Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 août 2021, Mme A..., représentée par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 avril 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 9 février 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au profit de son conseil, lequel s'engage à renoncer à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
- la décision n'est pas suffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est privée de base légale dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'un défaut d'examen réel et sérieux, le préfet s'étant cru lié par le rejet de sa demande d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Mme A... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juin 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., de nationalité arménienne, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Hérault du 29 juillet 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) "
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, s'agissant des moyens tirés du défaut de motivation et d'examen réel et complet de sa situation, il y a lieu de les écarter par adoption de motifs retenus par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier aux points 7 et 8 de son jugement.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France en août 2018 accompagnée de son époux, décédé et inhumé sur le territoire national en novembre 2018. Elle se prévaut de la présence en France de sa fille et de ses petits-enfants, de nationalité française et fait valoir que son fils est porté disparu en Arménie. Toutefois, Mme A... résidait en France depuis moins de trois ans à la date la décision attaquée et a vécu en Arménie jusqu'à l'âge de 62 ans. Elle ne justifie en France d'aucune intégration particulière. Dans ces conditions, et quand bien même son époux y est décédé et alors que Mme A... n'indique pas que sa sœur à laquelle elle a donné procuration pour gérer ses intérêts en Arménie n'y résiderait plus, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur la décision fixant le pays de destination :
6. En l'absence d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait, pour ce motif, privée de base légale doit être écarté.
7. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
8. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée, que le préfet ne s'est pas cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, mais qu'il a examiné la situation personnelle de l'intéressée et n'a fixé le pays de destination de l'éloignement qu'après avoir relevé que la requérante, à qui il incombait, en tout état de cause, de faire état de pièces ou arguments sur ce point, n'apportaient aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels qu'elle dit encourir en cas de retour en Arménie, pays considéré comme sûr. Ainsi, la décision ne saurait être entachée d'erreur de droit et d'un défaut d'examen.
9. D'autre part, Mme A... affirme craindre en Arménie la menace de plusieurs personnes, qui l'auraient agressée à plusieurs reprises après qu'elle ait dénoncé son ancien supérieur hiérarchique et refusé d'endosser la responsabilité de détournements de fonds que celui-ci lui aurait demandé de commettre. Ni les éléments généraux versés au dossier relatant la pratique de la corruption au sein de la classe politique et du système judiciaire en Arménie, ni les déclarations de l'intéressée, le certificat établi par un responsable du département de police d'Erevan sur lequel elle n'apporte pas de précision alors que la Cour nationale du droit d'asile a émis des doutes sur son authenticité, ou encore le témoignage d'une ancienne collègue de travail ne suffisent à établir la réalité des risques allégués, alors au demeurant que l'office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ont, par deux fois au vu des mêmes éléments, rejeté la demande d'asile de l'intéressée. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions et stipulations précitées et serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de Mme A..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... et à Me Ruffel.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Fait à Marseille, le 17 février 2022
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N°21MA03312