Par deux ordonnances n° 1501317 et n° 1501316 du 16 juin 2015 le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 22 juillet 2015 sous le n° 15LY02471, M. F... représenté par Me A...D...demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501317 du président du tribunal administratif de Dijon du 16 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 22 avril 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire de lui enjoindre de lui octroyer un délai pour organiser son départ ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. F... soutient que :
- le délai de recours visé dans l'arrêté préfectoral attaqué lui était inopposable puisqu'il n'y a pas eu de notification valable de cet arrêté, aucun interprète agréé en langue serbe ne l'ayant assisté ;
- les décisions signées par la secrétaire générale sont entachées d'incompétence, faute pour le préfet de prouver qu'il était empêché le 22 avril 2015 ;
- l'état de santé de MmeC..., son épouse, nécessite une prise en charge médicale et un traitement approprié n'existant pas en Serbie, il ne peut être renvoyé en Serbie alors que son épouse et ses enfants demeureraient sur le territoire français ;
- l'arrêté litigieux porte une atteinte disproportionnée à leur droit de mener une vie familiale normale, leurs cinq enfants nés en Serbie ont régulièrement poursuivi leur cursus scolaire en France où ils ont toutes leurs attaches familiales et sociales et la dernière, née en 2013, ne connaît que la France ;
- à titre subsidiaire, la décision lui imposant, ainsi qu'à l'ensemble de sa famille, de quitter le territoire sans délai est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 novembre 2015, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête et soutient que c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé la demande irrecevable et, qu'en outre, aucun moyen n'est fondé.
Le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. F... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2015.
II. Par une requête enregistrée le 22 juillet 2015 sous le n° 15LY02494, Mme C... représentée par Me A...D...demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501316 du président du tribunal administratif de Dijon du 16 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 24 avril 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire de lui enjoindre de lui octroyer un délai pour organiser son départ ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme C...soutient que :
- le délai de recours visé dans l'arrêté préfectoral attaqué lui était inopposable puisqu'il n'y a pas eu de notification valable de cet arrêté, aucun interprète agréé ne l'ayant assistée ;
- les décisions signées par la directrice de cabinet sont entachées d'incompétence, faute pour le préfet de prouver qu'il était empêché le 24 avril 2015 ;
- son état de santé nécessite une prise en charge médicale et un traitement approprié n'existant pas en Serbie, elle ne peut être renvoyée en Serbie alors que cela la priverait de soins et que cela constituerait un traitement inhumain au sens de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté litigieux porte une atteinte disproportionnée à leur droit de mener une vie familiale normale, les cinq enfants qu'elle a eus avec M. F...sont nés en Serbie, ont régulièrement poursuivi leur cursus scolaire en France où ils ont toutes leurs attaches familiales et sociales et la dernière, née en 2013, ne connaît que la France ;
- à titre subsidiaire, la décision lui imposant, ainsi qu'à l'ensemble de sa famille, de quitter le territoire sans délai est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 novembre 2015, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête et soutient que c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé la demande irrecevable et, qu'en outre, aucun moyen n'est fondé.
Le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme C...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2015.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Gondouin, rapporteur.
1. Considérant que M. F...et MmeC..., de nationalité serbe, sont entrés en France en 2011, selon leurs déclarations ; que leur demande d'asile politique a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 27 février 2012 ; que le recours présenté par M. F...a été rejeté par la Cour nationale du droit d'asile le 16 juillet 2012 ; que M. F...et Mme C...ont ensuite bénéficié, en raison de leur état de santé, d'une carte de séjour mention " vie privée et familiale " valable jusqu'au 4 septembre 2013 mais n'ont pu en obtenir le renouvellement ; que le préfet de la Côte-d'Or, par arrêtés du 23 octobre 2013, a en effet refusé de leur délivrer un titre de séjour, assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours à destination de la Serbie ; que M. F..., le 22 avril 2015, et MmeC..., le 24 avril 2015, ont fait l'objet d'une nouvelle obligation de quitter le territoire, sans délai, à destination de la Serbie ou de tout autre pays dans lequel ils établissent être légalement admissibles ; que, par ordonnances du 16 juin 2015, dont M. F...et MmeC..., chacun en ce qui le concerne, relèvent appel, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté, comme tardives, leurs demandes dirigées contre ces décisions ;
2. Considérant que ces requêtes qui concernent la situation d'un couple de ressortissants étrangers présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
3. Considérant, d'une part, que le paragraphe II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de celles relative au séjour, refusant un délai de départ volontaire, mentionnant le pays de destination et d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant ; qu'aux termes du paragraphe II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément " ;
4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. / En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger " ; que l'article L. 512-2 qui figure dans le livre V du code précité précise : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1. Ces éléments lui sont alors communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend " ;
5. Considérant que, comme l'a relevé le premier juge, l'article L. 111-8 du code précité n'impose l'assistance d'un interprète, à défaut de formulaire écrit et si l'étranger ne parle pas le français ni ne sait lire, que lorsqu'une disposition du même code prévoit qu'une décision ou une information doit être communiquée à l'étranger dans une langue qu'il comprend ; qu'en outre, selon les mêmes dispositions, le recours à un interprète agréé n'est obligatoire que lorsque son assistance se fait par l'intermédiaire de moyens de télécommunication ; que l'article L. 512-2 du même code pris pour la transposition de la directive 2008/115/CE susvisée dite " directive retour " n'impose pas non plus la présence d'un interprète mais prévoit, d'une part, que l'administration doit informer l'intéressé qu'il peut recevoir communication des " principaux éléments " des décisions qui lui sont notifiées, d'autre part, dans le cas où l'étranger en a préalablement fait la demande, qu'elle doit lui communiquer ces éléments dans une langue qu'il comprend ; qu'ainsi ni les dispositions précitées du code de justice administrative et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations des articles 12 et 13 de la directive 2008/115/CE transposées par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, n'imposent la présence d'un interprète lors, comme c'était en l'espèce le cas, de la notification d'une obligation de quitter le territoire français sans délai à un étranger laissé libre ;
6. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier que les arrêtés attaqués, portant mention des voies et délais de recours ont été remis à M. F... le 22 avril et à Mme C... le 24 avril 2015 ; que le délai de recours contentieux de quarante-huit heures a commencé à courir dès le 22 avril 2015 pour M. F...et le 24 avril 2015 pour Mme C... ; qu'en conséquence, ce délai de recours était expiré tant pour M. F...que pour Mme C...lorsque leur demande a été enregistrée au tribunal administratif le 8 mai 2015 ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F...et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les ordonnances attaquées, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes comme tardives ; que leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. F...et de Mme C...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F...et à Mme E...C...ainsi qu'au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2016 où siégeaient :
- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,
- Mme Gondouin, premier conseiller,
- Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 janvier 2016.
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Nos 15LY02471 et 15LY02494