Par un jugement n° 1503368 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 31 mai 2017, Mme B..., représentée par Me Lukec, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 30 mars 2017 et la décision du maire de la commune de Sussey du 29 octobre 2015 ;
2°) de condamner la commune à lui verser une indemnité de 3 584 euros au titre du préjudice subi du fait de son licenciement illégal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant du moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige ;
- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la décision en litige était entachée d'erreur de fait ;
- c'est à tort, au regard des termes de l'article 42 du décret n° 88-245 du 15 février 1988, qui exige que la lettre de convocation à l'entretien préalable au prononcé d'une sanction disciplinaire expose les faits reprochés à l'agent, que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que la procédure suivie avait été irrégulière ;
- c'est à tort qu'ils ont écarté le moyen tiré de ce qu'en refusant la présence de son époux et en la recevant seule à l'entretien préalable alors qu'elle souhaitait être accompagnée, la commune a entaché la décision en litige d'un vice de procédure ;
- au regard du délai dans lequel a été prise la décision en litige, les faits qui lui sont reprochés, dont la commune a eu connaissance avant l'été 2015, ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; la décision est, ainsi, entachée d'erreur d'appréciation ;
- certains des faits qui lui sont reprochés sont imputables au chauffeur du bus, lequel n'a pourtant fait l'objet d'aucune sanction ;
- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas de nature à justifier son licenciement ;
- son licenciement procède d'un détournement de pouvoir ;
- elle est fondée à demander une indemnité correspondant à la rémunération dont elle a été privée pendant dix mois à compter de son éviction illégale et jusqu'au terme de son contrat.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2018, la commune de Sussey, représentée par Me Langlois (SCP CAPA), avocat, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l'indemnité réclamée par Mme B... et, en toute hypothèse, à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les conclusions indemnitaires présentées par la requérante sont irrecevables ou, subsidiairement, infondées ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,
- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
1. Considérant que la commune de Sussey a, par contrat à durée déterminée de trois ans prenant effet le 3 septembre 2013, recruté Mme B...en qualité d'accompagnatrice de car de ramassage scolaire ; que le maire de la commune de Sussey a prononcé son licenciement pour faute à compter du 4 novembre 2015 par décision du 29 octobre 2015 ; que Mme B...relève appel du jugement du 30 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de cette décision et d'indemnisation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de son éviction illégale ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant, en premier lieu, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus à répondre à tous les arguments soulevés par MmeB..., en indiquant que " la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement " et que " contrairement à ce que soutient la requérante, les faits reprochés sont précis et, pour certains d'entre eux, datés ", suffisamment motivé leur jugement pour écarter le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant sanction disciplinaire ;
3. Considérant, en second lieu, que les premiers juges ont, contrairement à ce qu'allègue la requérante, examiné l'ensemble des griefs ayant fondé la décision de licenciement, ont considéré qu'ils étaient établis et que, sauf pour l'un d'eux, ils étaient constitutifs de fautes de nature à justifier la décision en litige ; qu'ainsi, Mme B...n'est pas fondée à soutenir qu'ils auraient omis de répondre au moyen tiré de ce que certains des faits qui lui sont reprochés étaient inexacts ou retirés de leur contexte ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité de la décision du 29 octobre 2015 :
S'agissant de la légalité externe :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 42 du décret susvisé du 15 février 1988, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La décision de licenciement est notifiée à l'intéressé par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis. " ;
5. Considérant que, si les dispositions précitées exigent que la décision par laquelle l'autorité administrative prononce un licenciement soit motivée, il ne ressort d'aucun texte législatif ou réglementaire ni d'aucun principe qu'elle devrait exposer les faits reprochés à l'agent dans la lettre de convocation à un entretien préalable au prononcé d'une sanction disciplinaire ; que le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'un vice de procédure pour ce motif doit ainsi être écarté ;
6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 37 du décret du 15 février 1988 susvisé : " (...) L'agent non titulaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. (...) " ;
7. Considérant que le moyen tiré de l'impossibilité d'être assistée d'une personne de son choix lors de l'entretien préalable doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, qui ne sont pas pertinemment contestés par la requérante ;
S'agissant de la légalité interne :
8. Considérant que, pour prononcer le licenciement de MmeB..., le maire de la commune de Sussey a retenu que cette dernière avait, le 23 septembre 2014, conduit le car de ramassage scolaire sans être titulaire du permis de conduire adéquat, qu'à deux reprises, le bus s'était arrêté sur la chaussée pour des raisons qui lui étaient personnelles durant le ramassage scolaire, qu'elle ne respectait pas les consignes de sécurité et d'ordre dans le bus, qu'elle avait pris son travail sur le trajet du car scolaire et non au point de départ du circuit et qu'elle n'avait pas respecté l'interdiction de distribuer des bonbons dans le car scolaire ;
9. Considérant, en premier lieu, que MmeB..., en se bornant à affirmer, sans plus de précision, que les griefs retenus à son encontre sont " faux, injustifiés et détournés de leur contexte ", n'en conteste pas utilement la réalité ; qu'il ressort des différents témoignages produits à l'instance aussi bien par la commune que par Mme B...que la matérialité des faits sur lesquels s'est fondé le maire de la commune pour procéder à son licenciement est établie ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que la commune a, dès le 4 janvier 2015, rappelé à Mme B...qu'elle devait respecter ses horaires de travail et les lieux de montée et de descente du bus ; qu'il n'est pas utilement contesté que les autres faits, et notamment la conduite du bus sans permis, le non-respect des règles de sécurité, certains des enfants n'étant pas attachés et se déplaçant librement dans le bus, n'ont été portés à la connaissance de la commune que les 31 août et 15 septembre 2015, lorsque le maire a été interpellé par deux administrés ; que ces faits, qui portent atteinte à la sécurité des enfants transportés, contreviennent aux consignes données par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, perturbent le bon fonctionnement du service de ramassage ou, s'agissant de la conduite sans le permis D adéquat du bus scolaire, constituent une infraction pénale, sont d'une gravité suffisante pour justifier, sans erreur d'appréciation, la sanction de licenciement prise à l'encontre de MmeB... ;
11. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que certains des faits retenus contre la requérante relèveraient également de la responsabilité du chauffeur du bus est sans incidence sur la légalité de la décision en litige, dès lors qu'il appartenait à Mme B...de veiller au respect des règles afférentes à ses fonctions et des consignes de son employeur ;
12. Considérant, en quatrième lieu, que le détournement de pouvoir allégué, tiré de ce que la décision aurait été prise " du fait de son amitié avec son collègue le chauffeur ", n'est pas établi ;
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
13. Considérant que son licenciement n'étant, comme il a été dit ci-dessus, pas entaché d'illégalité, Mme B...n'est pas fondée à demander l'indemnisation des préjudices qui en auraient résulté ; que ses conclusions indemnitaires doivent, par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Sussey, être rejetées ;
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie à l'instance, la somme que demande Mme B...au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement d'une somme de 800 euros en application de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera une somme de 800 euros à la commune de Sussey en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la commune de Sussey.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.
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N° 17LY02188