Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 octobre 2014 et 4 septembre 2015, M. J... et autres, représentés par MeH..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 8 juillet 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 23 juillet 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils sont exposés à des risques de nuisances se rattachant aux intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 du code de l'environnement ; l'ensemble des administrés domiciliés sur les communes situées dans le rayon de trois kilomètres du site d'exploitation et où la publicité de l'enquête publique est obligatoire sont susceptibles d'être concernés par les nuisances liées au projet ; étant domiciliés dans ce rayon de trois kilomètres, ils justifient d'un intérêt pour agir contre l'arrêté en litige ; en outre, l'exploitation de la carrière va engendrer un flux supplémentaire de poids lourds sur les voies d'accès au site qui desservent également la commune de Darois, ce qui créera des dangers et des inconvénients pour eux, en termes de sécurité publique ; ils justifient également être exposés à des risques de nuisances liées aux bruits, aux poussières, aux vibrations du sol
- l'étude d'impact est incomplète au regard de la ressource en eau, aucune coloration actualisée n'a été réalisée ; il en est de même pour la circulation des eaux souterraines ;
- cette étude est insuffisante au regard de l'analyse des nuisances sonores, poussières et vibrations sur l'environnement et sur la population ; l'affirmation selon laquelle l'habitation la plus proche des limites de propriété de la carrière est à mille mètres est erronée ; un lotissement complet situé à huit cent vingt mètres du projet a été omis ; toutes les analyses réalisées à une distance de mille mètres sont fausses ;
- l'analyse de l'impact des vents dominants est erronée alors que près de 40 % des vents sont de nature à transporter des poussières sur des zones d'habitat ;
- l'étude d'impact ne prend pas en compte le pôle aéronautique de Darois ;
- cette étude omet de prendre en compte l'impact du projet sur la maison de retraite "Les jardins d'Osiris", située à un kilomètre du projet ;
- le projet contesté est totalement incompatible avec l'existence d'un pôle aéronautique avoisinant ; l'arrêté en litige ne prévoit aucune mesure d'auto surveillance
- ce projet est également incompatible avec l'emprise de la ligne ferroviaire à grande vitesse "Rhin-Rhône" ;
- il est aussi incompatible avec l'existence à environ huit cents mètres de maisons d'habitation occupées et de terrains constructibles situés sur la commune de Darois ;
- contrairement à ce que soutient le pétitionnaire, la production de granulats est excédentaire en Côte-d'Or ; de ce fait, le projet est contraire au schéma départemental des carrières ;
- le commissaire enquêteur a rendu un avis défavorable au vu du problème de la compatibilité du projet avec le pôle aéronautique de Darois ; le conseil général a rendu finalement un avis réservé pour ce même motif ; la direction générale de l'aviation civile a également rendu un avis défavorable ;
- l'absence de certitude sur les risques soit de pollution ou en matière de santé justifie l'annulation de l'arrêté en litige par application du principe de précaution.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2015, la Sarl Pennequin, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- en l'état de la jurisprudence, un requérant résidant à plus de un kilomètre et demi d'une installation classée ne dispose pas d'un intérêt à agir à l'encontre d'un arrêté préfectoral autorisant son exploitation s'il ne démontre pas qu'il subit des inconvénients et dangers résultant de l'exploitation de cette installation ; de plus, l'obligation légale d'affichage dans un périmètre de trois kilomètres est sans incidence sur les inconvénients et dangers potentiels que subiraient les riverains de l'installation et qui caractériseraient l'intérêt à agir de ces derniers ; il n'est pas établi que le site d'exploitation serait visible depuis le lieu de résidence des requérants ; il n'est pas plus démontré que l'installation en litige comporterait des risques d'atteinte à la sécurité ou à la santé publiques ; les requérants ne justifient d'aucun intérêt à agir ;
- l'étude d'impact analyse avec suffisamment de détail la ressource en eau ; les requérants ne sauraient sérieusement affirmer que l'étude d'impact serait totalement faussée en raison de la présence, à vol d'oiseau, des premières habitations, à environ neuf cent cinquante mètres plutôt qu'à environ mille mètres ; enfin, l'établissement "Les jardins d'Osiris", situé à mille trois cent cinquante deux mètres de la carrière n'est pas susceptible de subir de gêne du fait de l'exploitation de cette installation ; s'agissant du pôle aéronautique, un rapport d'expertise conclut à l'absence d'impact sur son activité ; le centre d'études techniques de Lyon, l'inspection des installations classées et la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ont rendu des avis favorables sur le dossier ;
- les études et expertises réalisées démontrent la compatibilité de l'exploitation de la carrière avec l'activité de l'aérodrome et l'absence de risques supplémentaires à la circulation aérienne ;
- s'agissant de la compatibilité avec l'emprise de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône, à la suite des observations de réseau ferré de France, la surface de la carrière a été réduite ; elle se situe hors du trajet de la ligne ;
- le projet se situant sur le territoire de la commune de Prenois, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec le plan d'occupation des sols de la commune de Darois est inopérant ;
- la seule circonstance que le schéma départemental des carrières de Côte-d'Or révèle que 40 % de la production de granulats serait exportée en dehors du département n'est pas de nature à établir l'incompatibilité du projet avec ce schéma ; en tout état de cause, l'étude économique du projet démontre l'utilité d'une nouvelle carrière en Côte-d'Or ;
- l'avis négatif du commissaire-enquêteur n'a aucune incidence sur la légalité de l'autorisation préfectorale ;
- il n'existe aucun danger de pollution, ni aucun danger pour la sécurité ou la continuité de l'activité de l'aérodrome de Darois du fait de l'exploitation de la carrière Pennequin ; l'application du principe de précaution n'est pas justifiée en l'espèce.
