Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 août 2019, l'association " Juristes pour l'enfance ", représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 183008 du 2 juillet 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler la décision prise par le directeur de l'espace de réflexion éthique régional Auvergne Rhône-Alpes (EREARA) de porter au programme des manifestations organisées dans le cadre des états généraux de la bioéthique une journée annoncée par la clinique GIREXX ;
3°) de condamner l'EREARA une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête initiale visait la décision prise par l'EREAEA d'inscrire au programme des manifestations dans le cadre des états généraux de la bioéthique l'intervention de la clinique GIREXX et non la décision de tenir la réunion ; cette décision n'a fait l'objet d'aucun retrait, ni abrogation ; la circonstance que la réunion n'ait pas eu lieu à l'initiative de la clinique GIREXX est sans incidence ; dès lors, en soulevant d'office l'irrecevabilité de sa demande, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité ;
- le jugement est irrégulier car le tribunal administratif a mis en cause l'agence régionale de santé et non l'EREARA représenté par son directeur ; cette dernière a acquiescé aux faits en application de l'article R. 612-5 du code de justice administrative ;
- la décision attaquée est illégale pour les motifs suivants : incompétence de l'EREARA et violation du principe de neutralité.
Par des mémoires, enregistrés les 2 et 23 novembre 2020, M. D... B..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que l'association " Juristes pour l'enfance " soit condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable faute pour l'association requérante de prouver l'enregistrement de ses statuts en préfecture ; elle ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre la décision attaquée au vu de son objet social ;
- les moyens soulevés par la requérante sont mal fondés.
Par un mémoire, enregistré le 7 décembre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête :
Il fait valoir que la requête est irrecevable car visant un acte ne faisant pas grief et qui a été retiré avant l'introduction du recours.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gayrard, président assesseur ;
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique ;
- les observations de Me C..., avocat de l'association requérante ;
- et les observations de Me A..., avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique, précédée d'un débat public sous forme d'état généraux, l'article L. 1412-6 du code de la santé publique a institué des " espaces de réflexion éthique " au niveau régional, non dotés de la personnalité juridique, constituant des lieux de formation, de documentation, de rencontres et d'échanges interdisciplinaires sur les questions éthiques dans le domaine de santé ; ils participent notamment à l'organisation de débats publics afin de promouvoir l'information et la consultation des citoyens sur les questions de bioéthique. A ce titre, l'espace de réflexion éthique régional Auvergne Rhône-Alpes (EREARA) a inscrit parmi les manifestations organisées dans le cadre des états généraux de la bioéthique une manifestation intitulée : " PMA : 6° journée d'échanges pour les familles " organisée par la clinique GIREXX et prévue pour se dérouler le 24 mars 2018 à Lyon. L'association " Juristes pour l'enfance " a demandé le 19 avril 2018 au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision prise par le directeur de l'EREARA d'inscrire cette manifestation dans le cadre des états généraux de la bioéthique. Par jugement du 2 juillet 2019, dont l'association précitée relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme irrecevable dès lors que la manifestation avait été annulée.
Sur l'intervention de M. B... :
2. L'intervention de M. B..., directeur de l'EREARA, auteur de l'acte attaqué, est admise.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive. Lorsque le retrait ou l'abrogation de l'acte, dans les conditions sus rappelées, est intervenu avant la saisine du juge, le recours contre cette décision est alors irrecevable et doit être rejeté.
4. Il est constant que la manifestation intitulée " PMA : 6° journée d'échanges pour les familles " prévue le 24 mars 2018 a finalement été annulée. Par suite, l'acte par lequel le directeur de l'EREARA a inscrit cette manifestation parmi celles organisées dans le cadre des états généraux de la bioéthique, même à le supposer comme revêtant un caractère décisoire, doit être regardé comme ayant été rapporté avant l'enregistrement de la requête de l'association " Juristes pour l'enfance " devant le greffe du tribunal administratif de Lyon. Par suite, les conclusions de l'association requérante tendant à l'annulation de l'acte précité sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.
5. Il découle de ce qui précède que l'association " Juristes pour l'enfance " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EREARA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par l'association " Juristes pour l'enfance " et non compris dans ses dépens. M. B..., intervenant volontaire, n'étant pas partie à la présente instance, n'est pas recevable à demander à la cour de condamner l'association requérante au versement d'une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association " juristes pour l'enfance " est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Juristes pour l'enfance ", à M. B..., et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2021.
N° 19LY03398 2