Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 9 mars 2021, M. A... représenté par Me Huard demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du 21 juillet 2020 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, après remise sous huitaine d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé et a été pris sans examen de sa situation personnelle ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 (2° bis) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il entre dans les cas d'attribution d'un titre de séjour prononcé de plein droit ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 10 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité du jugement :
1. Aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient M. A..., il n'apparaît pas que le jugement en litige soit entaché d'une insuffisance de motivation en ce qui concerne l'analyse de ses liens avec sa famille dans le cadre du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 (2° bis) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de cette irrégularité ne peut qu'être écarté.
Sur le fond du litige :
Sur l'arrêté dans son ensemble :
2. L'arrêté contesté vise l'ensemble des textes applicables et précise les motifs de fait et de droit pour lesquels le préfet de l'Isère a refusé à M. A... le titre de séjour qu'il a sollicité sur le fondement des dispositions alors codifiées au 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet, après avoir constaté que M. A... avait été confié à l'aide sociale à l'enfance avant d'atteindre l'âge de seize ans, qu'il bénéficiait d'un avis favorable de sa structure d'accueil a, en particulier, indiqué les motifs, tenant notamment au maintien de fortes attaches familiales dans son pays d'origine et l'absence de caractère réel et sérieux de sa formation, pour lesquels, après avoir, contrairement à ce que soutient le requérant, procédé à un examen particulier et globale de sa situation, il a estimé que l'intéressé ne pouvait obtenir le titre de séjour sollicité. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen doit être écarté.
Sur le refus de séjour :
3. En premier lieu, aux termes des dispositions alors codifiées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire (...), qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".
4. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement des dispositions citées au point précédent, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été confié à l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de seize ans, qu'il a suivi une formation en vue de l'obtention d'un CAP conducteur routier, et qu'il bénéficie d'un avis favorable de sa structure d'accueil. Il en ressort, toutefois, qu'il a accumulé de nombreuses journées d'absence injustifiées et qu'il conserve des attaches familiales dans son pays d'origine où vit notamment sa mère dont il n'établit pas le décès, et sa demi-sœur, avec qui il lui appartient de renouer dès lors qu'aucune contrainte extérieure à sa volonté n'y fait obstacle. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet de l'Isère a pu, sans méconnaître les dispositions précitées, regarder comme insuffisant le bilan de la présence de M. A... au regard de son comportement en formation et de la nature des liens familiaux conservés dans son pays d'origine et le manque de sérieux manifesté dans le suivi de sa formation comme critère prépondérant de refus du titre de séjour litigieux.
6. Enfin, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs du tribunal les moyens tirés de la méconnaissance, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, que M. A... se borne à reproduire en appel.
Sur la mesure d'éloignement :
7. En premier lieu, l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour dirigée contre l'obligation de quitter le territoire doit être écartée par les motifs des points 1 à 5.
8. En second lieu, l'entrée en France de M. A... est récente et il a vécu la majorité de son existence dans son pays d'origine. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire aurait porté une atteinte excessive aux droits protégés par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 21 juillet 2020 prises à son encontre par le préfet de l'Isère. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
N° 21LY00742 2