Par un jugement n° 1601964 du 4 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 24 février 2017, présentée pour M. B..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1601964 du tribunal administratif de Lyon du 4 novembre 2016 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois, en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations du 6) de l'article 7 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine ; il est entaché d'une erreur de droit en ce que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ; il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son droit à une vie privée et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence.
Par un mémoire, enregistré le 26 mars 2018, et non communiqué, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 janvier 2017 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité algérienne, né le 9 octobre 1979 à Batna (Algérie), entré irrégulièrement en France le 19 juillet 2013 selon ses déclarations, a sollicité, dans un premier temps, l'asile, qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 19 novembre 2013, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 19 décembre 2014. Il a ensuite sollicité, le 22 mai 2015, la délivrance d'un certificat de résidence, sur le fondement du 6) de l'article 7 de l'accord franco-algérien, en se prévalant de son état de santé. Par des décisions du 31 décembre 2015, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination pour l'exécution de cette mesure d'éloignement. M. B... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".
3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des stipulations précitées du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Si le préfet n'est pas lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, il lui appartient néanmoins, lorsque ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays dont il est originaire, de justifier des éléments, relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, qui l'ont conduit à considérer, nonobstant l'avis médical émis par ledit médecin de l'agence régionale de santé, que le demandeur ne remplissait pas les conditions posées par les stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé.
4. Le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, le 10 juillet 2015, que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine et que les soins doivent être poursuivis pendant douze mois. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été traité pour un état de stress post-traumatique avec un état dépressif majeur et des troubles schizophréniques qui nécessitent un traitement antidépresseur, anxiolytique et antipsychotique ainsi qu'un suivi psychothérapeutique régulier. S'il n'est pas contesté que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le préfet du Rhône a cependant estimé, contrairement au médecin de l'agence régionale de santé, que M. B... pouvait avoir effectivement accès en Algérie à un traitement approprié à sa pathologie. M. B... conteste la disponibilité en Algérie des médicaments lui ayant été prescrits, et, en particulier, parmi les trois spécialités médicamenteuses qui lui sont prescrites, celle du Valdoxan dont la substance active est l'agomélatine et il produit une lettre du laboratoire Servier mentionnant que le Valdoxan sous son format 25 mg n'est pas disponible en Algérie. Toutefois, le préfet s'est fondé notamment sur des renseignements fournis par le consulat général de France à Alger en date du 21 octobre 2013 et la déclaration du ministre de la santé du gouvernement algérien, citée dans le rapport du 3 novembre 2011 de l'Agence de gestion des frontières du ministère de l'intérieur britannique, lesquels démontraient le sérieux et les capacités des institutions algériennes à traiter la majorité des maladies courantes. Il a aussi fourni la nomenclature des produits pharmaceutiques établie au 30 juin 2015. Il ressort des pièces produites par le préfet qu'il existe en Algérie plusieurs établissements hospitaliers disposant d'un service spécialisé en psychiatrie et qu'y sont commercialisés des médicaments antidépresseurs, anxiolytiques et neuroleptiques. Si M. B... soutient que le traitement de sa pathologie nécessite une combinaison thérapeutique particulière, il n'apporte aucun élément de nature à établir que les molécules dont fait état le préfet et distribuées en Algérie ne seraient pas médicalement adaptées au traitement de sa propre pathologie. M. B... n'apporte pas d'éléments remettant en cause la liste de structures hospitalières psychiatriques du pays transmise par le préfet en première instance et la capacité de telles structures à prendre en charge les maladies psychiatriques et psychologiques, dont la pathologie de l'intéressé, notamment lors d'hospitalisations. Les documents généraux produits n'établissent pas davantage des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêchant d'accéder effectivement audit traitement. Par ailleurs, le préfet du Rhône a également produit en première instance des éléments suffisamment probants établissant qu'il existe en Algérie un système de santé fondé sur la gratuité des soins, avec une couverture universelle reposant sur une sécurité sociale obligatoire et une aide médicale d'État. Il résulte de ce qui précède que, dès lors que M. B... peut bénéficier de façon effective d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 précité de l'accord franco-algérien, en refusant à l'intéressé un titre de séjour sur ce fondement.
5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation de M. B....
6. En dernier lieu, les moyens tirés, d'une part, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, d'autre part, d'une erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige, déjà soulevés en première instance, doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ".
8. Ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet du Rhône a refusé, le 31 décembre 2015, la délivrance d'un titre de séjour à M. B.... Ainsi, à la date de la décision litigieuse, celui-ci était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté.
9. En second lieu, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige doit être écarté pour le motif retenu par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
10. Il résulte de l'examen de la légalité des décisions de refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 avril 2018.
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N° 17LY01005