- la date de consolidation doit être fixée au 20 octobre 2015 ;
- la perte de revenus en raison d'arrêts de travail et l'incidence professionnelle doivent être indemnisées ;
- le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, le préjudice esthétique temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice d'agrément, le préjudice sexuel, le préjudice d'établissement et les préjudices liés à des pathologies évolutives doivent aussi être indemnisés.
Par un mémoire, enregistré le 23 octobre 2019, l'ONIAM, représenté par le cabinet Vatier et Associés, conclut aux mêmes fins que ses précédents mémoires, par les mêmes moyens et demande, en outre, que la somme demandée par M. A... soit ramenée à de plus justes proportions
Il soutient, en outre, que :
- le déficit fonctionnel temporaire est surévalué ;
- le déficit fonctionnel permanent évalué à 5 % a été indemnisé de façon excessive ;
- il n'existe pas de préjudice d'agrément ;
- le préjudice sexuel temporaire est indemnisé au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
- le préjudice sexuel permanent est en lien avec la contamination par le VIH ;
- le préjudice d'établissement n'est pas démontré ;
- les préjudices extrapatrimoniaux évolutifs sont inclus dans les souffrances endurées ;
- les préjudices patrimoniaux ont été suffisamment évalués par le tribunal.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les conclusions de M. Argoud, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Il est constant que la contamination de M. A... par les virus de l'immunodéficience humaine et de l'hépatite C est imputable aux transfusions sanguines dont il a fait l'objet.
Sur la fixation de la date de consolidation :
2. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par l'arrêt avant dire droit du 14 juin 2018 de la cour, que l'état de M. A... doit être considéré comme consolidé à la date du 20 octobre 2015, correspondant à la persistance d'une virémie VHC négative plus de 6 mois après la fin du traitement antiviral qu'il a entrepris au mois de septembre 2014, après une aggravation de la fibrose dont il souffrait au début de l'année 2013.
Sur l'évaluation des préjudices :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
3. Il résulte de l'instruction, et notamment du second rapport d'expertise, que les arrêts de travail dont M. A... a bénéficié du 5 avril au 12 décembre 2011 et du 14 mai au 20 juin 2012 sont en lien avec le VHC et ses conséquences hépatiques qui ont participé à la fatigue, aux troubles de l'humeur et à la dépression et ont joué un rôle dans la baisse de sa capacité de travail. Toutefois, par les pièces qu'il produit, le requérant n'établit pas que la baisse de ses revenus au titre des années 2011 et 2012 par rapport à l'année 2010 est imputable aux arrêts de travail alors qu'il a perçu des indemnités journalières de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande d'indemnisation de la perte de gains professionnels au titre de ces deux périodes.
4. Il résulte de l'instruction, et notamment des deux expertises, que les traitements antiviraux de l'hépatite C d'avril à décembre 2001 et à partir du mois de septembre 2014 ont entrainé une fatigue, des troubles de l'humeur et une dépression conduisant à des difficultés pour le requérant à maintenir une activité professionnelle régulière pendant la journée ainsi qu'à de multiples arrêts de travail. M. A... a été licencié en 2001 puis, après avoir retrouvé un emploi en 2004, a été déclaré inapte définitivement au métier de technicien commercial le 25 juin 2012. Il occupe depuis le mois de septembre 2013 un poste de contrôleur fiscal. Il a, en outre, été reconnu comme travailleur handicapé le 1er avril 2011 et a bénéficié du 13 juillet 2011 au 12 juillet 2012 d'un accompagnement spécifique pour l'aider dans ses démarches professionnelles. Sa maladie, découverte au mois de septembre 1990, a ainsi contraint l'intéressé à se réorienter et à se former, l'a empêché de poursuivre son activité professionnelle antérieure et a réduit ses possibilités d'emploi. Eu égard à ses aptitudes professionnelles, au déficit fonctionnel permanent dont il reste atteint et à la circonstance qu'il était âgé de cinquante ans à la date de consolidation de son état de santé, l'incidence professionnelle de la contamination doit être évaluée à la somme de 25 000 euros.
