1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 mai 2018 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une attestation de demande d'asile ;
4°) de lui communiquer le dossier ayant servi à l'édiction de l'arrêté ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Il soutient que :
- l'arrêté méconnaît les articles 4 et 5 du règlement du 26 juin 2013 ;
- il méconnaît les articles 7 et 13 de ce règlement ;
- il méconnaît l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autorités espagnoles n'ont pas donné leur accord au transfert ;
La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Savouré, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant de la République de Guinée, né le 1er janvier 1992, a présenté une demande d'asile le 9 janvier 2018. Ayant constaté, après avoir relevé ses empreintes, que l'intéressé avait franchi la frontière depuis l'Espagne, le préfet de l'Isère a saisi les autorités espagnoles d'une demande de prise en charge en application du 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du conseil du 26 juin 2013. Cette demande a fait l'objet d'un accord le 2 mars 2018. À la suite de cette procédure, le préfet du l'Isère a décidé le transfert de M. B... aux autorités espagnoles, par arrêté du 23 mars 2018. M. B... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre État peut faire l'objet d'un transfert vers l'État responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) ".
3. L'arrêté du 23 mars 2018 par lequel le préfet de l'Isère a décidé le transfert de M. B... aux autorités espagnoles, regardées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile, vise le règlement (UE) n° 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers, les textes sur lesquels il se fonde et notamment l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il indique que la confrontation des empreintes de l'intéressé avec les bases de données européennes a permis de constater qu'il avait précédemment franchi irrégulièrement la frontière espagnole et que les autorités espagnoles, saisies d'une demande de prise en charge sur le fondement de l'article 13-1 du règlement (UE) n° 604/2013, ont donné leur accord le 2 mars 2018. Ces énonciations mettent ainsi l'intéressé à même de comprendre les motifs de la décision pour lui permettre d'exercer utilement son recours. Dès lors, la décision litigieuse est suffisamment motivée au regard des exigences des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, le préfet de l'Isère produit la décision d'accord des autorités espagnoles en date du 2 mars 2018. M. B...n'est donc pas fondé à soutenir qu'en faisant mention d'un tel accord, le préfet de l'Isère aurait commis une erreur de fait.
5. En troisième lieu, le paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 prévoit que : " la détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 13 du même règlement : " Lorsqu'il est établi [...] que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un Etat membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. "
6. M. B...a déclaré lui-même lors de son entretien individuel en préfecture être entré en Espagne le 9 octobre 2017 et avoir franchi la frontière française le 15 décembre 2017. Ces déclarations sont corroborées par la fiche Eurodac qui mentionne un franchissement irrégulier de frontière en Espagne le 10 octobre 2017. Ainsi, il est établi qu'à la date de l'arrêté litigieux du 23 mars 2018, M. B... avait franchi la frontière espagnole depuis moins de douze mois. Il suit de là qu'en application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'Espagne est et demeure, en principe, l'État responsable de l'examen de sa demande de protection internationale, ainsi d'ailleurs que l'ont reconnu les autorités espagnoles en donnant leur accord à la prise en charge de l'intéressé.
7. En quatrième lieu, si M. B...soutient que la décision litigieuse ne lui a pas été notifiée conformément aux dispositions du 2 de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013, les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité.
8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. "
9. M. B...conteste tout à la fois l'existence de l'entretien prévu pas ces dispositions et les conditions dans lesquelles cet entretien s'est déroulé. Il ressort des pièces du dossier que M. B...a bénéficié d'un entretien individuel avec un agent du service chargé de l'asile à la préfecture de l'Isère le 9 janvier 2018. Cet entretien, ayant été mené par une personne du service, l'a été par une personne qualifiée au sens du 5 de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 et il ressort du résumé dudit entretien que l'intéressé a pu faire valoir à cette occasion toutes observations utiles. Il ressort également des pièces du dossier qu'une copie de ce résumé lui a été remise, permettant à son conseil d'y avoir accès en temps utile.
10. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B...a signé un document mentionnant qu'il avait reçu le 9 janvier 2018 les brochures d'information mentionnées par l'article 4
du règlement (UE) n° 604/2013. Il a ainsi notamment été informé de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits.
11. En septième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet a communiqué au tribunal, avec son mémoire en défense devant le tribunal administratif, l'ensemble des pièces sur la base desquelles a été prise la décision contestée et que l'ensemble de ces productions a été communiqué au conseil de M. B....
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Seillet, président,
MmeD..., première conseillère,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2019.
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N° 18LY03061