Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 juin 2017 et des mémoires enregistrés les 27 février 2018 et 6 novembre 2018, la SARL H2O Plus, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 2 février 2016 du directeur territorial Rhône-Saône de VNF prononçant la résiliation de la convention d'occupation temporaire du 30 juillet 2010 l'autorisant à occuper une coupure de berge permettant l'accès au port privé d'Auxonne ;
3°) d'ordonner la reprise des relations contractuelles à compter du 2 février 2016 ;
4°) d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 11 005 euros émis le 18 août 2016 à son encontre par VNF ;
5°) de mettre à la charge de VNF la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la résiliation du contrat n'est pas fondée dès lors qu'elle n'avait pas à prévenir VNF d'une simple augmentation du nombre d'emplacements dans le port, que la convention ne prévoit pas que la redevance évoluerait en fonction du nombre de stationnements matérialisés et que VNF savait dès la signature de la convention que le port aurait une capacité de cent cinquante places et non de vingt ;
- les relations contractuelles doivent donc être reprises ;
- le titre exécutoire en litige doit être annulé par voie de conséquence.
Par des mémoires en défense enregistrés les 3 novembre 2017 et 17 mai 2018, VNF, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la SARL H2O Plus une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 26 novembre 2018 par une ordonnance du 8 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du domaine de l'Etat ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 91-797 du 20 août 1991 modifié, relatif aux recettes instituées au profit de Voies Navigables de France par l'article 124 de la loi de finances pour 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de Mme A...,
- et les observations de Me B... représentant la société H2O Plus et celles de Me C... représentant Voies Navigables de France ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial signée le 30 juillet 2010, l'établissement public VNF a autorisé la SARL H2O Plus à exploiter pour une durée de dix-sept ans à compter du 1er décembre 2010 une coupure de berge d'un linéaire de 30 mètres permettant l'accès au port fluvial privé situé sur le territoire de la commune d'Auxonne. Par une décision du 2 février 2016, le directeur territorial Rhône-Saône de VNF a résilié cette convention. La SARL H2O Plus relève appel du jugement du 11 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de cette dernière décision, à ce qu'il soit enjoint à VNF de reprendre les relations contractuelles ainsi qu'à l'annulation du titre exécutoire du 18 août 2016 d'un montant de 11 005 euros émis à son encontre par VNF.
2. Aux termes de l'article L. 33 du code du domaine de l'Etat, dans sa version applicable à la date de la signature de la convention : " Le service des domaines peut réviser les conditions financières des autorisations ou concessions, à l'expiration de chaque période stipulée pour le paiement de la redevance, nonobstant, le cas échéant, toutes dispositions contraires de l'acte d'autorisation ou de concession. (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. ". Ces dispositions sont applicables aux occupants autorisés du domaine public dont la gestion est confiée à VNF.
3. Pour contester la décision de résiliation du 2 février 2016 intervenue au motif que la SARL H2O Plus avait augmenté la capacité d'accueil du port d'Auxonne sans en informer VNF en vue de la réévaluation de sa redevance, comme le contrat le prévoyait, et avait refusé de signer un avenant autorisant le stationnement de cent-vingt-deux bateaux et non plus vingt, la société requérante soutient qu'elle n'avait pas à prévenir VNF d'une simple augmentation du nombre d'emplacements aménagés dans le port, que la convention ne prévoit pas que la redevance évoluerait en fonction du nombre de stationnements matérialisés et que VNF savait dès la signature de la convention que le port aurait une capacité effective de cent cinquante places.
4. Il résulte toutefois de l'instruction que l'article 3 de la convention prévoyait que l'augmentation de la capacité d'accueil de bateaux ainsi que toute modification liée à l'activité de la société sur le site devaient être signalées, sans délai, à VNF par le cocontractant afin qu'un avenant actant les modifications et révisant la redevance en fonction des nouveaux éléments communiqués soit établi. Par ailleurs, la convention visait le code du domaine de l'Etat, le code général de la propriété des personnes publiques ainsi que le décret du 20 août 1991 et, surtout, la décision du 7 décembre 2009 du directeur général de VNF fixant le montant des redevances domaniales applicables aux différents usages du domaine public fluvial confié à VNF et de son domaine privé. L'article 6 de la convention précisait que le montant de la redevance pourrait faire l'objet d'une révision dans les conditions fixées à l'article L. 33 du code du domaine de l'Etat.
5. Il résulte en outre de l'instruction, notamment du document intitulé "présentation du projet" rédigé par la société H2O Plus et annexé au contrat, que la société projetait de porter le nombre de bateaux pouvant être accueillis dans le port de vingt à plus de cent vingt et que VNF s'est appuyé sur ces chiffres pour définir une redevance initiale, calculée en application de la grille tarifaire définie par la décision de son directeur du 7 décembre 2009 et correspondant à vingt bateaux.
6. Compte tenu de ce qui précède, et alors même que l'article 6 de la convention se borne à se référer à une "redevance de base annuelle d'un montant de 3 525 euros" et que le relevé détaillé annexé à la convention ne précisait pas les modalités de calcul de ce montant, la société H2O Plus, créée pour exploiter le port d'Auxonne par la société H20, spécialiste du tourisme fluvial, ne pouvait ignorer que le montant de la redevance varierait en fonction du nombre de bateaux susceptibles d'accéder au port et que son obligation d'informer VNF de toute "augmentation de la capacité d'accueil de bateaux" correspondait au nombre de bateaux pouvant effectivement être accueillis compte tenu des aménagements réalisés et ne pouvait pas faire référence à la capacité maximale théorique du port.
7. La décision de résiliation du 2 février 2016 qui mentionne que le port pouvait désormais accueillir cent-vingt-deux bateaux, ce dont la société H2O Plus n'avait pas averti VNF, et constate qu'en dépit des multiples démarches accomplies par VNF, conclues par une mise en demeure du 7 décembre 2015, la société H2O Plus refusait de signer un avenant procédant à la révision de la redevance, apparaît dès lors fondée. Par suite, la reprise des relations contractuelles ne peut pas être ordonnée.
8. Par voie de conséquence, la société ayant continué à utiliser la coupure de berge pour permettre l'accès à ses installations après le 6 février 2016, date à laquelle la décision de résiliation lui a été notifiée, alors qu'elle ne disposait plus de titre pour ce faire, VNF était fondé à lui demander, par le titre exécutoire contesté, le versement d'une indemnité compensant la redevance qu'il aurait dû percevoir si l'occupation avait été régulière pour la période du 7 février au 6 août 2016.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL H2O Plus n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que VNF, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la SARL H2O Plus une somme au titre des frais liés au litige. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SARL H2O Plus, la somme de 2 000 euros à verser à VNF au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL H2O Plus est rejetée.
Article 2 : La SARL H2O Plus versera une somme de 2 000 euros à Voies Navigables de France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL H2O Plus et à Voies Navigables de France.
Délibéré après l'audience du 3 octobre2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme E..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 17 octobre 2019.
2
N° 17LY02364