Par une requête, enregistrée le 6 avril 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes n° 1800777 du 9 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté n° 18130610M du 6 mars 2018 du préfet des Bouches-du-Rhône lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour deux ans ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance en litige est irrégulière dès lors que le numéro de télécopie portée sur la notification de l'arrêté en litige comportait une erreur qui faisait obstacle à ce que le délai de recours puisse lui être opposé ;
- l'ordonnance en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le premier envoi de la requête introductive d'instance, par télécopie, est intervenu dans le délai de recours ;
- la décision du préfet des Bouches-du-Rhône portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- l'autorité signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français était incompétente pour ce faire ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations en défense.
Un mémoire, présenté pour M. A..., a été enregistré le 7 novembre 2018 et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Silvy a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) III. En cas de placement en rétention en application de l'article L. 551-1, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant, dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention. (...) ".
2. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes de l'article R. 414-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1481 du 2 novembre 2016 applicable à la date d'introduction de la requête de première instance : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat, un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, une personne morale de droit public autre qu'une commune de moins de 3 500 habitants ou un organisme de droit privé chargé de la gestion permanente d'un service public, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. La même obligation est applicable aux autres mémoires du requérant. (...) ". Et aux termes de l'article R. 414-4 de ce code : " Si la requête relève d'une procédure qui impose au juge de statuer dans un délai inférieur ou égal à un mois, son auteur signale son urgence en sélectionnant le type de procédure dans la rubrique correspondante. ".
3. Il résulte de ces dispositions précitées que l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais de recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif.
4. En première instance, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. A... pour tardiveté.
5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 6 mars 2008 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement a été notifié à celui-ci par voie administrative le même jour à 18h15, par un agent du commissariat de Vitrolles-Marignane, avec l'indication des voies et délais de recours. La fiche de notification, qui lui a été remise en mains propres, mentionnait le délai de quarante-huit heures et la possibilité de saisir " par tous moyens, y compris par télégramme ou télécopie " le tribunal administratif de Nîmes, dont était précisé, outre l'adresse, le numéro de télécopie.
6. Si M. A... fait valoir que le numéro de télécopie mentionnée sur ce document serait erroné et que les tentatives d'envoi de la requête introductive d'appel par son conseil ont échoué du fait de cette mention inexacte, il ressort seulement des pièces fournies et notamment des journaux d'appel émis par le télécopieur émetteur que les tentatives successives d'envoi de cette requête le 8 mars 2018 entre 18h02 et 18h57 ont échoué en raison d'une absence de réponse dès lors que cette ligne était occupée. Ces seuls éléments ne sont, par suite, pas de nature à établir que le numéro de télécopie indiqué sur la fiche de notification serait erroné. Au surplus, les dispositions, applicables depuis le 1er janvier 2017, des articles R. 414-1 et suivant du code de justice administrative imposent aux avocats, à peine d'irrecevabilité, d'adresser leurs écritures aux juridictions par voie électronique au moyen de l'application informatique dite " Télérecours " prévue par ces dispositions. La seule erreur portant sur une modalité subsidiaire de saisine des juridictions administratives, à la supposer même établie, ne serait dès lors pas de nature à constituer une ambiguïté ayant empêché le délai de courir ou à caractériser une privation du droit à un recours effectif protégé notamment par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le délai de recours ne lui était pas opposable en raison d'insuffisances de la notification.
7. La requête de première instance de l'intéressé tendant à l'annulation des décisions litigieuses n'a été enregistrée que le 9 mars 2018 à 12h30 au tribunal administratif de Nîmes, soit après l'expiration du délai de recours rappelé au point 1.
8. Il résulte de ce qui précède que la demande de première instance était tardive et donc entachée d'une irrecevabilité manifeste. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes l'a rejetée par l'ordonnance contestée. Sa requête ne peut qu'être rejetée, y compris les conclusions à fin de condamnation de l'État, qui n'est pas la partie perdante, à prendre en charge les frais de procédure.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- M. Silvy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 novembre 2018.
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N° 18MA01579
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