Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2020, M. A... B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001073 du 18 septembre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2019 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois sinon une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour a méconnu l'article 6-1 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il justifie résider habituellement en France depuis douze ans, le préfet ne pouvant écarter des attestations d'achats de titre de transport qui constituent des moyens de preuve de son séjour ; le tribunal a jugé à tort qu'il ne produisait pas de preuves suffisantes pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014 alors qu'il a produit d'autres preuves de son séjour habituel ;
- cette même décision a méconnu l'article 6-5 de l'accord précité et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il a déjà vécu en France dans les années quatre-vingt avant de revenir en 2005 et qu'il est parfaitement intégré dans la société française ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et méconnait l'article 8 de la convention précitée ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie d'exception d'illégalité des décisions précédentes ;
M. B... bénéficie de l'aide juridictionnelle totale selon décision du 23 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gayrard, président assesseur,
- et les observations de Me E..., substituant Me C..., avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 9 décembre 2019, le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... B..., né le 13 octobre 1956 en Algérie, et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par un jugement du 18 septembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an, portant la mention vie privée et familiale, est délivré de plein droit : (...) 1. au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autorisation de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. En premier lieu, en estimant que les attestations d'achats de titre de transport ne pouvaient être regardées comme des preuves de présence en France, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit mais a seulement porté une appréciation sur leur caractère insuffisamment probant dès lors que de telles attestations peuvent être obtenues à distance et sans justificatif d'identité.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que, comme l'a justement retenu le tribunal administratif de Lyon, les éléments versés pour attester de la résidence habituelle du requérant au cours des années 2010 à 2014 sont insuffisants dès lors que l'intéressé ne produit que des attestations d'une association indiquant seulement son passage régulier au cours de ces années, d'une attestation d'un commerçant pour l'année 2013, d'un ticket de caisse et d'une ordonnance médicale pour 2012 et d'une attestation manuscrite se bornant à indiquer l'expiration en 2010 de la carte de transport de l'intéressé. En outre, les seules attestations d'association produites pour 2009, 2015 et 2016 sont également insuffisantes pour prouver la résidence habituelle de l'intéressé au cours de ces années. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaitrait les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
5. En troisième lieu, si M. B... fait valoir qu'il a déjà résidé en France au début des années quatre-vingt, il n'établit pas la durée de ce premier séjour. S'il déclare vivre en France depuis son entrée sur le territoire le 18 juin 2005, il découle du point précédent qu'il ne peut être regardé comme ayant résidé habituellement sur le territoire national pendant la période de 2009 à 2016. L'intéressé est célibataire et sans charge de famille. Il n'établit pas être dénué de toute attache familiale en Algérie, pays dans lequel il a vécu l'essentiel de son existence. La seule indication d'activités bénévoles auprès d'associations ne suffit pas à caractériser son intégration dans la société française. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour porterait une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaitrait ainsi les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ou de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. En quatrième lieu, il résulte des points précédents que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette dernière décision méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En dernier lieu, il découle du point précédent que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 9 décembre 2019 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination, ainsi que par voie de conséquence, celles à fin d'injonction ou présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu également de rejeter ses conclusions d'appel à fins d'injonction ou tendant à mettre à la charge de l'État une somme au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2021.
N° 20LY03472 2