Par un jugement n°s 1403912, 1403913 du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ces deux demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 23 septembre 2015, Mme A...B..., représentée par Me Grenier, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n°s 1403912, 1403913 du tribunal administratif de Dijon du 11 juin 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 août 2014 par lequel le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande de titre de séjour et l'arrêté du 19 septembre 2014 par lequel le même préfet a décidé sa remise aux autorités espagnoles ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il est entaché d'un vice de procédure, dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie préalablement ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision de remise aux autorités espagnoles :
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2016, le préfet de l'Yonne, représenté par la SELARL Claisse et Associés, avocat, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- et les observations de Me Bouchoudjian, avocat (SELARL Claisse et Associés), pour le préfet de l'Yonne ;
Sur le refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, que Mme B..., née le 9 juillet 1970 et de nationalité marocaine, soutient que, depuis son arrivée en octobre 2013 en France après avoir vécu en Espagne à compter de juin 2008, elle vit avec son père et sa mère ; que cette dernière, titulaire d'une carte de résident et qui séjourne en France avec son époux depuis 2003, est atteinte de plusieurs pathologies invalidantes, nécessitant l'assistance de sa fille dans tous les actes de la vie quotidienne ; que la requérante soutient également que son père, de nationalité française, âgé de plus de soixante-treize ans et dont l'état de santé ne lui permet pas d'assister son épouse, vit en France depuis quinze ans, que sa soeur, qui est de nationalité française et étudie à Paris et son frère, qui vit en France sous couvert d'une carte de résident avec son épouse et leur enfant et travaille en qualité d'agent de sécurité, ne peuvent assister leur mère dans tous les actes de sa vie quotidienne ; qu'elle soutient enfin que, sans enfant, elle n'a plus aucune attache familiale ni au Maroc ni en Espagne, ayant divorcé en janvier 2011 de son époux marocain avec lequel elle vivait en Espagne ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel que la mère de l'intéressée ne pourrait bénéficier d'une assistance extérieure ou apportée par son père, époux de sa mère, ou par les autres membres de la famille qui vivent en France ; que, divorcée et sans enfant, Mme B... n'est pas dépourvue de tout lien au Maroc, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans et où résident une de ses soeurs et trois de ses frères, ni en Espagne où elle a vécu plus de cinq années et où elle s'est vu délivrer par les autorités de ce pays un titre de séjour portant la mention "résident longue durée CE" valable jusqu'au 3 août 2018 ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de la requérante ;
2. Considérant, en second lieu, qu'aux termes qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; que selon l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. / (...) " ; que l'article R. 312-2 dudit code dispose : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-8, quatrième alinéa, L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance. / (...) " ;
3. Considérant que, ne remplissant pas les conditions pour obtenir un titre de séjour, ainsi qu'il a été dit ci-dessus au point 1, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant d'opposer un refus à sa demande de titre de séjour ;
Sur la décision de remise aux autorités espagnoles :
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. " ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 3 que Mme B... n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision la remettant aux autorités espagnoles, de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour ;
6. Considérant, d'autre part, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 1, la décision en litige n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de la requérante ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 21 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Régis Fraisse, président de la cour,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique le 21 mars 2017.
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N° 15LY03140
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