Par un mémoire, enregistré le 2 octobre 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- le fait de résider dans une commune dans laquelle il est procédé, en application de l'article R. 512-14 du code de l'environnement, à l'affichage de l'avis au public prévu au I de l'article R. 123-11 du même code, ne suffit pas à établir un intérêt pour agir ; le tribunal a correctement apprécié les inconvénients potentiels que les requérants pouvaient subir pour en déduire leur absence d'intérêt à agir ;
- la seule circonstance que des colorations anciennes ont été citées dans l'étude d'impact ne peut entacher d'insuffisance l'analyse hydrogéologique réalisée ;
- les mesures réalisées au niveau des habitations situées à mille mètres de la carrière ont été particulièrement sensibles, compte tenu de la vue dégagée sur la carrière ; le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des nuisances sonores, des poussières et des vibrations devra être écarté ;
- l'étude d'impact indique que les vents les plus fréquents proviennent de la direction 280° ; elle prend en compte la topographie des lieux pour évaluer les retombées de poussières et prévoit des mesures réalisées aux quatre coins de la parcelle et notamment sous les vents à 240° ;
- la problématique de la présence de la carrière à proximité de l'aérodrome a été spécifiquement analysée et prise en compte dans l'arrêté préfectoral ;
- la présence de l'établissement "Les jardins d'Osiris" a été prise en compte dans l'arrêté d'autorisation ; en tout état de cause, il n'est pas démontré que des insuffisances ou omissions, si elles devaient être retenues, auraient nui à l'information complète du public ou été de nature à influencer la décision du préfet.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;
- et les observations de MeH..., pour les requérants.
1. Considérant que M. J...et autres relèvent appel du jugement du 8 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2010 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a autorisé la Sarl Pennequin à exploiter une carrière de roche calcaire et ses installations annexes sur le territoire de la commune de Prenois ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 511-1 et L. 514-6 du code de l'environnement, il appartient au juge administratif d'apprécier si les tiers personnes physiques qui contestent une décision prise au titre de la police des installations classées justifient d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux ;
3. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la circonstance qu'ils habitent la commune de Darois qui est concernée par l'obligation d'affichage public de l'avis prévu au I de l'article R. 123-11 du code de l'environnement, ne suffit pas à leur conférer un intérêt pour demander l'annulation d'une autorisation d'exploiter une carrière ; qu'en se bornant, sans autre précision, à faire valoir que l'augmentation du trafic de camions sur les voies d'accès au site ainsi que les émissions de bruits et de poussières et les vibrations engendrées par l'exploitation de l'installation en cause constitueraient des dangers pour la santé et la sécurité publiques, les requérants ne font pas état d'éléments suffisamment circonstanciés pour établir qu'ils subiraient effectivement des inconvénients et dangers du fait du fonctionnement de l'installation en cause, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'ils demeurent... ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande au motif qu'ils ne justifient pas d'un intérêt suffisamment direct et certain leur donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 juillet 2010 ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent sur leur fondement au titre de leurs frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de M.J..., de M. et MmeK..., de M. D..., de M. et Mme G...ainsi que de M. et Mme F...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la Sarl Pennequin et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. J... et autres est rejetée.
Article 2 : M.J..., M. et MmeK..., M.D..., M. et Mme G...et M. et Mme F...verseront solidairement une somme de 1 500 euros à la Sarl Pennequin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...J..., à M. et Mme A...et CorinneK..., à M. E...D..., à M. et Mme L...et BrigitteG..., à M. et Mme C...et NicoleF..., à la Sarl Pennequin et au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.
Délibéré après l'audience du 9 février 2016 à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre ;
M. Drouet, président-assesseur ;
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2016.
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N° 14LY03139