2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Par un jugement n° 1504792 du 2 juin 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2015, M.A..., représenté par Me Hassid, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 2 juin 2015 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet de l'Isère du 27 mai 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 700 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il a été omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet en édictant une décision portant interdiction du territoire français ;
- l'obligation de quitter le territoire français et le refus de lui accorder un délai de départ volontaire méconnaissent son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procèdent d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- le premier juge a méconnu les d) et f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que le fait qu'il n'ait pas déclaré son changement d'adresse démontrerait sa volonté de se soustraire à la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet ;
- contrairement à ce qui a été jugé en première instance, il dispose d'un hébergement stable ;
- il justifie de circonstances particulières justifiant qu'un délai de départ volontaire lui soit accordé ;
- la désignation du pays de renvoi est insuffisamment motivée en droit en ce qu'elle ne vise pas les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les dispositions de l'article L. 511-1 de ce code n'en constituent pas la base légale ; elle est insuffisamment motivée en fait au regard de l'absence de mention des menaces encourues au titre de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est illégale en ce qu'elle est fondée sur une obligation de quitter le territoire français illégale ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;
- l'arrêté prononçant son placement en rétention administrative méconnaît l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il est dépourvu de nécessité eu égard aux garanties de représentation dont il dispose.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Peuvrel a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien né le 10 mai 1988, est entré en France en 2007 ; qu'il y a résidé sous couvert d'un titre de séjour portant la mention "étudiant", renouvelé jusqu'en 2010 ; que sa demande de changement de statut en vue d'obtenir le bénéfice d'un titre de séjour en qualité de commerçant sur le fondement du 2° de l'article L. 313-10, présentée en août 2010, a été rejetée par un arrêté du préfet de l'Isère du 8 février 2013 obligeant M. A...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il serait admissible ; que M. A... a, le 27 mai 2015, fait l'objet d'un arrêté du préfet de l'Isère l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, désignant un pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée minimale d'un an et d'un arrêté du même jour le plaçant en rétention administrative ; que M. A...relève appel du jugement du 2 juin 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a examiné les éléments dont se prévalait le requérant pour écarter le moyen tiré de ce que l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an prononcée par le préfet de l'Isère ne méconnaissait pas les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des termes de la demande que le requérant ait invoqué d'autres circonstances à l'appui du moyen tiré de ce que cette interdiction procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, dans ces conditions, et alors que le juge exerce un contrôle normal sur la légalité des décisions d'interdiction de retour sur le territoire français, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait partiellement irrégulier faute pour le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon d'avoir examiné le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur le bien fondé de la requête :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant que la promesse d'embauche du 21 mai 2015 en qualité d'agent de service et les attestations supplémentaires dont se prévaut M. A...devant la cour ne démontrent pas, comme en a jugé à bon droit le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que le préfet de l'Isère aurait, en obligeant M. A...à quitter le territoire français, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté en litige : " Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...). " ;
5. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'allègue M.A..., il ne ressort pas des termes du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon aurait déduit du fait qu'il n'avait pas, en 2013, déclaré son changement d'adresse l'existence d'une volonté de sa part de se soustraire à la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet ; que, par ailleurs, si M. A...réside en France depuis huit ans et produit plusieurs attestations en sa faveur, il ressort des pièces du dossier qu'il dispose d'un passeport périmé depuis 2011, qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 8 février 2013, qu'il a, lors de son interpellation, déclaré une fausse identité et qu'il ne dispose pas d'une adresse stable ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'au regard des circonstances particulières dont il justifierait, le préfet de l'Isère aurait fait une inexacte application des dispositions précitées en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;
6. Considérant, en second lieu, que M. A...n'établit pas que le refus du préfet de l'Isère de lui accorder un délai de départ volontaire porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard aux objectifs poursuivis par ce refus, ou qu'elle procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne le pays de renvoi :
7. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, les décisions désignant le pays à destination duquel un étranger peut être éloigné d'office ne trouvent pas leur fondement légal dans les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne s'attachent qu'aux modalités d'exécution de la mesure d'éloignement ; qu'ainsi, la circonstance que l'arrêté contesté, en ce qu'il fixe le pays de renvoi, ne vise pas l'article L. 513-2 n'est pas de nature à entacher sa motivation d'irrégularité ; qu'il doit par ailleurs être regardé comme suffisamment motivé en fait s'agissant des menaces que le requérant encourrait en Tunisie par l'indication que l'intéressé n'établit pas que sa vie ou sa liberté seraient menacées et qu'il ne rapporte pas être exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant, en second lieu, que M.A..., n'ayant pas démontré l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'arrêté contesté en tant qu'il désigne le pays de renvoi ;
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
9. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) " ;
10. Considérant que, si M. A...réside en France depuis huit ans, dont six en situation régulière, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et ses frères et soeurs ; qu'il ne produit aucune pièce probante de nature à établir la relation qu'il entretiendrait avec une ressortissante française ; qu'en outre, il a déjà fait l'objet le 8 février 2013 d'une mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée, se maintenant depuis en situation irrégulière en France ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir, qu'en lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant la durée minimale d'une année, le préfet aurait fait une inexacte application des dispositions précitées ;
En ce qui concerne le placement en rétention administrative :
11. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, d'écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté du préfet de l'Isère prononçant le placement de M. A...en rétention administrative méconnaît l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait dépourvu de nécessité eu égard aux garanties de représentation dont il disposerait ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande, ni par suite, à demander l'annulation de ce jugement ;
Sur les conclusions aux fin d'injonction :
13. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. A...tendant à l'annulation des arrêtés contestés du 27 mai 2015, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au requérant de la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Drouet, président de la formation de jugement,
- Mme Peuvrel, premier conseiller,
- M. Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2016.
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N° 15LY02235
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