1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter du 7 juillet 2017 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 013 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et, par suite, irrégulier ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et méconnaît le principe du contradictoire ;
- le préfet a méconnu le l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990.
Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2016, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant est inopérant, le requérant étant majeur ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 7 novembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 novembre 2016.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2016 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Savouré, premier conseiller ;
1. Considérant que le requérant se présente sous le nom de M. C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 7 juillet 1999 et déclare être entré en France le 30 juin 2015 ; qu'ayant consulté le fichier Visabio sur la base de ses empreintes digitales, le préfet a constaté que le requérant avait préalablement sollicité un visa auprès des autorités consulaires allemandes en Angola sous le nom de M.B..., né le 7 juillet 1989 en Angola et que la photographie d'identité figurant sur ce fichier permettait de l'identifier ; que, par arrêté du 29 juillet 2015, le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de renvoi aux motifs qu'il était entré irrégulièrement en France et n'établissait pas être mineur ainsi qu'il le prétendait ; que M. C... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix huit ans (...) " ;
3. Considérant que l'article 47 du code civil dispose : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. " ;
4. Considérant que selon les dispositions de l'article R. 611-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est autorisée la création (...) d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé VISABIO (...). Ce traitement a pour finalité de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, en prévenant les fraudes documentaires et les usurpations d'identité (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 611-9 de ce code : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé prévu à l'article R. 611-8 sont : / 1° Les images numérisées de la photographie et des empreintes digitales des dix doigts des demandeurs de visas, collectées par les chancelleries consulaires et les consulats français équipés du dispositif requis. (...) / 2° Les données énumérées à l'annexe 6-3 communiquées automatiquement par le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé Réseau mondial visas (...) lors de la demande et de la délivrance d'un visa. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 611-10 du même code : " Les données à caractère personnel mentionnées au 1° de l'article R. 611-9 peuvent également être collectées (...) : 1° Par les chancelleries consulaires et les consulats des autres Etats membres de l'Union européenne (...) " ; qu'au nombre, des données énumérées à l'annexe 6-3 susmentionnée figurent celles relatives à l'état civil, notamment le nom, la date et le lieu de naissance et aux documents de voyage du demandeur de visa ainsi que ses identifiants biométriques ;
5. Considérant que l'article 47 précité du code civil prévoit une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays ; que, cependant, cette circonstance n'interdit pas aux autorités françaises de s'assurer de l'identité de la personne qui se prévaut de cet acte ; que, par ailleurs, il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ; que cette preuve peut être apportée par tous moyens et notamment par les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé dénommé Visabio, qui sont présumées exactes ; qu'il appartient à l'intéressé d'apporter les éléments permettant de renverser cette présomption ;
6. Considérant que le préfet du Puy-de-Dôme fait valoir, d'une part, que l'acte d'état civil produit par le requérant sous le nom de M.C..., mentionnant une naissance le 7 juillet 1999, a été regardé comme n'ayant aucune valeur juridique par la cellule de fraude documentaire de la DZPAF sud est de Lyon ; qu'il indique, d'autre part, que le relevé des empreintes digitales du requérant lui a permis de constater, après consultation du fichier Visabio, que l'intéressé avait demandé la délivrance d'un visa auprès du consulat d'Allemagne en Angola, sous le nom de M. B..., né le 7 juillet 1989 et que la photographie d'identité y figurant correspond à sa physionomie ; que, toutefois, le requérant se prévaut, pour la première fois en appel, d'un jugement déclaratif de naissance rendu le 5 janvier 2016 confirmant l'état civil figurant dans sa première attestation et fait valoir qu'il a été transcrit par un officier d'état civil et légalisé par un office notarial en République démocratique du Congo ; qu'il produit également un bulletin scolaire et une attestation de scolarité établis à Kinshasa, mentionnant qu'il était inscrit dans une école primaire au cours de l'année 2011-2012 ; qu'il affirme qu'il a fait usage de fausses pièces d'identité, fournies par un passeur, lors de sa demande de visa afin de faciliter l'entrée sur le territoire français ; qu'aucun de ces éléments n'est sérieusement contesté par le préfet ; que si l'examen osseux indique que le requérant est âgé de dix-neuf ans et ne confirme donc pas l'âge de seize ans qu'il allègue, il ne confirme pas non plus l'âge de vingt-six ans figurant dans le fichier Visabio, alors d'ailleurs que le médecin qui a pratiqué cet examen rappelle que la maturation osseuse peut avoir de grandes variations individuelles, y compris en dehors de tout contexte pathologique ; que, dans ces conditions, M. C... est fondé à se prévaloir du bénéfice de la présomption instituée par l'article 47 du code civil, d'où il suit qu'il était mineur à la date de l'arrêté contesté et que, par suite, le préfet du Puy-de-Dôme a méconnu l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;
8. Considérant que l'annulation de l'arrêté litigieux n'implique pas la délivrance à M. C... d'un titre de séjour, ainsi qu'il le demande ;
9. Considérant que M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Morel renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 29 juillet 2015 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à Me Morel, avocat de M. C..., la somme de 1 000 euros, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 mars 2017.
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N° 15LY03838