Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué et l'arrêté contesté ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, de statuer à nouveau sur son droit au séjour dans le délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de sept jours ;
3°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de l'Isère ou au collège de médecins de l'OFII de produire les éléments d'information ayant conduit le collège à considérer qu'elle peut effectivement bénéficier au Cameroun d'un traitement approprié et de désigner un expert ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la CEDH ont été méconnues ;
- le préfet a commis une erreur de droit en omettant de se prononcer sur le point de savoir si elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.
Un mémoire produit pour Mme D... enregistré le 27 juin 2019 n'a pas été communiqué.
Par une décision du 11 juillet 2018, Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les observations de Me A..., pour Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante camerounaise née en 1966 et entrée en France en 2007, s'est présentée personnellement le 17 mars 2017 à la préfecture de l'Isère pour y solliciter un titre de séjour pour raison de santé, en indiquant souffrir d'une hypertension artérielle et d'une cardiopathie valvulaire. Elle relève appel du jugement du 24 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017 du préfet de l'Isère portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de renvoi.
2. En vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public : " A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". En vertu du 10° de l'article L. 511-4 du même code, ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement : " L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".
3. Mme D... soutient que le préfet de l'Isère a commis une erreur de droit en se bornant à constater l'existence, au Cameroun, d'un traitement approprié à son état de santé sans vérifier si eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays, elle pouvait y accéder effectivement. Il ressort cependant des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est notamment fondé sur un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 15 octobre 2017, selon lequel, si le défaut d'une prise en charge adaptée à l'état de santé de l'intéressée risque d'avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celle-ci peut, eu égard aux caractéristiques du système de santé du pays dont elle est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
4. Mme D... invoque pour le surplus des moyens identiques à ceux développés en premier instance, sans les assortir d'aucune critique utile ou pertinente. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges, selon lesquels le préfet de l'Isère n'a méconnu ni les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la mesure d'éloignement n'est pas illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.
5. Il y a lieu d'écarter pour le même motif que celui retenu par le tribunal pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen, dont il ne diffère pas, tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de l'intéressée.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée ni d'accueillir les conclusions, irrecevables, tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère ou au collège de médecins de l'OFII de produire les éléments d'information ayant conduit le collège à considérer qu'elle peut effectivement bénéficier au Cameroun d'un traitement approprié, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. La requête doit être rejetée, y compris le surplus des conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme B..., président-assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 décembre 2019.
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N° 18LY02800