2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privé et familiale " sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation sous les mêmes conditions d'astreinte et, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.
Par le jugement n° 1702985 du 24 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2017, Mme C...épouseB..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif du 24 juillet 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 3 avril 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale ", de lui restituer son passeport, et à défaut sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de lui restituer son passeport et, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans l'attente du réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le tribunal a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en retenant qu'elle ne peut se prévaloir des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié au motif de ce qu'elle entrait dans le champ d'application du regroupement familial alors que, par une décision du 16 décembre 2016, le préfet de l'Isère a rejeté la demande de regroupement familial présenté par son époux à son bénéfice ; cette circonstance l'excluait du bénéfice du regroupement familial ;
- les premiers juges n'ont pas pris en considération l'ensemble des éléments caractérisant sa situation dès lors que les décisions sont de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle et familiale puisqu'elles ont pour effet de le séparer de son époux et de leur enfant et ce alors qu'elle ne peut bénéficier du regroupement familial ;
- les décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle a entretenu une relation affective avec son époux avant de se marier le 1er février 2016 et qu'un enfant est né de cette union le 23 mai 2016 ; son époux réside régulièrement et travaille en France depuis 1999 ; son époux est également le père d'un enfant de nationalité française, né le 14 juin 2001 ; il accueille cet enfant chez lui les week-ends et la moitié des vacances scolaires ; elle entretient de bonnes relations avec cet enfant ; elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions méconnaissent l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que les décisions ont pour effet de séparer les époux d'une part et les enfants mineurs de l'un ou l'autre des parents d'autre part ou de séparer la fratrie alors que M. B..., résidant régulièrement en France depuis plus de quinze ans, est père d'un enfant français encore mineur et à l'égard duquel il exerce ses droits de visite et d'hébergement ;
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 12 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Caraës.
1. Considérant que Mme C..., ressortissante algérienne née le 6 mai 1987, est entrée en France le 12 décembre 2015 sous couvert d'un visa de court séjour ; que, le 1er février 2016, elle a épousé un compatriote, M.B..., qui a introduit, le 4 mars 2016, une demande de regroupement familial en sa faveur ; que, par une décision du 16 décembre 2016, le préfet de l'Isère a rejeté cette demande au motif que Mme C...épouse B...était présente en France ; que, le 19 janvier 2017, cette dernière a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, par un arrêté du 3 avril 2017, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que Mme C...épouse B...relève appel du jugement du 24 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 3 avril 2017 ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
3. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser l'admission au séjour ou de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut, en revanche, tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
4. Considérant que Mme C...fait valoir qu'elle s'est mariée le 1er février 2016 avec M.B..., un compatriote titulaire d'une carte de résident en France ; qu'ils ont eu un enfant né le 23 mai 2016 et que son époux est le père d'un enfant français issu d'une précédente union et sur lequel il exerce l'autorité parentale ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme C...épouse B...ne peut se prévaloir d'une vie commune avec son époux suffisamment stable et ancienne dès lors qu'à la date de la décision attaquée, ils ne résidaient ensemble que depuis moins de deux ans ; que son époux, qui a également deux enfants vivant en Algérie, n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française ; que, dans ces conditions, et alors même que, par une décision du 16 décembre 2016, la demande de regroupement familial déposée par M. B...a été rejetée par le préfet de l'Isère au motif que son épouse se maintenait irrégulièrement en France, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que les décisions contestées, lesquelles ne sont pas fondées sur la seule considération qu'elle entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial mais ont également pris en compte sa situation familiale, ont porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, et ont ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leur conséquences sur la situation administrative de l'intéressée ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (... ) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale" est délivré de plein droit: 1(... ) 5). Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et .familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ( ...) " ;
6. Considérant que si le préfet de l'Isère a rejeté, le 16 décembre 2016, une demande de regroupement familial au motif de la présence de l'intéressée en France, il n'en demeure pas moins que cette dernière, comme le préfet l'a retenu à bon droit dans son arrêté du 3 avril 2017, entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié doit être écarté comme inopérant ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d' institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;
8. Considérant que, compte tenu du jeune âge de l'enfant de la requérante et de l'existence d'une procédure de regroupement familial, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle elles ont été prises, les décisions attaquées portaient atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de Mme C...et de l'autre enfant de nationalité française de son époux ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les décisions litigieuses ont méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MmeA... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 avril 2018.
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N° 17LY03209