Par un jugement n° 1501906 du 4 février 2016 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 juin 2016, présentée pour Mme C...B..., domiciliée..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1501906 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 février 2016 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées, outre la décision fixant le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un certificat de résidence "vie privée et familiale" dans un délai de 8 jours, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le signataire des décisions en litige était incompétent pour signer ces décisions, et il appartiendra au préfet de justifier de ce que l'auteur de ces décisions bénéficiait d'une délégation de signature établie en bonne et due forme et que cette délégation de signature était régulièrement publiée ;
- la décision de refus de titre est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- le refus de titre méconnaît les stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, en ce que le préfet a, en subordonnant la délivrance du premier certificat de résidence algérien à la communauté de vie effective des époux, ajouté une condition non prévue par le texte ;
- le refus de titre méconnaît les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistré le 16 septembre 2016, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le signataire des décisions en litige, secrétaire général de la préfecture du Puy-de-Dôme, a reçu délégation de signature par un arrêté préfectoral n° 14 du 27 octobre 2014, paru au recueil spécial n° 37 du 27 octobre 2014 ;
- la décision de refus de titre est valablement motivée ;
- la requérante ne peut invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où les faits de violences conjugales ne sont pas établis ;
- dès lors que la communauté de vie a cessé entre les époux dès le mois de novembre 2014 la requérante ne remplit pas les conditions de délivrance d'un certificat de délivrance de dix ans prévues par les stipulations combinées des articles 7 bis et 6 dernier alinéa de l'accord franco-algérien ;
- la décision de refus de titre n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistré le 16 novembre 2016, présenté pour MmeB..., elle maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2016 le rapport de M. Seillet, président-assesseur.
1. Considérant que Mme C...E..., née le 16 juillet 1985 à Kenchela, en Algérie, pays dont elle possède la nationalité, y a épousé, le 24 juillet 2013, M. D...B..., de nationalité française ; qu'entrée régulièrement en France, le 14 août 2014, sous couvert d'un visa de 90 jours " familleF... ", elle a sollicité, le 22 septembre 2014, la délivrance d'un certificat de résidence algérien " vie privée et familiale " en se prévalant de sa qualité de conjoint de Français ; que par une décision du 29 avril 2015, le préfet du Puy-de-Dôme a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel Mme B... serait éloignée ; que Mme B... fait appel du jugement du 4 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions préfectorales de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français et demande, en outre, l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;
Sur le moyen commun tiré de l'incompétence du signataire des décisions en litige :
2. Considérant que les décisions du 29 avril 2015 contestées ont été signées par M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture du Puy-de-Dôme, qui s'est vu accorder par le préfet du Puy-de-Dôme, par arrêté du 27 octobre 2014, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, une délégation de signature à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département du Puy-de-Dôme, à l'exception de certaines mesures parmi lesquelles ne figurent pas les décisions refusant un titre de séjour à un étranger, faisant obligation à ce dernier de quitter le territoire français et désignant le pays de destination d'une mesure d'éloignement prise à son encontre ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, que le moyen, déjà soulevé en première instance, tiré d'une insuffisante motivation de la décision, doit être écarté pour le motif retenu par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit (...) a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 dudit accord : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissants algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que la délivrance d'un certificat de résidence valable dix ans est subordonnée à une communauté de vie entre les époux ; que Mme B..., dont il ressort des pièces du dossier, et notamment des récépissés de demande de carte de séjour qu'elle produit, qu'elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence valable dix ans, n'avait plus, à la date de la décision de refus de séjour en litige, de communauté de vie avec son époux depuis le mois de novembre 2014 ; qu'ainsi, elle ne pouvait prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien en refusant, pour ce motif, tiré d'une absence de communauté de vie, de délivrer le titre sollicité par la requérante, qui ne peut par ailleurs utilement se prévaloir devant la cour des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, sur le fondement desquelles sa demande de titre n'a été ni fondée ni examinée ;
6. Considérant, en troisième lieu, que les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France ; qu'une ressortissante algérienne ne peut, dès lors, utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue ; qu'il appartient toutefois au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il revient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la plainte déposée par Mme B..., le 1er décembre 2014, contre son époux, pour des faits de violences sur conjoint, a fait l'objet d'un classement sans suite par le parquet du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand au motif d'une infraction insuffisamment caractérisée ; que ni le certificat médical rédigé le 29 novembre 2014 par le service des urgences du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, mentionnant " des griffures sur le bras droit ", ni les attestations produites par la requérante, en particulier celles rédigées par Mme A...qui n'affirme pas avoir été témoin de violences, ne sont de nature à établir la réalité des faits imputés à son conjoint ; que dès lors, la décision par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B..., qui ne peut, ainsi qu'il a été dit, utilement soulever un moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;
8. Considérant, en dernier lieu, que le moyen, déjà soulevé en première instance, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté pour le motif retenu par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut effectivement exciper, au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
10. Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'atteinte au respect de son droit à une vie privée et familiale doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés pour écarter ce moyen en tant qu'il était soulevé au soutien des conclusions de la requête dirigées contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut effectivement exciper, au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, au demeurant nouvelles en appel et dès lors irrecevables, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français ; que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'atteinte au respect de son droit à une vie privée et familiale doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés pour écarter ce moyen en tant qu'il était soulevé au soutien des conclusions de la requête dirigées contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Beytout, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
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N° 16LY01888