Résumé de la décision
M. E... et Mme C..., les frère et sœur de M. D... C..., décédé par pendaison dans sa cellule de quartier disciplinaire à la maison d'arrêt de Grenoble, ont formé un recours devant la cour après que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, estimant que l'État, représenté par l'administration pénitentiaire, avait engagé sa responsabilité. Au cours de l'instruction, il a été constaté que M. C... souffrait de schizophrénie de type paranoïde et avait bénéficié d'une surveillance adaptée, sans que son comportement ne présage un risque de suicide imminent. La cour a conclu que la responsabilité de l'État ne pouvait être engagée et a rejeté la requête des requérants.
Arguments pertinents
1. Responsabilité de l'État : La cour offre une analyse détaillée de la possibilité d'engager la responsabilité de l'État dans les cas de préjudice relatif aux suicides en détention, affirmant que « la responsabilité de l'État en cas de préjudice matériel ou moral résultant du suicide d'un détenu peut être recherchée pour faute des services pénitentiaires en raison notamment d'un défaut de surveillance ou de vigilance. »
2. Évaluation du risque : La décision souligne l'importance d'analyser le comportement du détenu et les antécédents médicaux pour évaluer le risque suicidaire. La cour a noté qu'aucun changement de comportement, qui aurait pu justifier une surveillance renforcée, n'avait été observé avant le suicide, ce qui indique qu'« aucune faute de négligence dans la prévention de son acte ne peut ainsi être reprochée au personnel pénitentiaire. »
3. Absence de préjudice moral reconnu : En rejetant la demande de réclamation pour préjudice moral, la cour a affirmé que M. E... et Mme C... n'étaient "pas fondés à soutenir" le jugement de première instance, réputant que l'administration avait agi conformément à ses obligations.
Interprétations et citations légales
1. Cadre juridique : La cour s'appuie sur le Code de justice administrative et le Code de procédure pénale pour évaluer la responsabilité de l'État et le cadre légal permettant d'engager une action pour faute dans le contexte des suicides en détention.
2. Surveillance et évaluation : La cour précise que pour que la responsabilité de l'administration pénitentiaire soit engagée, il est nécessaire de prouver qu'elle n'a pas pris les « mesures que l'on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir le suicide », insistant sur le fait que le comportement de M. C... ne laissait pas présager un acte imminent.
3. Rappel sur les droits des détenus : La jurisprudence reconnaît un devoir de protection à l'égard des détenus souffrant de troubles psychiatriques, comme cela est mentionné dans la décision : « [...] s'il s'avère que cette faute a contribué à la faute du service public pénitentiaire. » Cependant, dans ce cas précis, la cour a jugé qu'aucune telle faute n'avait été démontrée.
En somme, la décision a mis en exergue la rigueur nécessaire pour établir la responsabilité de l'État dans des situations de suicide en détention, tout en confirmant que chaque cas doit être analysé au regard des antécédents et du comportement du détenu.