Par une requête, enregistrée le 10 août 2015, régularisée le 18 août 2015, et un mémoire, enregistré le 19 janvier 2016, M. B..., représenté par Me D..., demande au juge des référés de la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 24 juillet 2015 du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) de prescrire une expertise médicale relative à son accident de service ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Alès la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, sa demande d'expertise n'était pas dépourvue d'utilité en raison de son caractère prématuré ; en effet, l'expertise sollicitée visait à établir le lien entre l'accident de service dont il a été victime le 19 août 2014 et les lésions dont il souffre, et elle faisait suite à une décision du maire de la commune d'Alès du 25 février 2015 refusant, conformément à l'avis du comité médical, l'imputabilité au service de ses lésions, décision qu'il a contestée devant le tribunal administratif, le 17 mai 2015 ; cette demande avait un objet distinct de la procédure, seule prise en compte par le juge des référés, qui a été engagée par la commune d'Alès et qui avait pour objet de rechercher son éventuelle inaptitude totale et définitive à exercer ses fonctions, dans le cadre d'un congé de maladie ordinaire, procédure au cours de laquelle le comité médical a, le 28 mai 2015, sursis à statuer afin de recueillir l'avis d'un spécialiste;
- les douleurs rachidiennes dont il souffre, à la suite de son accident de service, sont en lien avec cet accident, ainsi qu'il résulte du rapport établi le jour même de cet accident par le service des urgences du centre hospitalier d'Alès et, le 30 janvier 2015, par le médecin expert désigné par son assureur qui relève, en outre, l'absence d'antécédent ; le médecin psychiatre, consulté par ce dernier, a effectué les mêmes constatations en relevant que son état n'était pas consolidé ; ainsi, la mesure d'expertise sollicitée présentait un caractère utile ; les lésions en cause sont, contrairement à ce que soutient en défense la commune d'Alès, différentes des pathologies subies en 2009 à la suite de son agression.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2015, la commune d'Alès, représentée par Me F... de la SCP d'avocats Juris Excell, conclut au rejet de la requête et à ce que l'appelant soit condamné à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux dépens.
Elle fait valoir que :
- les douleurs sur le rachis cervical dont souffre M. B... résultent non de l'accident de service du 19 août 2014 mais d'un état préexistant ainsi qu'il résulte de l'avis rendu le 15 décembre 2009 par la commission de réforme à la suite de l'agression physique dont l'intéressé a été victime, le 11 mai 2009, sur son lieu de travail ; l'état de santé du requérant était parfaitement connu ;
- elle a saisi le comité médical départemental et ce dernier, dans son avis du 28 mai 2015, a sursis à statuer jusqu'à ce que l'intéressé soit examiné par un spécialiste agréé ; en conséquence, la demande d'expertise du requérant était prématurée et donc dépourvue de caractère utile.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Par une décision en date du 1er septembre 2015, le président de la cour administrative d'appel de Marseille a désigné, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, Mme Buccafurri, présidente de la 9ème chambre, pour juger les référés.
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) " ; que, si le juge des référés n'est pas saisi du principal, l'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il lui est demandé d'ordonner sur le fondement de ces dispositions doit être appréciée dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, relevant lui-même de la compétence de la juridiction à laquelle ce juge appartient et auquel cette mesure est susceptible de se rattacher, ainsi que des possibilités ouvertes au demandeur pour arriver au même résultat par d'autres moyens ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., adjoint technique de 1ère classe au sein des services municipaux de la commune d'Alès, affecté en dernier lieu au service courrier, a été victime, le 19 août 2014, d'un accident de la circulation alors qu'il était en service ; que, par une décision en date du 25 février 2015, le maire de la commune d'Alès, suivant en cela l'avis de la commission de réforme rendu le 27 janvier 2015, a refusé l'imputabilité au service des lésions consécutives à l'accident du 19 août 2014 et a placé l'intéressé en congé de maladie ordinaire pour la période allant du 20 août 2014 au 16 février 2015 ; que les arrêts de maladie ordinaire de M. B... atteignant ainsi une durée de six mois, le maire de la commune d'Alès a saisi le comité médical afin que cette instance émette un avis sur l'aptitude ou l'inaptitude physique totale et définitive aux fonctions de l'agent ou à toutes fonctions ; que, le comité médical a, dans sa séance du 28 mai 2015, sursis à statuer sur l'avis médical sollicité par la commune d'Alès et a requis l'avis d'un spécialiste agréé ; que, se fondant sur cette dernière circonstance, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a rejeté, par l'ordonnance attaquée, la demande d'expertise sollicitée par M. B... au motif qu'elle était prématurée et donc dépourvue d'utilité ;
