de la vie commune et des conséquences qui peuvent encore résulter, à cette date, des violences subies ;
5. Considérant qu'il est constant que la communauté de vie entre Mme B... et son mari, ressortissant français, a cessé au mois de mars 2009 et que le divorce entre les époux a été prononcé le 16 septembre 2014 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée du 15 juin 2015, alors que plus de six ans s'étaient écoulés depuis la rupture de la vie conjugale, des conséquences aient résulté des violences psychologiques subies par l'intéressée durant cette communauté de vie ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant, par sa décision en litige, de renouveler le titre de séjour de la requérante ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et sur la décision fixant le pays de renvoi :
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que Mme B... n'est pas fondée à exciper, à l'encontre des décisions en litige, de l'illégalité du refus de renouvellement de titre de séjour ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et de mise à mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à Me Farre-Malaval et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 13 février 2018, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Hervé Drouet, président assesseur,
M. Marc Clément, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 avril 2018.
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N° 16LY02730
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