Par un jugement n° 1509455 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 22 avril 2016, présentée pour M. D...F..., domicilié..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- elle est entachée d'un vice de procédure en raison de l'incompétence de l'auteur de l'avis médical rendu par un médecin de l'agence régionale de santé ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien, dès lors que la population algérienne en générale ne peut pas avoir accès à un traitement sérieux et adapté aux pathologies psychiatriques graves en Algérie et qu'il a besoin d'un suivi psychiatrique très régulier et doit être fréquemment hospitalisé, ce qui apparait irréalisable en Algérie ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à la durée de sa résidence en France, de son mariage, et de la présence d'une partie de sa famille ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire, enregistré le 8 novembre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le requérant, qui ne produit aucun élément de nature à remettre en cause l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique, qui était compétent, ne démontre pas ne pas pouvoir retourner et être suivi dans son pays, n'est pas fondé à soutenir que la décision contreviendrait aux stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ; il ne saurait faire valablement valoir que cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2016 le rapport de M. Seillet, président-assesseur.
1. Considérant que M.F..., ressortissant algérien né le 15 octobre 1985 à Arzew (Algérie), est entré en France le 28 juin 2010, selon ses déclarations ; que, par un premier arrêté du 21 février 2011, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; qu'il a alors sollicité, le 5 septembre 2012, un certificat de résidence d'un an en invoquant son état de santé, sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 ; que, par un arrêté du 20 décembre 2013, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que ces décisions ont été annulées par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 avril 2014, confirmé par un arrêt de la cour du 6 janvier 2015 ; que M. F..., qui s'est marié, le 8 février 2014, à Montpellier, avec une ressortissante française, MmeC..., a sollicité de la préfecture de l'Hérault un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, qui lui a été refusé par une décision préfectorale du 2 juin 2014 ; que sa demande d'annulation de cette décision a été rejetée par le tribunal administratif de Montpellier, par un jugement du 17 octobre 2014, puis par la cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 20 février 2015 ; qu'après avis du médecin de l'agence régionale de santé, qui a estimé, le 9 juin 2015, que M. F... pouvait bénéficier d'un traitement en Algérie, pays vers lequel il pouvait voyager sans risque, le préfet du Rhône a, par un arrêté du 15 octobre 2015, refusé de délivrer un titre de séjour à M.F..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ; que M. F... fait appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions préfectorales ;
Sur la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision en litige a été précédée d'une consultation du médecin de l'agence régionale de santé, qui s'est prononcé le 9 juin 2015, et que le Dr A...E..., signataire de cet avis, avait, en tout état de cause, été désignée pour ce faire par une décision du directeur régional de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes du 6 mars 2015 ; que, dès lors, le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...). / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte de l'avis rendu le 9 juin 2015 par le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes que l'état de santé de M. F... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel il peut voyager sans risque ; que les éléments généraux sur la situation de l'Algérie dont se prévaut M. F..., en faisant valoir que le nombre de psychiatres par habitant y est très inférieur à celui de la France, que seules quelques grandes villes sont en mesure de proposer les médicaments adéquats pour traiter les troubles mentaux ou du comportement et qu'il existe un risque de rupture de stocks, ne sont pas de nature à contredire l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé et du préfet du Rhône ni à établir qu'il ne pourrait effectivement bénéficier de soins appropriés à son état de santé en Algérie ; que les pièces médicales également produites par le requérant, attestant de consultations auprès du centre hospitalier Le Vinatier à Bron (Rhône) au cours des années 2011 et 2012, et auprès du DrB..., psychiatre, en 2013, ne l'établissent pas davantage ; que, par suite, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas les stipulations précitées du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
5. Considérant, en dernier lieu, que les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de la violation des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter, alors d'ailleurs que M. F... a, dans le formulaire de demande de titre de séjour qu'il a rempli le 17 février 2015, indiqué qu'il réside à Lyon, ce qui impliquerait qu'il ne vive pas avec son épouse, laquelle réside à Montpellier ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. F... ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
7. Considérant, en second lieu, que les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés pour les motifs retenus par le premier juge et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F... ne peut, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, exciper de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
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N° 16LY01399