En ce qui concerne les préjudices extra patrimoniaux :
5. Aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique : " Lorsque la commission régionale estime que le dommage est indemnisable au titre du II de l'article L. 1142-1, ou au titre de l'article L. 1142-1-1 l'office adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis. (...). L'acceptation de l'offre de l'office vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que M. A... a signé le 30 novembre 2011 un protocole transactionnel d'indemnisation aux fins de réparer les préjudices relatifs aux troubles divers dans les conditions d'existence liés à sa contamination pour le virus de l'hépatite C lors de transfusions sanguines dans son enfance à hauteur de 26 000 euros. Cette indemnisation recouvre les souffrances endurées, le déficit fonctionnel temporaire de 50 % retenu par le rapport de l'expertise diligentée par l'ONIAM pendant la période de traitement de l'hépatite virale C du 11 avril 2001 à la fin du mois de décembre 2001 ainsi que le préjudice lié à une pathologie évolutive. Il n'est dès lors pas recevable à demander la réparation devant le juge de ces mêmes préjudices qui ont déjà été indemnisés, ainsi que l'a considéré à juste titre le tribunal.
7. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise ordonnée par l'arrêt avant dire droit, que M. A... a subi une période de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 20 % du 11 octobre 2011 au 20 octobre 2015 dès lors que le VHC et ses conséquences hépatiques ont participé à la fatigue, aux troubles de l'humeur et à la dépression dont a souffert l'intéressé avec des conséquences sur ses conditions d'existence, sur une partie de ses troubles sexuels et sur une perte d'agrément. Il sera fait une juste appréciation du déficit fonctionnel temporaire, y compris les préjudices sexuel et d'agrément subis pendant ces quatre années, en l'évaluant pour cette période à la somme de 5 000 euros.
8. L'intensité des souffrances endurées par l'intéressé a été évaluée par l'expert à 2,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de l'indemnité due en réparation de ce préjudice en la fixant à la somme de 2 500 euros.
9. Il résulte de l'instruction, et notamment des deux rapports d'expertise, que le préjudice esthétique temporaire fixé à 2,5 sur une échelle de 1 à 7 lié à un amaigrissement important et aux conséquences de la lipodystrophie au niveau du coude et de la nuque a pour origine la contamination par le VIH, et non le VHC, et son traitement depuis environ 10 ans. M. A... n'est par suite pas fondé à solliciter une indemnisation à ce titre.
10. Il résulte de l'instruction que l'expertise ordonnée par l'ONIAM n'avait pu fixer le déficit fonctionnel permanent de M. A... en l'absence de stabilisation de son état de santé. Son déficit fonctionnel définitif en lien avec la contamination par le VHC a été évalué à la date de consolidation de son état de santé à 5 %. Compte tenu de son âge à la date de consolidation, les premiers juges ont, en lui accordant à ce titre la somme provisionnelle de 30 000 euros, fait une évaluation excessive de ce préjudice, qui devra être réparé par une somme de 5 500 euros.
11. L'existence d'un préjudice d'établissement n'est pas établie, M. A... ayant fondé une famille postérieurement à sa contamination par le VHC. Il n'est pas démontré que sa maladie, et non le VIH, lui a fait perdre une chance de refaire sa vie après son divorce. Il suit là qu'il n'est pas fondé à demander l'indemnisation de ce préjudice.
12. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la requête de l'ONIAM, de porter le montant de l'indemnité globale accordée par le tribunal administratif de Nice à M. A... à la somme de 38 000 euros et de rejeter le surplus des conclusions de son appel incident.
Sur les dépens :
13. Il y a lieu de mettre les frais de l'expertise ordonnée par l'arrêt de la cour du 14 juin 2018, liquidés et taxés à la somme de 2 400 euros, à la charge de l'ONIAM.
Sur les frais liés au litige :
14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A....
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'ONIAM est rejetée.
Article 2 : La somme de 30 000 euros que l'ONIAM a été condamné à verser à M. A... par le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 juin 2015 est portée à 38 000 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 juin 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les frais de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 400 euros, sont mis à la charge de l'ONIAM.
Article 5 : L'ONIAM versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de M. A... présentées par la voie de l'appel incident est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à M. C... A....
Copie en sera adressée à l'expert.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019 où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme D..., présidente-assesseure,
- Mme E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.
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N° 15MA03235