3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, comme le fait valoir en appel M. B..., la mesure d'expertise sollicitée en première instance avait pour objet de déterminer si les lésions dont souffrait l'intéressé, en l'occurrence des douleurs rachidiennes diffuses associées à une cruralgie mal systématisée du côté gauche, pouvaient avoir un lien avec l'accident de service dont il a été victime le 19 août 2014 et s'inscrivait dans le cadre du recours pour excès de pouvoir engagé par l'intéressé, le 17 mai 2015, devant le tribunal administratif de Nîmes et dirigé contre la décision du maire de la commune d'Alès du 25 février 2015 refusant l'imputabilité au service de ces mêmes lésions ; qu'ainsi, la mesure sollicitée par le requérant ne présentait pas le même objet que la procédure engagée par la commune d'Alès en vue de déterminer l'aptitude ou l'inaptitude totale et définitive aux fonctions de cet agent et dans le cadre de laquelle le comité médical avait décidé de surseoir à statuer en vue de requérir l'avis d'un spécialiste ; que la mesure sollicitée en référé par M. B... ne pouvait, par suite, être regardée comme présentant un caractère prématuré et, de fait, comme dépourvue d'utilité ;
4. Considérant, d'autre part, qu'au soutien de sa demande d'expertise, M. B... a versé au dossier un certificat médical, établi le 30 janvier 2015, par le Docteur Barthélémi, médecin agréé et expert auprès de la cour d'appel de Nîmes, désigné par son assureur, qui précise que, d'après les documents médicaux présentés par l'intéressé, ce dernier n'a pas d'antécédent susceptible d'avoir influé sur la nature ou sur l'évolution des lésions imputables à l'accident de service du 19 août 2014, indique, en outre, que l'examen clinique de l'intéressé permet de relever, concernant le rachis cervical " un syndrome rachidien avec limitation des amplitudes articulaires mais sans signe clinique d'atteinte radiculaire " et concernant le rachis dorso-lombaire, " une limitation du mouvement de flexion sans signe d'atteinte radiculaire " et conclut à l'absence de consolidation de l'état de santé de M. B... ; que ce même certificat mentionne l'avis d'un médecin psychiatre, consulté le 12 janvier 2015 à la demande du Docteur Barthélémi, et faisant état d'un syndrome post-commotionnel imputable à l'accident de service du 19 août 2014 ; que ces éléments médicaux sont en contradiction avec l'avis de la commission de réforme en date du 27 janvier 2015 indiquant, qu'à l'exception de la prise en charge d'un jour de soins, aucun arrêt de travail n'est imputable à l'accident de service et que l'état de santé de l'agent est consolidé à la date du 20 août 2014 ; qu'ils divergent également des affirmations, présentées en défense, par la commune d'Alès selon lesquelles les douleurs radiculaires dont se plaint M. B... résulteraient d'un état pré-existant consécutif à un précédent accident de service subi par l'intéressé le 11 mai 2009 ; que, compte tenu de ces éléments contradictoires, la mesure d'expertise demandée en référé est de nature à permettre, dans les meilleurs délais, d'évaluer l'état de santé de M. B... et d'éclairer le juge du fond qui sera appelé à statuer sur la légalité de la décision du 25 février 2015 du maire de la commune d'Alès, mentionnée au point 2, et actuellement contestée devant le tribunal administratif ; que, par suite, contrairement aux énonciations de l'ordonnance attaquée, l'expertise sollicitée en référé présente un caractère utile au sens de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ;
5. Considérant, en outre, que la mesure d'expertise sollicitée par M. B..., notamment en ce qu'elle tend à voir déterminer la nature et l'étendue des préjudices consécutifs à son accident de service, est susceptible de permettre à l'intéressé d'engager, le cas échéant, une action en responsabilité à l'encontre de la commune d'Alès ; que, dans ces conditions, cette expertise présente, également à ce titre, un caractère utile ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande et à demander l'annulation de cette ordonnance ; qu'il y a lieu de prescrire cette expertise dans les conditions définies à l'article 2 ci-dessous ;
7. Considérant que la commune d'Alès, qui succombe dans la présente instance, ne peut prétendre au remboursement des frais qu'elle a exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
O R D O N N E :
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes du 24 juillet 2015 est annulée.
Article 2 : Le Dr C...demeurant ...est désigné comme expert avec pour mission :
1°) de se faire remettre tous documents médicaux utiles à sa mission et notamment l'entier dossier médical détenu par la commune d'Alès ;
2°) d'examiner M. B..., de décrire ses pathologies préexistantes et les lésions qu'il impute à l'accident ;
3°) de dire si la symptomatologie actuelle (douleurs rachidiennes) et les arrêts de travail dont il a bénéficié depuis le 20 août 2014 sont imputables aux séquelles de l'accident de service dont il a été victime le 19 août 2014 ;
4°) de dire si son état de santé est consolidé et, dans l'affirmative, préciser le taux d'invalidité permanente partielle dont il reste atteint ;
5°) de décrire et évaluer les préjudices subis par M. B... du fait de cet accident de service, notamment son préjudice moral, son pretium doloris, et son préjudice d'agrément ;
6°) d'entendre tous sachants qu'il jugera utile de consulter.
Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit et déposera son rapport en deux exemplaires au greffe de la Cour dans le délai de 4 mois à compter de la notification de la présente ordonnance, accompagné de son état de vacations, frais et honoraires et adressera simultanément un exemplaire dudit rapport à chacune des parties en cause.
Article 4 : La commune d'Alès versera une somme de 1 500 (mille cinq cent) euros à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la commune d'Alès présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B..., à la commune d'Alès et à l'expert M. E... C....
Fait à Marseille, le 17 février 2016.
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N° 15MA03381