Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 3 septembre 2018 et le 5 octobre 2018, la SCEA " L'Or de nos collines ", représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 juillet 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au maire de la commune du Beausset de lui délivrer le permis d'aménager sollicité, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande ;
4°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune du Beausset la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a substitué aux motifs illégaux de la décision attaquée le motif fondé sur la méconnaissance de la salubrité publique énoncé par l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, le refus de permis d'aménager ne pouvait se fonder ni sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme, ni sur la méconnaissance des dispositions de l'article ND4-2B du règlement du plan d'occupation des sols.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2019, la commune du Beausset, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société requérante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant la commune du Beausset.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt n° 12MA01039 du 29 janvier 2015 la cour administrative d'appel de Marseille a annulé l'arrêté du 21 décembre 2009 par lequel le maire du Beausset a refusé d'autoriser la SCEA " L'Or de nos collines " à réaliser des travaux d'affouillement et d'exhaussement sur un terrain de 67 000 m² situé lieudit Jas de Giraud afin d'y planter dix mille oliviers. Dans le cadre de l'injonction de réexamen de la demande alors prononcée par la Cour, suite à la confirmation de sa demande par la société pétitionnaire le 15 décembre 2015, par arrêté du 5 février 2016 le maire du Beausset a de nouveau refusé de lui accorder ledit permis d'aménager. La SCEA " L'Or de nos collines " relève appel du jugement du 10 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus de permis d'aménager du 5 février 2016.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Pour refuser l'autorisation sollicitée, le maire de la commune du Beausset se fondait, en premier lieu, sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme, en deuxième lieu, sur la méconnaissance des dispositions de l'article ND4-2B du règlement du plan d'occupation des sols, et en troisième lieu, sur la nécessité de régulariser les aménagements irréguliers. Ces trois motifs ont été invalidés par le tribunal, qui a toutefois estimé que le motif tiré de l'existence d'un risque pour la salubrité publique au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme que l'autorité administrative lui demandait de substituer était de nature à justifier légalement la décision en cause.
3. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "
4. D'une part, l'autorité de chose jugée appartenant aux décisions des juges répressifs devenues définitives qui s'impose aux juridictions administratives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement et qui sont le support nécessaire du dispositif. D'autre part le moyen tiré de la méconnaissance de cette autorité, qui présente un caractère absolu, est d'ordre public. Il en va ainsi même si le jugement pénal est intervenu postérieurement à la décision de la juridiction administrative.
5. En l'espèce, il ressort du dossier de demande d'autorisation que la SCEA " L'Or de nos collines " prévoyait un aménagement consistant à un remblaiement " réalisé par apport de matériaux inertes-déblais de démolition, déblais rocheux, caillouteux et terreux issus de chantiers de terrassements publics ou privés. ". Toutefois, il ressort des constatations de faits effectuées par le tribunal correctionnel de Toulon le 27 mai 2015, confirmé par l'arrêt de la 7ème chambre de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence du 6 septembre 2016, qui sont revêtues de l'autorité de la chose jugée ainsi que l'a à bon droit relevé le tribunal, que les remblais effectivement réalisés par la société pétitionnaire sur la parcelle C 1138 étaient constitués de " matériaux divers, en particulier de plastique et de ferraille ", et qu'il n'était pas contesté que " plusieurs dizaines de mètres cubes de remblais, soit l'équivalent de vingt-huit camions, ont déversé des déchets provenant d'un hôpital. ". C'est donc à juste titre que le tribunal a estimé que ces remblais, qui ne sont pas nobles, ont contribué à polluer le sol et à le rendre impropre à l'exploitation d'une activité agricole, en l'espèce une oliveraie, et en a déduit que le maire aurait pu, sans erreur d'appréciation, se fonder sur l'existence d'un risque pour la salubrité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour refuser le permis d'aménager sollicité. Ce motif suffit à justifier la décision de refus attaquée.
6. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de permis d'aménager du 5 février 2016.
Sur les conclusions en injonction :
7. Le présent arrêt rejetant les conclusions en annulation de la société requérante, ses conclusions en injonction ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SCEA " L'Or de nos collines " dirigées contre la commune du Beausset qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Et il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCEA " L'Or de nos collines " la somme de 1 500 euros, à verser à la commune du Beausset en application de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SCEA " L'Or de nos collines " est rejetée.
Article 2 : La SCEA " L'Or de nos collines " versera une somme de 1 500 euros à la commune du Beausset sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA " L'Or de nos collines ", à M. D... A... et à la commune du Beausset.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.
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N°18MA04118 4
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