Par une requête enregistrée le 16 juillet 2020, M. B..., représenté par la SCP Robin-A..., agissant par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1904859 du 20 février 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné du préfet du Rhône du 12 avril 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;
- les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :
- les décisions sont illégales en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 14 mars 1974, est entré en France le 11 octobre 2003 sous couvert d'un visa de court séjour. Il a présenté le 1er juin 2017 une demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des 1) et 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 12 avril 2019, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois. M. B... relève appel du jugement du 20 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il porte refus de titre de séjour, l'oblige à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Sur la demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) ".
3. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. B... à l'aide juridictionnelle.
Sur le refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ".
5. Si M. B... produit en première instance et en appel des attestations de proches émises entre 2015 et 2017, dont certaines évoquent sa présence sur le sol français depuis plusieurs années, ces éléments, peu probants et insuffisamment circonstanciés, ne sauraient suffire, à eux seuls, à établir la résidence habituelle en France du requérant depuis dix ans à la date du refus de titre de séjour contesté. Les autres pièces produites, eu égard à leur nature, à leur caractère épars et à leur nombre limité, ne sont susceptibles de prouver qu'une présence ponctuelle de l'intéressé sur le territoire national entre 2009 et 2019. Dans ces conditions, le requérant ne justifie pas, au 12 avril 2019 d'une résidence en France depuis plus de dix ans. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté.
6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
7. M. B... fait valoir que depuis son entrée sur le territoire français en 2003, il vit auprès de membres de sa fratrie avec lesquels il a développé des liens étroits et qu'il a noué des relations sociales et amicales en France. Toutefois, comme il a été dit au point 5, M. B..., célibataire et sans enfant, n'établit pas résider habituellement en France depuis dix ans à la date de la décision contestée. Le requérant, qui a au demeurant fait l'objet de trois précédentes mesures d'éloignement, ne justifie d'aucune insertion professionnelle ni ne démontre une insertion sociale particulière. En outre, il ne conteste pas avoir conservé des attaches privées et familiales en Algérie, où vivent notamment deux des membres de sa fratrie ainsi que son père, et où il a lui-même vécu pour l'essentiel. Ainsi, eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, le préfet du Rhône n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire :
8. En premier lieu, les moyens invoqués à l'encontre de la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence ayant été écartés, M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
9. En second lieu, il résulte des circonstances de fait énoncées au point 7, qu'en obligeant M. B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Il résulte de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi. Cette dernière décision n'ayant été prise ni en application ni sur le fondement du refus de titre de séjour ni de la décision de fixation du délai de départ volontaire, M. B... ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ces décisions à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : M. B... est admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2021.
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N° 20LY01861