Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 novembre 2015 et le 14 juillet 2016, M. C...B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 juillet 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 12 février 2013 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Centre-Est-Dijon rejetant le recours administratif préalable qu'il avait exercé contre la sanction prononcée le 14 janvier 2013 par la commission de discipline de la maison d'arrêt de Reims.
Il soutient que :
- le jugement attaqué a été rendu en méconnaissance du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il n'a pas pu bénéficier d'un report de clôture de l'instruction après la production du mémoire en défense du ministre de la justice notifié à son conseil le jour même de la clôture ;
- les premiers juges ont omis de répondre au moyen, fondé, tiré de ce que la décision contestée ne comporte aucun élément de fait permettant de déterminer précisément quelles sont la nature et les circonstances de son comportement général qui en constituent le fondement, en méconnaissance des stipulations des articles 5 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il n'a pas disposé d'un recours effectif lui permettant d'obtenir qu'un juge statue sur les conditions de sa détention en cellule disciplinaire avant le début de l'exécution de la sanction contestée, en méconnaissance des stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen, fondé, tiré de ce que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ;
- les faits en cause ne répondent pas, en l'absence notamment du témoignage de la prétendue victime, à la qualification retenue dans le cadre des dispositions de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale ;
- la sanction infligée est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il s'en rapporte à l'appréciation de la cour quant à la réponse à apporter au moyen tiré de la méconnaissance par le tribunal du principe du contradictoire ;
- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 2 mai 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 4 juillet 2016.
Par une ordonnance du 4 juillet 2016, la clôture de l'instruction a été rouverte jusqu'au 16 août 2016.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que M. B...a été incarcéré à... ; qu'il a fait l'objet, par une décision du 14 janvier 2013 du président de la commission de discipline de la maison d'arrêt de Reims, de 5 jours de confinement en cellule pour avoir le 10 janvier 2013 exercé ou tenté d'exercer des violences physiques à l'encontre d'une personne détenue ; que M. B...ayant été mis en placement préventif de confinement du 10 janvier au 14 janvier 2013, la sanction de 5 jours de confinement en cellule a débuté le 14 janvier 2013 et a pris fin le même jour ; que, par une décision du 12 février 2013, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Centre-Est-Dijon a rejeté le recours administratif préalable obligatoire exercé par M. B...contre cette sanction ; que, par le jugement du 9 juillet 2015 dont M. B...relève appel, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande dirigée contre la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Centre-Est-Dijon ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, que M. B...soutient que le jugement attaqué a été rendu en méconnaissance de son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il n'a pas pu bénéficier d'un report de clôture de l'instruction après la production du mémoire en défense de la garde des sceaux, ministre de la justice notifié à son conseil le 22 mai 2015, jour de la clôture d'instruction, alors que le ministre avait été mis en demeure le 12 août 2014 de produire dans un délai de 30 jours ; qu'il ressort de la fiche requête de première instance que le mémoire en défense présenté par la garde des sceaux, ministre de la justice et enregistré le 12 mai 2015 a été communiqué le 15 mai 2015 ; que, dès lors, le tribunal, en refusant de rouvrir l'instruction, n'a ni méconnu le caractère contradictoire de la procédure contentieuse ni les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Dijon a expressément répondu aux moyens contenus dans le mémoire introductif d'instance produit par le requérant ; qu'en particulier, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée, à celui tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui au surplus est inopérant, ainsi qu'au moyen tiré de l'inexactitude matérielle des faits ; que, dès lors, ce jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;
Sur la légalité de la décision contestée :
4. Considérant, en premier lieu, que si le président de la commission de discipline devait prendre en compte le comportement général de M. B...en application de l'article R. 57-7-49 du code de procédure pénale qui prévoit que " Le président de la commission de discipline prononce celles des sanctions qui lui paraissent proportionnées à la gravité des faits et adaptées à la personnalité de leur auteur (...) ", l'obligation de motivation n'imposait pas, toutefois, au directeur interrégional des services pénitentiaires Centre-Est-Dijon de mentionner dans sa décision confirmant la décision du 14 janvier 2013 du président de la commission de discipline les éléments relatifs au comportement général du détenu ; que la décision du 12 février 2013 contestée est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 visée ci-dessus ; que, dès lors, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la motivation lacunaire de cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif au droit à la liberté et à la sûreté et de l'article 6 de la même convention relatif au droit au procès équitable doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus par la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ; que M. B... se borne à soutenir qu'il n'a pas disposé d'un recours effectif au sens de ces stipulations lui permettant d'obtenir qu'un juge statue sur les conditions de son confinement en cellule disciplinaire avant le début de l'exécution de la sanction, faute de caractère suspensif des procédures de référé-suspension et de référé-liberté régies par les dispositions des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative, sans préciser quel droit ou liberté protégé par la convention aurait été violé par la décision contestée ; que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale : " Constitue une faute disciplinaire du premier degré le fait, pour une personne détenue : (...) 2° D'exercer ou de tenter d'exercer des violences physiques à l'encontre d'une personne détenue (...) " ;
7. Considérant qu'il est reproché à M. B... d'avoir le 10 janvier 2013 vers 12 heures, au cours de la distribution du repas, menacé un autre détenu, M.A..., avec un canif à bout rond en cuivre et de s'être ensuite extrait de force de la cellule, en courant ; que si le requérant, qui fait valoir que ni M. A...ni les témoins de l'incident n'ont été entendus par la commission de discipline ou l'autorité pénitentiaire, soutient qu'il était muni d'un couteau de cantine afin de se défendre par crainte d'être considéré comme une " balance " à la suite de la découverte lors de la fouille de cellule d'un téléphone sous le lit de M.A..., il n'apporte, cependant, à l'appui de ses allégations, aucun élément permettant de remettre en cause les faits tels que rapportés par le compte rendu d'incident, le rapport d'enquête et le procès-verbal du conseil de discipline, dont il ressort que M. B...s'était bien emparé d'un couteau de cantine au moment où il a insulté M. A... afin de le contraindre à sortir de la cellule ; que ces faits étaient constitutifs d'une faute du premier degré consistant en une tentative d'exercer des violences physiques à l'encontre d'une personne détenue au sens des dispositions précitées de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale ;
8. Considérant, en dernier lieu, que contrairement à ce que soutient M.B..., les litiges relatifs à la contestation des mesures disciplinaires infligées aux détenus relèvent du contentieux de l'excès de pouvoir ; qu'il appartient au juge saisi dans ce cadre de contrôler notamment la qualification juridique par l'auteur de la décision attaquée des faits retenus pour infliger une sanction ; qu'eu égard à la gravité des faits fautifs reprochés à M. B... lors de sa détention, l'administration pénitentiaire n'a pas commis d'erreur d'appréciation en lui infligeant par la décision du 12 février 2013 la sanction de 5 jours de confinement en cellule ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2016, où siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Samson Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 novembre 2016.
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N° 15LY03792