Par un jugement n° 1908134 du 19 février 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. G... en tant qu'elle concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, fixation du pays de destination, et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.
Par un jugement n° 1908134, 1908136 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes en tant qu'elles concernent les refus de titre de séjour.
Procédures devant la cour
I- Par une requête enregistrée le 24 juillet 2020, Mme H... épouse G..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1908136 du 19 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Ardèche a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;
3°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a assignée à résidence ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt, jusqu'au réexamen de son droit au séjour et de faire procéder à l'effacement du signalement au fin de non-admission dans le système d'information Schengen et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français se fonde sur une décision portant refus de titre de séjour elle-même illégale ; en effet, le préfet n'a pas procédé à l'examen complet de sa demande en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner la demande de son mari d'être régularisé au titre du travail ;
- les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans est entachée d'erreur manifeste d'appréciation tant dans son principe que dans sa durée ;
- l'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions.
Le préfet de l'Ardèche, auquel la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.
Mme H... épouse G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2020.
II- Par une requête enregistrée le 24 juillet 2020, M. G..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1908134 du 19 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Ardèche a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduite d'office ;
3°) d'annuler l'arrêté du 15 février 2020 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a assigné à résidence ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt, jusqu'au réexamen de son droit au séjour et de faire procéder à l'effacement du signalement au fin de non-admission dans le système d'information Schengen et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français se fonde sur une décision portant refus de titre de séjour elle-même illégale ; en effet, le préfet n'a pas procédé à l'examen complet de sa demande en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner sa demande au titre du travail ;
- les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation tant dans son principe que dans sa durée ;
- l'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions.
Le préfet de l'Ardèche, auquel la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.
M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2020.
III- Par une requête enregistrée le 16 octobre 2020, Mme H... épouse G... et M. G..., représentés par Me D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1908134, 1908136 du 9 juin 2020 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 21 octobre 2019 par lesquels le préfet de l'Ardèche a refusé de leur délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de leur délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à leur conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
Ils soutiennent que :
- les décisions portant refus de titre de séjour portent une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur de droit et n'a pas procédé à l'examen complet de la demande présentée par M. G... en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner sa demande au titre du travail.
Le préfet de l'Ardèche, auquel la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.
Mme H... épouse G... et M. G... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 septembre 2020.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale de New-York relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. G... et Mme H... épouse G..., de nationalité arménienne, sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 25 novembre 2011, accompagnés de leurs deux enfants. Après le rejet de leur demande d'asile, ils ont fait l'objet de plusieurs décisions portant refus de titre et obligation de quitter le territoire, la dernière étant assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois. Saisi d'une nouvelle demande de régularisation de leur situation, le préfet de l'Ardèche a, par arrêtés du 21 octobre 2019, refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français sans délai, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de 36 mois et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office. Mme G... a été assignée à résidence le 13 février 2020. M. G..., qui avait été initialement placé en rétention, a également été assigné à résidence le 15 février 2020. Ils relèvent appel, d'une part, respectivement sous le n° 20LY02001 pour Mme G... et sous le n° 20LY02002 pour son époux, des jugements du 19 février 2020 par lesquels le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation des décisions du 21 octobre 2019 portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, fixation du pays de destination, et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 36 mois et, d'autre part, conjointement sous le n° 20LY02995, du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des refus de titre de séjour pris le 21 octobre 2019.
2. Ces différentes requêtes concernent les membres de la même famille, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un unique arrêt.
