Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2017, la commune de Fontaines, représentée par la SELARL Carré Juris Avocats, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Dijon du 20 octobre 2017 ;
2°) de fixer le solde du marché en litige à la somme de 22 457,51 euros hors taxe (HT) au crédit de la société Eurovia Bourgogne et d'ordonner à cette dernière de lui restituer la somme de 22 656,13 euros HT, outre intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de la société Eurovia Bourgogne une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont fait droit à la demande de la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté au titre des travaux supplémentaires TS2 0.1, 0.4 et 0.5 pour un montant de 2 171 euros HT :
- la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté n'a pas exécuté le marché conformément à ses engagements contractuels de mise en oeuvre de son procédé Profilovia(r) et d'une épaisseur d'enrobé de 7 cm de moyenne ; si la sous-épaisseur constatée n'a fait l'objet d'aucune réserve dans le procès-verbal de réception du 14 mai 2014, c'est parce que ce vice était caché et que seuls des sondages ultérieurs ont permis de le mettre en évidence ; elle est donc bien fondée à solliciter la déduction en moins-value d'une somme de 20 497,50 euros sur le fondement de la responsabilité contractuelle ;
- le solde du marché à son débit s'établit donc, après application d'un rabais de 2 %, à la somme de 22 547,41 euros HT ; les intérêts moratoires dus doivent être calculés sur la base de cette somme et il appartient à la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté de lui rembourser 22 656,13 euros, outre intérêts moratoires.
Par un mémoire, enregistré le 16 mars 2018, la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté, représentée par la SELARL Itinéraires Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Dijon du 20 octobre 2017 en portant à 52 021,33 euros hors taxe (HT), augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts moratoires à compter du 18 décembre 2014, le montant de la condamnation de la commune de Fontaines ;
2°) de mettre à la charge de la commune une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- il appartient à la commune d'établir que sa requête n'est pas tardive ;
- la commune ne conteste pas l'exécution des travaux supplémentaires TS2 mais seulement la réalisation de certains postes, pourtant nécessaires et indispensables à la réalisation des travaux dans les règles de l'art ;
- s'agissant de l'épaisseur des enrobés, la commune ne peut se prévaloir de la garantie des vices cachés de la chose vendue ; la réception de l'ouvrage a mis fin à leurs relations contractuelles et sa responsabilité ne peut plus être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour des désordres qui affecteraient l'ouvrage ; en tout état de cause, elle a respecté ses engagements contractuels en mettant en oeuvre, avec l'accord de la commune, son procédé Profilovia(r) qui permettait de supprimer le reprofilage en grave bitume et d'obtenir, avec une seule couche, le même résultat ;
- dans la mesure où le marché a été conclu à prix global et forfaitaire, elle a droit au paiement de toutes les prestations qui avaient été intégrées dans sa décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF), même celles qui n'ont pas été exécutées ; elle peut donc prétendre au paiement des sommes de 930 euros HT au titre des essais à la plaque et 1 320 euros au titre des potelets de signalisation des passages piétons ;
- s'agissant de l'accès entre les parcelles AL237 et AL50, elle a, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, réalisé la zone d'accès aux maisons en enrobé tandis que la placette a été revêtue de sable ; elle a donc bien réalisé un accès en enrobé et peut prétendre au paiement de la somme de 3 160 euros HT à ce titre ;
- les travaux supplémentaires réalisés hors emprise de l'impasse des Champs n'étaient pas compris dans l'option 3 de la deuxième tranche correspondant aux travaux dans l'impasse des Champs ; elle peut donc prétendre au paiement de la somme de 1 638,66 euros à ce titre.
Un mémoire présenté pour la commune de Fontaines, enregistré le 8 novembre 2019, n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code des marchés publics alors en vigueur ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... ;
- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;
- les observations de Me A..., représentant la commune de Fontaines et celles de Me B..., représentant la société Eurovia Bourgogne ;
Considérant ce qui suit :
1. Par acte d'engagement signé le 2 août 2013, la commune de Fontaines (71) a confié à la société Eurovia Bourgogne, devenue Eurovia Bourgogne Franche-Comté, l'exécution des travaux relatifs à l'aménagement de la rue des Champs, pour un montant, options comprises, de 285 432,74 euros hors taxe (HT), soit 341 277,56 euros toutes taxes comprises (TTC). La réception des travaux a été prononcée avec réserves le 14 mai 2014. Par un jugement du 20 octobre 2017, le tribunal administratif de Dijon a condamné la commune de Fontaines à verser à la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté la somme de 45 113,64 euros HT, augmentée du montant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et des intérêts moratoires à compter du 18 décembre 2014, au titre du solde du marché. La commune de Fontaines relève appel de ce jugement et demande à ce que la somme mise à sa charge soit réduite à 22 457,51 euros HT. La société Eurovia Bourgogne Franche-Comté, par la voie de l'appel incident, demande à la cour de réformer ce jugement et de porter la condamnation de la commune de Fontaines à la somme de 52 021,33 euros HT, augmentée de la TVA et des intérêts moratoires.
