Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2020, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 juin 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 31 décembre 2019 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, de suspendre la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que le préfet des Alpes-Maritimes se soit prononcé sur sa demande de régularisation au titre de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît son droit d'être entendu prévu par les articles 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 743-3 et L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il n'a pas reçu la notification des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
M. D... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 septembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., de nationalité nigériane, relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 31 décembre 2019 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination, en reprenant, pour l'essentiel, les moyens invoqués devant les premiers juges.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " les présidents des cours administratives d'appel (...) peuvent, (...) par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
3. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il a été pris sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vertu duquel : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 7432, (...) ". Même s'il mentionne, en son article 1er que " la demande de délivrance de titre de séjour de M. F... D... est rejetée ", l'arrêté attaqué ne peut être regardé ni comme statuant sur la demande d'asile de l'intéressé, le rejet de cette demande procédant de la décision prise par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 31 août 2018, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 9 décembre 2019, ni même comme lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, aucune demande distincte de sa demande d'asile n'ayant, du reste, été déposée par M. D.... Les conclusions du requérant dirigées contre " la décision de refus de titre " doivent donc être rejetées comme irrecevables.
4. En premier lieu, s'agissant des moyens tirés de ce que l'arrêté a été signé par une autorité incompétente et de ce qu'il est insuffisamment motivé, présentés dans les mêmes termes qu'en première instance, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux points 2, 3 et 4 de son jugement, le requérant ne faisant état en appel d'aucun élément distinct de ceux soumis à son appréciation.
5. En deuxième lieu, lorsqu'il sollicite son admission au séjour au titre de l'asile auprès du préfet, l'étranger doit être regardé comme présentant une demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-13 et du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien en France, il ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour au titre de l'asile et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne la mesure d'éloignement, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français.
6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. D... a été mis à même de faire valoir tout élément utile à sa situation personnelle et de se faire assister d'un conseil dans le cadre de sa demande d'asile et qu'il ne fait état, dans la présente instance, d'aucun élément pertinent qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance des services de la préfecture.
7. En troisième lieu, ainsi que M. D... le relève lui-même, les dispositions de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, selon lesquelles l'autorité administrative doit inviter l'étranger qui a présenté une demande d'asile à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et à déposer sa demande dans un délai fixé par décret, ne s'appliquent qu'aux demandes d'asile présentées postérieurement au 1er mars 2019, date de l'entrée en vigueur de ces dispositions, ce qui n'est pas le cas du requérant qui a présenté sa demande d'asile le 1er février 2017. Par suite, le requérant ne saurait soutenir que le préfet était tenu de lui délivrer un telle information au stade de sa demande d'asile.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) / 10° A l'étranger qui remplit les conditions prévues au second alinéa de l'article L. 316-1 ". Aux termes de l'article L. 316-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. Cette carte de séjour temporaire ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident est délivrée de plein droit à l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné ".
9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. D..., se disant victime de traite d'êtres humains et témoin dans une affaire de traite d'êtres humains et de proxénétisme dont aurait été victime sa soeur, a déposé plainte le 26 avril 2018 à l'encontre de Mme C... A... et de son mari, M. E... pour des faits de " traite d'être humain ". Il ne ressort pas de ces mêmes pièces qu'à la date de la décision attaquée, les personnes mises en cause aurait fait l'objet d'une condamnation définitive au sens du second alinéa de l'article L. 316-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, il n'est donc pas fondé à faire valoir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il serait en droit de bénéficier d'une carte de résident en application des dispositions de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, quand bien même il n'en avait pas fait la demande, cette dernière n'étant intervenue que le 13 février 2020.
10. En cinquième lieu, pour les motifs exposés au point 3, M. D... ne peut utilement soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire serait illégale par voie de conséquence de la décision portant refus de titre de séjour.
11. En sixième lieu, aux termes de l'article L.743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI ".
12. Il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l'article L. 743-1 que lorsqu'un demandeur d'asile a formé un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides rejetant sa demande d'asile et que ce recours est lui-même rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile, il n'a droit de se maintenir sur le territoire que jusqu'à la date de la lecture en audience publique de cette décision.
13. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours formé par M. D... contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides par une décision lue en audience publique le 9 décembre 2019. A cette date, ladite décision présente un caractère définitif, au sens des dispositions de l'article L.743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, à la date d'édiction de l'obligation de quitter le territoire français litigieuse le 31 décembre 2019, le préfet des Alpes-Maritimes pouvait ainsi l'obliger à quitter le territoire français dans les conditions prévues au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.
14. Enfin, s'agissant des autres moyens invoqués par M. D... tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, de ce que la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui avaient été précédemment invoqués dans les mêmes termes devant le juge de première instance, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par la magistrate désignée du tribunal administratif de Nice aux points 13 à 17 de son jugement.
15. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de M. D..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins de suspension de l'exécution de l'arrêté litigieux, d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. F... D... et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Fait à Marseille, le 4 décembre 2020.
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N° 20MA02347