Sur les refus de séjour :
3. Les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile définissent, pour les personnes qui ne satisfont pas aux conditions fixées par le code pour la délivrance des cartes de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sur le fondement de l'article L. 313-11 ou portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 et qui sollicitent leur régularisation, un régime d'admission exceptionnelle au séjour en France. En l'espèce, les décisions contestées mentionnent que les intéressés ne justifient pas de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires au titre de leur vie privée et familiale, tant par la durée et les conditions de leur séjour en France, qu'au regard de la scolarisation de leurs enfants, de leur état de santé qu'enfin, du fait de leur intégration professionnelle puisqu'ils ne justifient d'aucune activité professionnelle. Si les requérants font grief au préfet de ne pas avoir examiné la possibilité de délivrer sur le fondement de cet article un titre de séjour portant la mention " salarié " à M. G..., qui avait présenté à l'appui de sa demande une promesse d'embauche, il ressort des termes mêmes de sa demande et du bordereau des pièces qu'il avait jointes qu'il avait seulement demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, les intéressés ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige seraient entachées d'une erreur de droit et d'un défaut d'examen particulier au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme G..., qui sont entrés en France le 25 novembre 2011 accompagnés de leurs enfants, s'y sont maintenus après avoir fait l'objet d'obligations de quitter le territoire français, pour M. G..., alias C... F..., les 17 avril 2014, 10 septembre 2015, et 19 mai 2017, confirmées par des jugements des 16 décembre 2014, 15 septembre 2015 et 16 janvier 2018 du tribunal administratif de Lyon et, pour Mme G... les 17 avril 2014 et 6 juillet 2016 confirmées par des jugements des 16 décembre 2014 et 30 mars 2017 du tribunal administratif de Lyon. Ils se sont vu chacun opposer en même temps que la dernière obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour d'une durée de 18 mois. Ils n'ont exécuté aucune de ces décisions. M. et Mme G..., qui se trouvent tous les deux en situation irrégulière en France, ne disposent pas, en dehors de leurs enfants, de liens familiaux en France. Ils ne sont pas dépourvus d'attaches familiales en Arménie où résident notamment les parents de M. G... ainsi que son frère et sa soeur et le père de Mme G.... Si leurs enfants, A... et Artur, nés en Arménie en 2002 et en 2005, sont scolarisés depuis leur entrée en France et sont impliqués dans des activités culturelles et sportives, il n'est pas démontré qu'ils ne pourraient pas poursuivre leur scolarité et plus largement une vie privée et familiale normale dans leur pays d'origine. La circonstance, à cet égard, que, postérieurement aux décisions en litige A... soit devenue majeure et qu'elle ait demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut que demeurer sans incidence sur la légalité des décisions litigieuses qui doit s'apprécier à la date à laquelle elles ont été prises. Dans ces conditions, compte tenu des conditions de leur séjour en France, et malgré leurs efforts d'intégration, les décisions litigieuses n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Elles n'ont donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. Dès lors, ainsi que l'a noté le tribunal, que les décisions en litige n'emportent aucune séparation entre M. et Mme G... et leurs deux enfants, qu'il n'est ni allégué ni établi que les enfants, nés en Arménie, ne pourraient y poursuivre leur scolarité et plus largement une vie privée et familiale normale, qu'il n'est pas davantage allégué ou même démontré que la cellule familiale ne pourrait s'y reconstituer, et que la circonstance que A... ait, postérieurement aux décisions en litige, déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut que demeurer sans incidence sur la légalité des décisions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur les obligations de quitter le territoire français sans délai :
8. Il résulte de l'examen de la légalité des refus de titre de séjour qui leurs ont été opposés, que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français.
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, les décisions les obligeant à quitter le territoire français n'ont pas été prises en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leurs situations personnelles.
Sur les interdictions de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans :
10. M. et Mme G... reprennent en appel les moyens tirés de ce que les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation tant dans leur principe que dans leur durée. Il y a lieu, par adoption des motifs du premier juge, d'écarter ces moyens.
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, ces décisions n'ont pas été prises en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur les décisions fixant le pays de destination et les assignations à résidence :
12. Dès lors qu'ils n'en demandent l'annulation que par voie de conséquence de l'illégalité des autres décisions, les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions fixant leur pays de destination et ni Mme H... épouse G..., ni, en tout état de cause, M. G... ne sont fondés à demander l'annulation des décisions des 13 et 15 février 2020 par lesquelles le préfet de l'Ardèche a décidé de les assigner à résidence.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme H... épouse G... et M. G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon et le tribunal administratif de Lyon ont rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de Mme H... épouse G... et de M. G... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... H... épouse G..., à M. B... G... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.
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N° 20LY02001, ...