Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2014, M.A..., représenté par Me Grenier, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 octobre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte d'Or de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et en méconnaissance du droit d'être entendu qu'il tient du droit de l'Union européenne ;
- cette obligation est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- étant intervenue alors qu'il a saisi la Cour nationale du droit d'asile, cette mesure d'éloignement porte atteinte au droit d'asile, qui constitue une liberté fondamentale, et méconnaît son droit à un recours effectif consacré par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet ne pouvait l'éloigner du territoire français dans la mesure où sa demande d'asile ne présentait pas un caractère abusif au sens de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2015, le préfet de la Côte d'Or conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique : le rapport de M. Meillier.
1. Considérant que M. B...A..., ressortissant congolais (République démocratique du Congo) né en 1978, est entré en France en juillet 2012 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que sa demande d'asile a été rejetée le 4 juillet 2013 par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 19 décembre 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande de réexamen a également été rejetée par décision du 27 février 2014 de l'Office précité, statuant selon la procédure prioritaire ; que, sans attendre que la Cour nationale du droit d'asile se soit prononcée sur le recours formé par l'intéressé contre cette décision, le préfet de la Côte-d'Or a, par arrêté du 10 avril 2014, refusé de délivrer à M. A...un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que, par jugement du 30 octobre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. A...relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant que si M. A... soutient qu'il a été arrêté, détenu et torturé à plusieurs reprises en République démocratique du Congo en raison de sa participation à des manifestations pacifiques et de son appartenance à une organisation non gouvernementale de protection des droits de l'homme, les éléments produits à l'appui de ses allégations ne suffisent à établir ni la réalité des persécutions qu'il allègue ni l'existence de risques pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision, laquelle au demeurant n'implique pas son retour en République démocratique du Congo, sur sa situation personnelle et familiale ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant, en premier lieu, que M. A... a comparu personnellement en préfecture lors du dépôt de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; qu'il lui appartenait, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes précisions utiles ; qu'il lui était loisible, au cours de l'instruction de sa demande de titre de séjour, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; qu'il ne pouvait ignorer qu'en cas de refus, il pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que l'autorité administrative n'était pas tenue de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du droit de l'Union européenne ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. A... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " (...) l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : / 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) " ;
6. Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution, après la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant une demande d'asile, qu'à l'encontre d'un étranger entrant dans le champ d'application du 2° au 4° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il incombe de ce fait au juge saisi de la contestation de la légalité d'une obligation de quitter le territoire français après la décision de cet Office fondée sur le 4° de cet article, de s'assurer que l'étranger entre bien dans le cas visé par ces dispositions ; que la seule circonstance qu'une décision administrative ait refusé l'admission au séjour à raison du caractère frauduleux ou abusif du recours aux procédures d'asile mentionné au 4° de cet article et qu'elle n'ait pas été contestée ou qu'elle n'ait pas été annulée par le juge administratif ne fait pas obstacle à ce que le juge détermine lui-même, sans se prononcer sur la légalité de cette décision, si la demande d'asile relevait bien des cas mentionnés à l'article L. 741-4 du code précité ; que, dans l'hypothèse où il estime que tel n'était pas le cas, et alors même que l'intéressé n'avait pas été effectivement admis à séjourner en France, cet étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours ;
7. Considérant que si le requérant soutient qu'il a présenté à l'appui de sa demande de réexamen de nouvelles pièces, et notamment des convocations en date des 12 et 13 décembre 2013, des témoignages d'un compatriote et d'une cousine, en date des 13 novembre 2013 et 7 janvier 2014, ainsi que, s'agissant de son oncle qui l'aurait aidé à fuir, un avis de recherche en date du 9 juin 2014 et une attestation de son avocat datée du 27 août 2014, la seule production de ces documents, dépourvus de force probante, aux fins d'établir la réalité de faits sur lesquels la Cour nationale du droit d'asile s'est déjà en partie prononcée, ne saurait leur conférer le caractère d'éléments nouveaux susceptibles de justifier un réexamen de sa demande d'asile, déjà rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'ainsi, en l'absence d'éléments nouveaux, probants et convaincants, M. A... n'est pas fondé à soutenir que sa demande de réexamen ne présentait pas un caractère abusif au sens du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, par suite, il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement avant que la Cour nationale du droit d'asile n'ait statué sur son recours ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que, dès lors qu'il pouvait légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, M. A... ne peut utilement soutenir que cette mesure d'éloignement porte atteinte au " droit d'asile ", qui constitue une liberté fondamentale ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ; que, faute de préciser quel droit ou liberté reconnu par la convention aurait été violé, M. A... ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance de ces stipulations ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
11. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, les éléments produits par M. A...à l'appui de ses allégations ne suffisent pas à établir la réalité et la gravité des risques auxquels il prétend être personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'au surplus, sa demande d'asile a été rejetée à deux reprises tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A...doivent être rejetées ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...demande pour son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
M. Meillier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
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N° 14LY03744