Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 avril 2021, M. B..., représenté par Me Cadoux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- il entrait de plein droit dans le champ des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 de sorte qu'il ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois :
- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;
- il justifie de circonstances humanitaires de sorte que les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 20 juin 2002, est entré en France le 3 juillet 2019 sous couvert d'un visa de court séjour. Il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance à compter du 21 janvier 2020. Le 9 janvier 2021, il a été interpellé par la gendarmerie nationale alors qu'il se livrait à une activité de " rodéo urbain ", sur un scooter dépourvu d'immatriculation et non couvert par une assurance. Le 11 janvier 2021, le préfet du Rhône, par deux arrêtés distincts, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire pour une durée de dix-huit mois et, d'autre part, l'a assigné à résidence. M. B... relève appel du jugement du 21 janvier 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés
Sur les moyens communs aux décisions attaquées :
2. M. B... invoque en appel les moyens, déjà soulevés devant le tribunal administratif, tirés du défaut de motivation des décisions litigieuses et du défaut d'examen particulier de sa situation, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation que le magistrat désigné a portée sur les mérites de ces moyens, aux points 4 et 5 du jugement attaqué. Dès lors, Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par le premier juge, que la cour fait siens.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. M. B..., entré en France en juillet 2019 alors qu'il était âgé de dix-sept ans, fait valoir qu'il a été confié jusqu'à sa majorité aux services de l'aide sociale à l'enfance de la métropole de Lyon par un jugement du juge des enfants du tribunal judiciaire de Lyon du 21 janvier 2020, qu'il a conclu un contrat jeune majeur avec la métropole le 24 juin 2020 et a entrepris de suivre une formation de technicien d'assistance en informatique à compter du 1er décembre 2020. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... a été interpellé le 21 novembre 2019 pour des faits de vol et rébellion, le 26 décembre 2019 pour des faits de vol aggravé avec violences, le 9 octobre 2020 pour des faits de vol en réunion avec violences et le 9 janvier 2021 pour des faits de conduite d'un véhicule non immatriculé et non couvert par une assurance, d'usage de stupéfiants et de non-respect du couvre-feu sanitaire, alors qu'il se livrait à une activité de " rodéo urbain ". Il ressort des pièces du dossier, notamment des indications portées sur son contrat jeune majeur, qu'il a été incarcéré du 27 décembre 2019 au 11 mai 2020 à la maison d'arrêt de Bonneville pour des faits de violences. L'intégration alléguée dans la société française est contredite par l'ensemble de ces faits. En outre, M. B..., célibataire et sans charge de famille et qui ne justifie pas avoir accompli des démarches en vue de régulariser sa situation au regard de son droit au séjour à sa majorité, est entré récemment sur le territoire français. Il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie, où il a vécu pour l'essentiel et où résident notamment ses parents. Dans ces conditions, la décision faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien faisaient obstacle à ce qu'une mesure d'éloignement soit prise à son encontre ou que cette mesure méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la légalité de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
5. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision le privant d'un délai de départ volontaire.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est maintenu en France après l'expiration de son visa sans solliciter de titre de séjour. Si l'intéressé, majeur depuis le 20 juin 2020, soutient qu'à la date de la décision attaquée, le 11 janvier 2021, il s'apprêtait à déposer une demande de titre de séjour, il ne justifie pas des démarches qu'il allègue. Les circonstances qu'il ne s'est pas soustrait à une précédente mesure d'éloignement, qu'il justifie de garanties suffisantes de représentation et que son comportement ne constituerait pas une menace pour l'ordre public, à les supposer établies, ne sauraient constituer des circonstances particulières au sens du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, en l'absence de circonstance particulière, sa situation entrait dans le cas visé au b) du 3° du II de cet article, alors en vigueur, permettant de présumer établi le risque de soustraction à la mesure d'éloignement. Par suite, le préfet du Rhône n'a pas fait une inexacte application des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois :
8. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant de lui accorder un délai de départ volontaire n'étant pas illégales, M. B... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de ces décisions à l'encontre de celle lui interdisant le retour sur le territoire français.
9. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
10. Les circonstances que M. B... a été pris en charge par les services d'aide sociale à l'enfance et qu'il suivait une formation à la date de la décision attaquée ne peuvent être regardées comme constituant des circonstances humanitaires au sens du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La présence de M. B..., qui a été interpellé, ainsi qu'il a été dit plus haut, à quatre reprises sur une brève période et incarcéré du 27 décembre 2019 au 11 mai 2020 pour des faits de violences, constitue une menace pour l'ordre public. En outre, l'intéressé, célibataire et sans enfant, n'établit pas disposer en France d'attaches privées et familiales intenses, stables et anciennes, par la seule présence de sa sœur. Dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.
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N° 21LY01249