Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er février 2021, Mme G..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er octobre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me D... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision a été prise par une autorité incompétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 10 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 18 mars 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens sont infondés.
L'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme G... par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 11 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. F... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... relève appel du jugement du 1er octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-I-008 du 7 janvier 2020, publié au recueil des actes administratifs du 8 janvier suivant, M. Pascal E..., secrétaire général de la préfecture, a reçu délégation du préfet de l'Hérault pour " la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers ". Cette délégation, qui n'est pas trop générale contrairement à ce qui est soutenu, habilitait M. E... à signer l'acte contesté. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.
3. En deuxième lieu, la décision en litige expose de manière circonstanciée les éléments de fait pris en compte par le préfet, notamment relatifs à sa situation médicale et à sa situation en cas de retour dans son pays d'origine. Si Mme G... reproche au préfet d'avoir indiqué qu'elle n'était pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays et que la cellule familiale pouvait se reconstituer en Géorgie alors qu'elle aurait été victime de violences conjugales, elle n'établit pas avoir, dans le cadre de sa demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade, fait part de cette circonstance au préfet, et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait effectivement dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine. Le moyen tiré du défaut d'examen complet doit ainsi être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ".
5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
6. Il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de Mme G..., qui souffre d'une insuffisance rénale chronique de stade V, présente un caractère de gravité, dont le défaut de prise en charge est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois le collège de médecins de l'OFII a considéré, dans son avis du 2 mars 2020, que l'intéressée pouvait voyager sans risque et qu'elle pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Géorgie. Les pièces de nature médicale produites par l'intéressée, indiquant notamment qu'elle suit une hémodialyse trois fois par semaine, que ce traitement ne peut être remplacé que par une transplantation rénale et que seules les transplantations rénales sur des membres vivants de la famille sont possibles en Géorgie, ne permettent pas d'établir que Mme G... ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Géorgie. En effet, d'une part, il n'est pas établi que son fils et les autres membres de sa famille seraient tous incompatibles et qu'elle ne pourrait ainsi bénéficier d'une transplantation intra familiale. D'autre part, les pièces produites ne permettent pas plus d'établir qu'une transplantation sur donneur en état de mort cérébrale serait impossible. En outre, il n'est pas établi qu'elle ne pourrait suivre son traitement par hémodialyse en Géorgie. Enfin, il n'est pas non plus établi qu'elle ne pourrait, dans un laps de temps de 48 à 72 heures, retourner en Géorgie et suivre de nouveau son hémodialyse sur place. Dans ces conditions, Mme G... n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions précitées.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme G... est entrée en France en avril 2019. Elle ne se prévaut d'aucune attache sur le territoire français, à l'exception de son fils qui fait toutefois l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ne justifie d'aucune insertion sociale, personnelle ou familiale et n'apporte pas d'élément de nature à établir qu'elle aurait fixé en France le centre de sa vie privée et familiale. Mme G... ne démontre pas être dépourvue de toute attache familiale en Géorgie, étant précisé que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a considéré que les risques allégués en cas de retour dans son pays à raison d'actes de violence perpétrés par son entourage n'étaient pas établis. Dans ces conditions, la décision en litige ne méconnait pas les stipulations et dispositions précitées, ne porte pas à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, la décision portant refus de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
10. En second lieu, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 et 8 du présent arrêt.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
12. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme G..., il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction.
Sur les frais liés au litige :
13. L'État n'étant pas la partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de Me D... présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 199 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... G..., au ministre de l'intérieur et à Me D....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2021 où siégeaient :
- M. F..., président-assesseur, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme C..., première conseillère,
- Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mai 2021.
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N°21MA00455