Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 13 novembre 2018 et 8 janvier 2019, la garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler le jugement et de rejeter la demande de M.B....
Elle soutient que :
- la minute du jugement attaqué n'est pas signée par le président et le rapporteur ;
- l'administration pénitentiaire a mis tout en oeuvre pour convoquer les assesseurs extérieurs et se trouvait dans l'impossibilité de reporter la commission de discipline ;
- l'absence d'un avocat n'étant pas imputable à l'administration, M. B...n'a pas été privé d'une garantie.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction ;
La garde des sceaux, ministre de la justice, ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- et les conclusions de MmeC... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 13 mai 2016, le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Moulins-Yzeure a infligé à M. B...une sanction de trente jours de mise en cellule disciplinaire. Cette décision a été confirmée, sur recours administratif préalable obligatoire, le 6 juin 2016 par la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lyon. Par un jugement du 11 septembre 2018 dont la garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.
2. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'expédition du jugement qui a été notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice, ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité.
3. Aux termes de l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs. ". Aux termes de l'article R. 57-7-8 du même code : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs. / Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement. / Le second assesseur est choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance territorialement compétent. La liste de ces personnes est tenue au greffe du tribunal de grande instance. ". Enfin aux termes de l'article R. 57-7-12 du même code : " Il est dressé par le chef d'établissement un tableau de roulement désignant pour une période déterminée les assesseurs extérieurs appelés à siéger à la commission de discipline ".
4. Il ressort des pièces du dossier que l'administration pénitentiaire a sollicité dans la journée du 11 mai 2016 par courriels les deux seules personnes extérieures susceptibles de siéger à la commission de discipline comme assesseurs, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance de Moulins. La circonstance qu'aucune de ces personnes n'a déféré à sa convocation régulière pour siéger le 13 mai 2016 à 15 heures est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie et n'obligeait pas le président de ladite commission à renvoyer la séance à une date ultérieure, alors que le transfert de M. B...au centre pénitentiaire de Lannemezan avait été décidé le 12 mai 2016. Il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a jugé que M. B...avait été privé d'une garantie de procédure.
5. Cependant, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et les administrations, applicable aux procédures disciplinaires engagées à l'encontre de détenus : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ". Si ces dispositions impliquent que l'intéressé soit informé en temps utile de la possibilité de se faire assister d'un avocat, possibilité dont il appartient à l'administration pénitentiaire d'assurer la mise en oeuvre lorsqu'un détenu en fait la demande, la circonstance que l'avocat dont l'intéressé a ainsi obtenu l'assistance ne soit pas présent lors de la réunion de la commission de discipline sera sans conséquence sur la régularité de la procédure au regard des dispositions du code des relations entre le public et l'administration que si cette absence n'est pas imputable à l'administration.
6. Il ressort en l'espèce du rapport d'enquête relatif à l'incident survenu le 4 mai 2016 que M. B... a demandé dès le 6 mai suivant l'assistance d'un avocat commis d'office. Le 11 mai 2016 à 11h05, le centre pénitentiaire de Moulins-Yseure a adressé une télécopie au bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Moulins l'informant de ce que M. B...avait demandé l'assistance d'un avocat commis d'office pour l'assister devant la commission de discipline convoquée le 13 mai 2016 à 13 heures. Par un courriel du 12 mai, le secrétaire de l'ordre a répondu qu'aucun avocat ne serait disponible pour assister le lendemain M. B...devant la commission. Ainsi que le tribunal l'a jugé, les droits de la défense de l'intéressé, qui n'a pas été mis à même d'être assisté par un avocat faute pour l'administration d'avoir respecté son obligation de convocation en temps utile, ont ainsi été méconnus.
7. Il résulte de ce qui précède que la garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 6 juin 2016.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la garde des sceaux, ministre de la justice, est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la garde des sceaux, ministre de la justice, et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 28 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 avril 2019.
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N° 18LY04039