Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2015 et un mémoire enregistré le 9 mai 2016, Mme D..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 avril 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- la décision contestée ne permet pas d'identifier son signataire ;
- le préfet a commis une erreur de fait et méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 14 janvier 2016, le préfet de l'Ardèche conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Savouré.
1. Considérant que Mme D..., ressortissante arménienne née en 1968, est entrée irrégulièrement en France le 11 août 2013 selon ses déclarations ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 18 décembre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 novembre 2014 ; que par arrêté du 1er juillet 2014, le préfet de l'Ardèche a, en conséquence, refusé de lui octroyer un titre de séjour et a assorti ce refus de décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que Mme D... relève appel du jugement du 2 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors en vigueur, reprises aujourd'hui à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, toute décision prise par une autorité administrative doit comporter, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ;
3. Considérant que la qualité du signataire de l'arrêté litigieux ainsi que le prénom de ce dernier sont illisibles, de sorte que la requérante est fondée à soutenir que cet acte ne satisfait pas aux exigences prescrites par les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux ;
Sur les conclusions à fin d'injonction:
5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; que l'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;
6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. (...) " ;
7. Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement, eu égard au motif sur lequel elle repose, que le préfet de l'Ardèche délivre à Mme D...une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa situation dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la notification de cet arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que la requérante a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1409598 du tribunal administratif de Lyon du 2 avril 2015 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Ardèche du 1er juillet 2014 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Ardèche de délivrer à Mme D...une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation administrative dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me B...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouse D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Privas.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 novembre 2016.
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N° 15LY02453