Sur l'appel principal :
2. En premier lieu, la commune de Fontaines ne conteste pas l'exécution par la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté des travaux supplémentaires, dits " TS2 ", correspondant à des travaux de pose de bordure, de décapage, de mise en oeuvre d'enrobés le long de la bordure, d'amenée de terres végétales et d'engazonnement mais soutient que les sommes correspondant à l'installation du chantier, reconnaissance de terrain et réseaux (1 050 euros HT), plan d'exécution et de récolement (213,50 euros HT) et panneaux de chantier, signalisation (907,50 euros HT) ne sont pas dues. Cependant, il résulte des stipulations des articles 0.5 et suivants du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, que les travaux en cause, réalisés à la demande de la commune, imposaient une reconnaissance des terrains et des réseaux, une signalisation de chantier et la fourniture de plans de récolement. La circonstance que la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté aurait réalisé des travaux de même nature, dits " TS1 ", sans inclure dans son projet de décompte final de sommes correspondant à de telles prestations n'est pas suffisante à établir que cette société ne les aurait pas exécutées dans la zone d'intervention des TS2. En outre, si la commune de Fontaines soutient que la reconnaissance des terrains et des réseaux avait nécessairement déjà été effectuée pour l'exécution des travaux compris dans le marché initial, il résulte de l'instruction que la zone d'intervention des TS2 était distincte de celle prévue initialement au marché. Enfin, la commune de Fontaines fait valoir que la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté ne lui a pas présenté de devis et qu'elle n'a pas accepté en amont le prix de ces prestations. Cependant, il résulte de l'instruction que les montants sollicités par la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté dans son projet de décompte final correspondent aux prix forfaitaires indiqués dans la décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF) acceptée par la commune.
3. En second lieu, la commune de Fontaines soutient que la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté n'a pas respecté son engagement de réaliser, dans la rue des Champs, un enrobé d'une épaisseur de 7 cm et demande, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, une diminution du prix du marché. Toutefois, il résulte de l'instruction que les travaux d'aménagement de la rue des Champs ont été réceptionnés le 14 mai 2014 sans réserve s'agissant de l'épaisseur de l'enrobé mettant ainsi fin, sur ce point, aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. La commune de Fontaines ne saurait utilement invoquer les dispositions de portée générale de l'article 1147 du code civil, la réception des travaux, sans réserve sur ce point, s'opposant à la mise en oeuvre d'une quelconque responsabilité reposant sur cette cause juridique en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. Par ailleurs, postérieurement à la réception définitive des travaux, le maître de l'ouvrage, s'il peut, le cas échéant, engager la responsabilité du constructeur sur le fondement de la garantie décennale, ne peut se prévaloir, comme le fait la commune de Fontaines, de la garantie des vices cachés de la chose vendue prévue par l'article 1647 du code civil. Enfin, et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que la commune de Fontaines a accepté l'offre variante de la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté qui permettait de supprimer le reprofilage en grave bitume initialement prévu et d'obtenir en une seule couche le même résultat. En réponse à une demande de la commune, la société a précisé, par courrier électronique du 24 mai 2013, que le dosage de son procédé Profilovia(r) serait de 140 kg/m2 moyen sur toute la rue des Champs et a communiqué en pièce jointe la fiche produit et la fiche technique de son procédé faisant état d'une épaisseur pouvant aller jusqu'à 12 cm, en fonction des déformations de la chaussée existante. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté se serait engagée à appliquer uniformément, sur toute la longueur de la rue, une épaisseur d'enrobé de 7 cm.
4. Il résulte de ce qui précède que la commune de Fontaines n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes sur ces points.
Sur l'appel incident :
5. En premier lieu, il est constant que les essais à la plaque, pour un montant de 930 euros HT, et la pose de 24 potelets de signalisation des passages piétons, pour un montant de 1 320 euros HT, prévus au marché, n'ont pas été exécutés à la demande de la commune. Toutefois, la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté ne peut prétendre au paiement de travaux qui n'ont pas été exécutés et ce, alors même que le marché a été conclu à prix global et forfaitaire.
6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, par ordre de service n° 3 du 19 février 2014, la commune de Fontaines a demandé à la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté d'exécuter l'option n° 2 en réalisant l'accès entre les parcelles AL337 et AL50, non pas en enrobé, comme prévu initialement, mais en sable. La société soutient que la zone d'accès aux maisons a été réalisée en enrobé tandis que la placette située entre ces deux parcelles a été revêtue de sable, conformément à la demande de la commune, et qu'elle a droit au paiement de ces deux prestations. Néanmoins, il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier du plan de récolement qu'elle a établi 16 juillet 2014, qu'elle aurait mis en place un enrobé noir dans la zone concernée. Elle ne peut donc prétendre au paiement de la somme de 3 160 euros HT à ce titre.
7. En dernier lieu, la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté fait valoir que les " travaux hors emprise Impasse des Champs " dont elle demande le paiement pour un montant de 1 638,66 euros HT ne sont pas inclus dans l'option n° 3 de la deuxième tranche du marché relative à la réfection de la chaussée de cette impasse, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, dès lors qu'il s'agit de travaux différents, réalisés dans deux zones différentes. Toutefois, la société n'apporte pas plus à la cour qu'au tribunal d'élément de nature à établir la portée de son assertion.
8. Il résulte de ce qui précède que la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon n'a pas inclus ces sommes au débit de la commune de Fontaines dans le décompte du marché.
9. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté, la requête de la commune de Fontaines, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais du litige, doit être rejetée. Les conclusions d'appel incident présentées par la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent l'être également.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Fontaines est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fontaines et à la société Eurovia Bourgogne Franche-Comté.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 décembre 2019.
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N° 17LY04307