Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 août 2021, M. B..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 mai 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le juge de première instance a commis une erreur de droit sur l'application de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en se remettant aux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation en méconnaissance de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation et méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale ;
- elle est entachée d'erreur de droit et d'un défaut d'examen ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est privée de base légale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Marseille en date du 9 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 14 janvier 1989 et de nationalité soudanaise, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Hérault en date du 23 février 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les premiers vice-présidents (...) des cours, (...) peuvent, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
Sur la régularité du jugement :
3. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. B... ne peut donc utilement se prévaloir d'une erreur de droit que le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier aurait commise pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. / (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que le préfet, s'il a la faculté d'examiner, le cas échéant d'office, le droit d'un étranger demandeur d'asile, auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusée, de demeurer sur le territoire français à un autre titre que l'asile, ne peut le faire qu'avec les éléments sur la situation de l'intéressé dont il dispose. Il ressort des termes de l'arrêté litigieux, qui fait mention des démarches du requérant pour solliciter l'asile, que le préfet a examiné sa situation compte tenu des éléments portés à sa connaissance. En outre, le préfet a examiné les conséquences de sa décision sur le droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de la situation de M. B... et de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
6. En deuxième lieu, les moyens relatifs à la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne et à l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés par adoption des motifs appropriés retenus par le premier juge au point 8 de son jugement, le requérant ne faisant état devant la cour d'aucun élément distinct de ceux soumis à son appréciation. Il convient d'ajouter que si l'intéressé a déposé une nouvelle demande de titre de séjour le 15 mars 2021, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige qui a été pris antérieurement.
En ce qui concerne la fixation du pays de destination :
7. Le moyen portant sur l'exception d'illégalité de la mesure d'éloignement ne peut être qu'écarté eu égard à ce qui vient d'être jugé plus haut.
8. Le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en ne procédant pas à un examen particulier de sa situation au regard des risques qu'il encourait en cas de retour dans son pays d'origine, doit être écarté par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné aux point 11 de son jugement.
9. Enfin, la demande d'asile présentée par le requérant a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 avril 2020, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 11 février 2021. Aux termes de cette décision, il a été jugé que : " ni les pièces du dossier ni les déclarations de M. B... n'ont permis d'appréhender la réalité des faits présentés comme étant à l'origine de son départ du Soudan. Ainsi, si les pièces produites, et plus particulièrement le support informatique contenant des enregistrements de manifestations auxquelles il a pris part début 2019 accompagné de photographies extraites desdits enregistrements, permettent d'établir sa présence lors de manifestations à Khartoum ayant réuni des milliers de ressortissants soudanais, ses déclarations sont demeurées peu explicites sur son ciblage par les forces de sécurité soudanaises. De la même manière, interrogé sur ses motivations à prendre part à ces manifestations et l'intérêt de s'y prendre en photographie, il a produit un discours embrouillé et peu cohérent sur sa volonté de pouvoir prouver, le cas échant, les mauvais traitements endurés par les manifestants sans pour autant expliquer cette volonté de prendre des autoportraits sans lien avec ladite répression, tout en demeurant peu enclin à revenir sur les mots d'ordre animant ces manifestations auxquelles il aurait pris part, ne pouvant à cet égard citer les slogans scandés par la foule. Par ailleurs, l'intéressé, qui allègue avoir été arrêté en raison de sa présence sur les lieux de plusieurs manifestations politiques à Khartoum, a tenu à ce sujet des propos évasifs et insuffisamment circonstanciés au sujet des conditions de son arrestation et des modalités de sa détention, s'agissant notamment des charges retenues à son encontre par les autorités, révélant qu'il n'était pas ciblé personnellement mais qu'il avait été arrêté dans le cadre d'arrestations groupées. De surcroît, il est demeuré peu précis sur son arrestation lors de sa participation à une manifestation ainsi que sur les mauvais traitements dont il aurait été victime à cette occasion. A cet égard, le certificat médical délivré le 9 septembre 2019 par un médecin légiste se bornant à faire état de douleurs résiduelles attribuées par l'intéressé aux faits qu'il allègue, sans se prononcer sur leur compatibilite´ avec les alle´gations de l'inte´resse´ ne permet pas de conside´rer qu'il serait expose´ a` des risques de perse´cutions en cas de retour dans son pays d'origine en l'absence de déclarations précises et circonstanciées. Enfin, la réalité des recherches dont il ferait l'objet s'est révélée incohérente et difficilement conciliable avec les conditions de son départ par voie aérienne muni de son propre passeport revêtu d'un visa Schengen. Ainsi, ni les pièces du dossier ni les déclarations faites à l'audience devant la Cour ne permettent de tenir pour établis les faits allégués et pour fondées les craintes énoncées, au regard tant de l'article 1er, A, 2 de la convention de Genève que de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.". En cause d'appel, le requérant, qui ne peut utilement contester cette décision du 11 février 2021, ne fait valoir aucun élément nouveau qui n'aurait pas été soumis à l'appréciation de la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme et celui portant sur les dispositions de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être rejetés.
En ce qui concerne l'interdiction de retour :
10. Comme jugé au point 7, le moyen portant sur l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut être accueilli.
11. Par ailleurs, le requérant ne peut valablement faire valoir qu'il a " comme la quasi-totalité des déboutés d'asile dans l'Hérault, (...), hérité " du forfait " interdiction de retour de quatre mois ", alors qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige que le préfet a relevé que l'intéressé ne justifiait pas de circonstances humanitaires et qu'il avait tenu compte des critères permettant d'apprécier le prononcé et la durée de ladite mesure.
12. Enfin, il ressort de l'arrêté contesté que le préfet, après avoir rappelé la récente date de l'entrée de l'intéressé sur le territoire français, a relevé que ses liens familiaux en France n'étaient pas établis, qu'il ne justifiait pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, qu'il n'avait pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et qu'il ne constituait pas une menace à l'ordre public. Ce faisant, le préfet a pris en compte les critères légaux énoncés à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a ainsi pas fait une inexacte application de ces dispositions. Le moyen selon lequel la décision d'interdiction de retour sur le territoire français serait disproportionnée, dès lors qu'il n'a pas fait objet d'une précédente mesure d'éloignement et qu'il ne constitue pas un trouble à l'ordre public doit être écarté eu égard à la durée brève de la mesure et alors même que l'intéressé fait désormais valoir la présence en France d'un frère titulaire d'un titre de séjour.
13. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de M. B..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Fait à Marseille, le 29 septembre 2021.
2
N° 21MA03632