Par une requête, enregistrée le 29 août 2019, la garde des sceaux, ministre de la justice demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1803236 du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) de rejeter la demande de M. D....
Elle soutient que :
- le jugement contesté est entachée d'une erreur de fait dès lors que les décisions contestées comportent le nom et la signature de leur auteur, conformément aux dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- les décisions contestées ont été prises par une autorité identifiable et compétente ;
- le règlement intérieur n'est pas illégal par voie d'exception puisqu'il est seulement transmis pour information au juge de l'application des peines, et qu'en tout état de cause, il été validé dans sa version du 2 juillet 2012 par le juge de l'application des peines et par le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon, qui l'approuvé dans sa version du 2 novembre 2016, et ce alors qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose que le règlement intérieur de l'établissement soit communiqué à une commission de surveillance ;
- les faits à l'origine du placement en régime contrôlé de l'intéressé sont matériellement établis.
La clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2020 par une ordonnance du 28 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... ;
- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... D..., alors détenu au centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand, a été placé à plusieurs reprises en régime contrôlé de détention par des décisions des 15 novembre 2017, 10 janvier et 31 mai 2018. Par un jugement n° 1803236 du 28 juin 2019, dont la garde des sceaux, ministre de la justice relève appel, le tribunal administratif de Dijon a annulé ces trois décisions.
2. En vertu des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ".
3. Il ressort de la " synthèse des décisions CPU " produite par le requérant en première instance et surtout des décisions prises à l'issue de la commission pluridisciplinaire unique (CPU) produites en appel par la garde des sceaux, ministre de la justice, que les décisions contestées des 15 novembre 2017, 10 janvier 2018, 31 mai 2018 mentionnent les prénom, nom et qualité de leur auteur, en l'occurrence Mme B... A..., directrice du centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand, et comportent la signature de cette dernière.
4. Il résulte de ce qui précède que c'est dès lors à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a retenu au soutien de sa décision, le motif tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration par ces décisions.
5. Toutefois il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le tribunal administratif de Dijon.
6. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 3, en particulier de leur signature par la directrice du centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand, M. D... n'est pas fondé à soutenir que les décisions attaquées sont entachées d'un vice d'incompétence tenant à l'absence de délégation régulière de leur auteur.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 57-6-19 du code de procédure pénale, en vigueur depuis le 29 décembre 2010 : " Le règlement intérieur de l'établissement, de même que ses éventuelles modifications, est transmis pour approbation au directeur interrégional. Il est adressé pour information au juge de l'application des peines, au président du tribunal de grande instance et au procureur de la République. ".
8. Il résulte des dispositions précitées que le règlement intérieur est seulement transmis pour information au juge de l'application des peines et que le défaut de cette transmission n'est pas une cause d'illégalité du règlement. Si l'article D. 255 du code de procédure pénale prévoyait que le règlement intérieur devait être soumis pour avis au juge de l'application des peines, cet article a été, par effet des articles 46 et 48 décret n° 2010-1635 du 23 décembre 2010 portant application de la loi pénitentiaire et modifiant le code de procédure pénale, abrogé le 4 mai 2013, soit à la date d'entrée en vigueur du décret n° 2013-368 du 30 avril 2013 relatif aux règlements intérieurs types des établissements pénitentiaires. Le règlement intérieur du 2 novembre 2016 n'avait donc pas à être soumis pour avis au juge de l'application des peines. Aucune disposition législative ou règlementaire n'impose que le règlement intérieur de l'établissement soit communiqué à la commission de surveillance. Il ressort des pièces du dossier que le règlement intérieur du 2 novembre 2016 a été approuvé le 7 novembre 2016 par le directeur interrégional. Par suite, M. D... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du règlement intérieur du centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand au soutien de sa demande d'annulation.
9. En troisième et dernier lieu, la décision contestée du 15 novembre 2017 énonce dans ses motifs qu'un téléphone portable et des produits stupéfiants ont été découverts en possession de M. D..., qui conteste uniquement avoir détenu un téléphone portable. Un compte-rendu d'incident, qui mentionne que le 6 novembre 2017, lors de la fouille sectorielle, il a été découvert dans la cellule occupée notamment par le requérant, un téléphone portable sans carte sim et des produits stupéfiants établit l'exactitude matérielle des faits reprochés.
10. La décision contestée du 10 janvier 2018 fait état dans ses motifs d'insultes et de menaces sur les membres du personnel. M. D... conteste uniquement avoir proféré des insultes. L'exactitude matérielle des faits en litige est établie par un compte-rendu d'incident relatant que le 13 décembre 2017, l'intéressé a insulté un surveillant pénitentiaire qui refusait de lui faire passer un sac alimentaire venant des étages supérieurs.
11. La décision contestée du 31 mai 2018 fait quant à elle mention de " coups de raquettes de ping-pong et de raclette " portés à une autre personne détenue. M. D... conteste ces violences, en indiquant qu'elles ne sont pas établies. Toutefois, il ressort des pièces du dossier disciplinaire (compte rendu d'incident, rapport d'enquête et décision de sanction) que les faits précités sont matériellement établis, l'intéressé ayant reconnu avoir frappé un détenu avec une raquette de ping-pong, le 21 mai 2018, violences que le visionnage des images de vidéosurveillance a confirmées. L'intéressé a été puni de 15 jours de cellule disciplinaire pour ces faits.
12. Le moyen tiré de ce que les trois décisions contestées sont entachées d'erreurs de fait doit donc être écarté.
13. Il résulte de ce qui précède, que la garde des sceaux, ministre de la justice est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Dijon a annulé les décisions des 15 novembre 2017, 10 janvier 2018 et 31 mai 2018 par lesquelles le directeur du centre de pénitentiaire de Varennes-le-Grand a placé M. D... en régime contrôlé de détention.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement susmentionné n° 1803236 du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Dijon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E... D... devant le tribunal administratif de Dijon est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2020.
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N° 19LY03374